Tunisie : Arrestations, harcèlement et violences physiques : black out total sur Taoufik Ben Brik et les défenseurs des droits de l’Homme.

vendredi 20 novembre 2009.
 

1) Libérez Taoufik Ben Brik et Zouhair Makhlouf

Tunisie : Poursuite du harcèlement à l’encontre de journalistes défenseurs indépendants

Ces journalistes se sont particulièrement mobilisés ces dernières semaines afin de dénoncer les pratiques et actes contraires aux normes internationales qui se sont multipliés dans le contexte électoral. M. Taoufik Ben Brik est par ailleurs membre fondateur du Conseil national pour les libertés en Tunisie (CNLT) et M. Zouhair Makhlouf est membre de l’association "Liberté et équité", membre dirigeant du Parti démocrate progressiste (PDP) et ancien candidat aux élections législatives du 25 octobre 2009. Mme Sihem Bensedrine est quant à elle porte-parole du CNLT, journaliste et secrétaire générale de l’Observatoire pour la liberté de presse, d’édition et de création (OLPEC).

Le 3 novembre, alors que M. Makhlouf devait comparaître devant le Tribunal de première instance de Grombalia, Mme Bensedrine s’est vu refuser l’accès à la salle d’audience, qui était entourée d’un important dispositif policier. Les autorités ont argué que le procureur avait émis une décision selon laquelle seuls les avocats étaient autorisés à pénétrer à l’intérieur du tribunal. Me Mohamed Abbou, qui accompagnait Mme Bensedrine, est immédiatement allé vérifier cet élément auprès du substitut du procureur, qui a réfuté l’existence d’une telle décision. Mme Bensedrine, restée en dehors de la salle d’audience, a alors été bousculée puis sérieusement frappée par des policiers. L’audience dans l’affaire Zouhair Makhlouf a été reportée à une date ultérieure.

Le 2 novembre 2009, Me Chouki Tebib, Ayachi Hammami et Nejib Chebbi, avocats de MM. Ben Brik et Makhlouf, s’étaient par ailleurs vus refuser l’accès à M. Ben Brik par le directeur et le sous-directeur de la prison de Mornaguia, près de Tunis, en dépit d’un bulletin de visite signé par le substitut du Procureur M. Mohamed Amira. M. Ben Brik doit comparaître le 19 novembre devant le Tribunal de première instance de Tunis pour "agression", dans une affaire manifestement montée de toutes pièces.

Le même jour, les trois avocats avaient toutefois pu rendre visite à M. Makhlouf, en grève de la faim depuis plusieurs jours, et pu constater un état de santé alarmant. Ils ont notamment été informés que leur client avait été victime d’un malaise vagal le 1er novembre, et n’avait eu accès à un médecin qu’en fin de journée. M. Maklouf est incarcéré depuis le 21 octobre.

L’Observatoire et le REMDH dénoncent les actes de violence à l’encontre de Mme Sihem Bensedrine ainsi que la poursuite de la détention arbitraire et du harcèlement judiciaire contre MM. Taoufik Ben Brik et Zouhair Makhlouf. Nos organisations appellent la Délégation de la Commission européenne à Tunis ainsi que les ambassades des Etats-membres de l’Union européenne (UE) en Tunisie à prendre publiquement position en faveur de ces trois défenseurs, à rendre visite à MM. Ben Brik et Makhlouf en détention, et à observer les audiences à leur encontre, conformément aux Lignes directrices de l’UE relatives aux défenseurs des droits de l’Homme.

Nos organisations appellent également la Délégation et les ambassades mentionnées ci-dessus à faire un rapport public, et si possible conjoint, sur les violations des règles relatives à un procès équitable et sur tout autre sujet de préoccupation constatés lors des audiences.

L’Observatoire et le REMDH appellent par ailleurs la Présidence de l’Union européenne et la Troïka à entreprendre toute action de protection à l’égard des défenseurs et militants des droits de l’Homme, sanctionnés pour avoir exercé défendu les libertés fondamentales.

L’Observatoire et le REMDH demandent par ailleurs aux autorités tunisiennes de :

· Garantir en toutes circonstances l’intégrité physique et psychologique de Mme Bensedrine et de MM. Taoufik Ben Brik et Zouhair Makhlouf, ainsi que de l’ensemble des défenseurs des droits de l’Homme tunisiens ;

· Procéder à la libération immédiate et inconditionnelle de MM. Taoufik Ben Brik et Zouhair Makhlouf, arbitrairement détenus ;

· Veiller à ce qu’un terme soit mis à toute forme de menaces et de harcèlement - y compris judiciaire - à l’encontre de Mme Bensedrine et MM. Taoufik Ben Brik et Zouhair Makhlouf, et de l’ensemble des défenseurs des droits de l’Homme tunisiens ;

Plus généralement, nos organisations appellent la Tunisie à se conformer aux dispositions de la Déclaration universelle des droits de l’Homme et aux instruments régionaux et internationaux relatifs aux droits de l’Homme et particulièrement l’article 1 de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme, adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies le 9 décembre 1998, “chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, de promouvoir la protection et la réalisation des droits de l’Homme et des libertés fondamentales aux niveaux national et international”.

