Les conventions de Genève ne sont toujours pas respectées (article de L’Humanité)

vendredi 14 août 2009.
 

Soixantième anniversaire. Les principes fondateurs du droit international, signés en 1949, sont violés chaque jour. Du Proche-Orient à l’Afghanistan, des millions d’innocents en sont les principales victimes.

Cela fait exactement soixante ans, le 12 août 2009, qu’une vingtaine de pays, rejoints rapidement par une cinquantaine d’autres, ont signé et donné vie aux quatre textes fondateurs, les quatre conventions de Genève, qui constituent aujourd’hui la base du droit humanitaire dans les conflits. Droit de la guerre ou droit dans la guerre, comme on veut, soixante ans après leur entrée en vigueur, les principes énoncés dans ces textes pour protéger (dans l’ordre des conventions) les soldats et marins blessés, malades ou capturés ainsi que les civils pris dans la guerre ou en territoires occupés sont aujourd’hui encore allégrement battus en brèche et violés.

Ces conventions, auxquels sont venus s’ajouter en 1977 trois protocoles additionnels défendant notamment les droits des victimes des guerres, sont pourtant paraphées par les 194 États de la planète. Plus d’un demi-siècle après leur naissance, « nous constatons régulièrement des violations du droit international humanitaire sur le terrain allant du déplacement de civils aux attaques indiscriminées et aux mauvais traitements infligés aux prisonniers », regrette le président du Comité de la Croix-Rouge internationale (CICR), le Suisse Jacob Kellenberger. « Même les guerres ont des limites, dit-il ; et si l’on respectait les règles existantes, bon nombre des souffrances causées par les conflits pourraient être évitées. » Le problème du suivi des principes humanitaires a été aggravé ces dernières années du fait que les guerres modernes se sont profondément modifiées.

On assiste désormais rarement à un conflit localisé entre deux armées bien structurées. Même la guerre en Irak ou en Afghanistan (sans oublier le Moyen-Orient et Gaza ou l’Afrique), des conflits asymétriques, ne suivaient plus vraiment un modèle « classique ». Le pire a été touché du doigt lorsqu’une grande puissance comme les États-Unis, dans leur guerre contre le terrorisme, se sont sentis libres de ne pas respecter une bonne partie des prescriptions des conventions de Genève. Et qui plus est, expertise juridique à l’appui, en connaissance de cause… Que ce soit pour la réintroduction de la torture, de l’emprisonnement arbitraire, du mélange opéré entre civils et combattants… la liste de ces violations est longue. Et le mauvais exemple de taille.

« Ces dernières années, la pertinence du droit international humanitaire et des conventions de Genève a été remise en cause face à la complexité croissante des conflits armés, à la difficulté d’établir une distinction entre combattants et civils et face à des phénomènes comme le terrorisme et la guerre asymétrique », reconnaît le président du CICR. Pourtant, estime-t-il, les règles existantes « restent pertinentes ». Et même s’il admet que « certains concepts liés aux conflits modernes doivent être clarifiés et certaines règles renforcées (comme pour les conflits internes aux pays - NDLR) », Jacob Kellenberger ne doute pas qu’« un meilleur respect du droit continue d’être le défi majeur » de notre monde. Le CICR profite d’ailleurs de l’occasion de cet anniversaire pour appeler « aussi bien les États que les groupes armés » au respect des conventions de Genève.

Ramine Abadie


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