Européennes : Leçons de campagne, l’unité et la novation (par Clémentine Autain pour le site des communistes refondateurs)

jeudi 30 juillet 2009.
 

Dans quelle mesure les élections européennes rebattent-elles les cartes à gauche ? Six électeurs sur dix ne sont pas allés voter : c’est le fait majeur. Et le PS s’est pris une nouvelle claque. Alors que la crise du capitalisme, l’ampleur des luttes sociales et la panne de la social-démocratie offraient un « boulevard » à la gauche radicale pour faire valoir son projet, elle ne sort pas gagnante de cette élection (1). Pourtant, le score total du Front de gauche (PCF et Parti de gauche) et du NPA, auquel on peut ajouter les voix de LO, est tout sauf ridicule, puisqu’il avoisine les 12 %. Mais ses divisions l’empêchent une nouvelle fois d’apparaître comme la force qui polarise à gauche. Et c’est Europe Ecologie qui a empoché la mise…

Si Europe Ecologie a réussi à séduire, en particulier dans l’électorat socialiste déçu, c’est qu’elle a allié mise en scène de l’unité et de la novation. Quand le PS affichait péniblement un rassemblement de tribunes et tandis que l’autre gauche faisait listes à part, Europe Ecologie mariait la carpe et le lapin, Daniel Cohn-Bendit et José Bové. Les figures de proue de la campagne verte ne furent pas des responsables classiques d’appareils politiques mais des personnalités telles qu’Eva Joly, connues pour leur engagement dans des combats. Le caractère hybride de cette dynamique a fait en partie sa force. A l’heure de la crise de la représentation politique, ce parti pris a payé. En outre, au moment où les inquiétudes grandissent sur l’avenir de la planète, les thématiques écologiques ont mobilisé, en particulier un électorat jeune, urbain et diplômé, plus prompt que d’autres à aller voter. La tonalité concrète, avec la mise au premier plan de solutions positives (et non en pure opposition), a sans doute joué dans ce résultat inattendu d’Europe Ecologie, arrivé au coude à coude avec le PS.

Cela posé, ça ne fait pas la rue Michel, comme on dit… La campagne écolo n’a pas suffi pour que les catégories populaires retrouvent le chemin des urnes puisque l’abstention fut massive et préoccupante. En outre, la colonne vertébrale environnementale de ce rassemblement européen a peu de chances de déboucher sur une force politique durable, autour de laquelle la gauche pourrait ou devrait se rassembler. Et l’on se souvient du score de Bernard Tapie aux européennes de 1994, un « bon coup » sans lendemain. Il n’en reste pas moins que ce vote pour Europe Ecologie indique à la fois le désir profond de renouvellement à gauche et l’ampleur de l’érosion du PS.

La gauche de transformation sociale et écologique est maintenant au pied du mur. Le fait que le Front de gauche ait obtenu davantage de suffrages que le NPA signifie combien le désir d’unité reste vivace. C’est plus que jamais un impératif pour sortir du « combat de nains », pour se rendre utile aux mobilisations sociales et changer le rapport de force à gauche. La capacité à apparaître unis dans les résistances à la droite au pouvoir et à faire cause commune aux prochaines échéances électorales, notamment aux régionales de 2010, est décisive pour faire bouger les lignes. En cela, le message lancé par le Front de gauche appelant à poursuivre et à élargir l’initiative est un point d’appui. Mais l’unité, pour incontournable qu’elle soit, n’y suffira pas. Sans effort de novation, sans mise à jour sur la forme et sur le fond, et sans cohérence d’ensemble, l’autre gauche ne l’emportera pas. Or, elle le doit et elle le peut. C.A.

1. Lire p. 10 notre dossier sur les élections européennes.

2. Paru dans Regards n°63, été 2009


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