2) Tunisie : Arrestations, harcèlement et violences physiques : black out total sur les défenseurs des droits de l’Homme

Selon les informations reçues, le 16 novembre, M. Abdelkrim Harouni et M. Hamza Hamza, respectivement secrétaire général et responsable des relations extérieures de l’association de défense des droits de l’Homme « Liberté et Equité », ont été interpelés par les autorités tunisiennes devant leurs domiciles vers 7h du matin. Rapidement, une délégation d’avocats s’est présentée successivement aux bureaux de la police des districts de Kram Ouest et Aryana où résident MM. Harouni et Hamza, sans pouvoir obtenir d’informations sur les raisons motivant ces arrestations ou sur le lieu de détention de ces deux personnes. Ce n’est que vers 19h que MM Hamza et Harouni ont finalement été relâchés, avec une convocation au bureau de police le lendemain pour un nouvel interrogatoire.

Vers midi le même jour, M. Omar Mestiri, directeur de la rédaction du journal en ligne Kalima, membre du Conseil National pour les Libertés en Tunisie (CNLT) et membre du groupe de travail du REMDH sur la liberté d’association a été agressé par une dizaine de policiers en civil, présents devant le cabinet de l’avocat Me Abdelraouf Ayadi, également membre du CNLT. M. Mestiri a été frappé et trainé sur plusieurs centaines de mètres puis poussé dans un fourgon par ses agresseurs qui l’ont violemment insulté et molesté, déchirant ses vêtements, lui portant une série de coups à la tête et dans le dos avant de lui confisquer son téléphone portable. Il a ensuite été conduit et abandonné dans un lieu totalement isolé à une quinzaine de kilomètres de Tunis.

Ces représailles font suite à la venue en Tunisie d’une délégation du REMDH qui comprenait des représentants d’organisations de la société civile européenne (France, Italie, Espagne, Royaume Uni, Danemark). La délégation a pu s’entretenir avec plusieurs organisations tunisiennes indépendantes de défense des droits de l’Homme dans des lieux privés - dans la mesure où le droit tunisien n’exige pas l’obtention d’une autorisation pour se réunir dans de tels lieux.

A la suite de ces réunions, l’ensemble des locaux associatifs des organisations de la société civile indépendante ainsi que les domiciles d’un grand nombre de défenseurs et de défenseuses des droits de l’Homme, y compris des personnes n’ayant pas été en contact avec la délégation du REMDH ont été soumis à une surveillance accrue et ostentatoire de la part de policiers en civil, qui empêchent désormais tout contact entre les défenseurs des droits de l’Homme.

L’Observatoire et le REMDH dénoncent l’arrestation et la détention arbitraires de MM. Hamza et Harouni, les actes de violence à l’encontre de M. Omar Mestiri et l’ensemble des mesures répressives à l’encontre des organisations indépendantes de la société civile tunisienne, en ce qu’ils visent uniquement à sanctionner le libre exercice de libertés fondamentales.

Nos organisations appellent la Délégation de la Commission européenne à Tunis ainsi que les ambassades des Etats-membres de l’Union européenne (UE) en Tunisie, et en particulier la future présidence espagnole de l’UE, à entreprendre immédiatement toute action de protection à l’égard des défenseurs et militants des droits de l’Homme, sanctionnés arbitrairement pour l’exercice pacifique de leurs libertés fondamentales. Les organisations signataires réitèrent leur appel aux organes décisionnels de l’UE pour qu’ils exigent que la Tunisie respecte ses engagements internationaux, et notamment l’article 2 de l’Accord d’Association qui fait du respect des droits de l’Homme une « condition essentielle » de la relation entre l’Union Européenne et la Tunisie.

L’Observatoire et le REMDH demandent par ailleurs aux autorités tunisiennes de :

· Faire connaitre sans délai le lieu de détention de M. Hamza Hamza et M. Harouni et de préciser les charges retenues à leur encontre, et à défaut, de procéder à leur libération immédiate et inconditionnelle ;

· Garantir en toutes circonstances leur intégrité physique et psychologique, ainsi que celle de l’ensemble des défenseurs des droits de l’Homme tunisiens ;

· Diligenter une enquête indépendante, impartiale et transparente sur les allégations de violences mentionnées ci-dessus, et en rendre les résultats publics, afin d’identifier les responsables, de les traduire devant un tribunal garantissant un procès équitable conformément aux principes de droit international

· Veiller à ce qu’un terme soit mis à toute forme de menaces et de harcèlement – y compris les mesures de surveillance illégales - à l’encontre de M. Omar Mestiri et de l’ensemble des défenseurs des droits de l’Homme tunisiens

Plus généralement, nos organisations appellent de nouveau la Tunisie à se conformer à l’esprit et à la lettre de la Déclaration universelle des droits de l’Homme ainsi qu’aux dispositions des instruments régionaux et internationaux relatifs aux droits de l’Homme, et en particulier, l’article 1er de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme, adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies le 9 décembre 1998, selon lequel “chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, de promouvoir la protection et la réalisation des droits de l’Homme et des libertés fondamentales aux niveaux national et international”.

Pour plus d’informations, merci de contacter :

· REMDH : Marc Degli : +45 32 64 17 00

· OMCT : Delphine Reculeau : + 41 22 809 49 39

· FIDH : Gaël Grilhot / Karine Appy : + 33 1 43 55 25 18


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