Julien Dray, le PS, la justice et les régionales (plus complément)

lundi 7 décembre 2009.
 

SOUVENIRS SANS NOSTALGIE

J’ai été trop longtemps militant en Essonne pour m’en désintéresser totalement à présent. Mais si je relève comment a procédé la commission exécutive fédérale du PS dans ce département, c’est parce qu’elle soulève une question de principe en général. Je commence par dire que je connais bien cette instance socialiste dans laquelle j’ai siégé vingt huit ans. Mon portrait est encore accroché dans le couloir qui conduit dans la salle de délibérations, avec ceux de tous les autres premiers secrétaires fédéraux qui ont dirigé cette fédération depuis 1971. Je connais aussi presque tous ceux qui y siègent aujourd’hui. Aujourd’hui l’homme fort du département est Manuel Valls qui tient les commandes essentielles. Le président du conseil général est son vassal et le premier secrétaire son employé. Rien ne se fait sans son avis. Je connais. J’ai tenu le rôle. C’est donc lui l’auteur de l’élimination de Dray avec l’appui enthousiaste de tous ceux qui tueraient père et mère pour qu’une place se libère et permette à la file d’attente des petits vassaux d’avancer d’un cran vers la lumière de l’élection automatique. Tout cela en ayant un œil sur les futures élections territoriales à la sauce Sarkozy. En effet leur savoureuse liste annexe de candidat à élire à la proportionnelle permettront aux bien placés d’aujourd’hui de se maintenir en fonction demain. Dès lors il faut lire ce que dit Manuel Valls et les larmes qu’il jette sur le sort de Dray comme un record d’hypocrisie. Tel est aujourd’hui le PS. Ce n’est certes pas mon affaire et je n’oublie rien des coups que Dray m’a porté dans ce département du temps où je m’échinais moi aussi dans ce monde kafkaïen. Mais une fois de plus c’est de notre rapport à la justice, nous gens de gauche, dont il est question. Je note la performance lamentable de ces champions de la morale en face de Julien Dray.

COUPABLE C’EST SÛR ! INNOCENT PEUT-ETRE

Je n’en suis pas surpris. Valls est de ceux qui ont jeté des pierres contre le lamentable Frédéric Mitterrand alors même qu’il n’était ni inculpé ni poursuivi, fusse par lui. Il a perdu tous repères républicains fermes. On se souvient, j’espère, comment Manuel Valls avait cru bon d’ajouter dans cette circonstance qu’un problème générationnel le séparait de ses ainés sur la question du rapport à la loi et à la règle à propos de la pédophilie. C’était une infamie qui suffisait à évaluer sa capacité à respecter ses contradicteurs. Sur ces bases ces malheureux socialistes mélangent justice et vengeance, inculpation et pilori, rumeurs et faits. Et cette fois ci l’absurdité de ces méthodes éclate sous les yeux de tous. Julien Dray n’est pas inculpé. Mais aux yeux des socialistes de l’Essonne il est présumé coupable avant toute inculpation. La preuve : ils affirment que si Dray n’est pas inculpé alors ils le rétabliront sur leur liste ! Ils le déclarent donc coupables et c’est à la justice de le proclamer innocent ! C’est exactement le contraire de ce que proclame la déclaration des droits de l’homme lorsqu’elle affirme que chacun est présumé innocent aussi longtemps qu’il n’est pas jugé coupable !

LA RUMEUR COMMANDE

Cette modeste affaire de tête de liste situe bien le point où les voici rendus en matière de principe républicain. La vérité est que Dray leur pose problème en fonction des informations qui ont été diffusée à son sujet. Et cela non du fait du contenu vrai ou non de la rumeur mais en raison de l’impact que cela a pu avoir sur l’opinion. La rumeur est tout pour eux, qu’elle soit fondée ou calomniatrice. La question de savoir si ces informations sont fondées ne se pose pas pour eux. C’est pourtant essentiel sur le plan des principes, surtout quand on sait que Dray dément le tout. Sa négation semble aussi inouïe que les accusations diffusées. S’il a raison, alors ce qui lui a été fait est monstrueux. Et ceux qui viennent de l’éliminer y auront eu leur part. S’il ment, on le saura assez tôt. Mais pas avant son éventuelle inculpation, et de toute façon pas avant la fin de son éventuel procès. J’ai bien dit « éventuel ». Ces gens si pusillanimes doivent savoir que la justice et ses procédures sont une protection de notre liberté individuelle et collective et non une corvée formelle. Qu’aucun des élus, députés et autres, membre de l’instance socialiste essonnienne n’y ai pensé est incroyable ! Le résultat souligne bien dorénavant le grotesque de la situation. En effet, Julien Dray n’est même pas inculpé ! Mais il est quand même éliminé de la liste. Pourtant, à l’inverse, la tête de liste régionale et le président du groupe socialiste à la région ont été inculpés, jugés et condamnés. Mais ils sont maintenus en tête des listes sans avoir été suspendus un seul jour de leur fonction en cours de route ! Il est vrai qu’ils ont désormais purgé leur peine. Mais ils n’ont pas encore été amnistiés. Donc les socialistes « moraux » qui éliminent Dray, les investissent en connaissance de cause. Mais du moment que la presse n’en parle plus, où est le problème ?.

CRIMES DE GUERRE

Ca se passe dans l’Irak occupé par les américains. Tout le monde sait quel bonheur goute ce pays depuis qu’il a été libéré de l’odieuse dictature qui l’accablait. Evidemment c’est de l’humour noir. L’occupation anglo saxonne du pays après l’agression militaire organisée par le fils Bush n’en finit plus de produire ses horreurs. Le bilan de la prétendue libération de l’Irak est celui du martyr de ce pays. Dans maints cas on peut parler de crime de guerre. Actuel ou passé, ou bien en cours. Ainsi à Fallujah, ville martyrisée par des bombardements américains sans véritable objet. En septembre dernier, sur 170 enfants nés au principal hôpital de Fallujah, 24% sont morts la première semaine, ¾ présentaient des difformités (pas de tête, deux têtes, un seul œil, pas de membres). En 2002, dans le même hôpital, sur 530 naissances, 6 bébés étaient morts, un seul présentait des difformités. Des médecins irakiens et britanniques mettent cause l’utilisation de phosphore blanc et de munitions à l’uranium appauvri utilisées lors des bombardements de la ville en 2004 par l’armée d’occupation. Ils demandent aux Nations unies d’ouvrir une enquête indépendante. Une pétition a été lancée pour soutenir cette initiative.

POST SCRIPTUM

Comme je m’y attendais mes paragraphes à propos de Julien Dray sur ce blog ont suscité un certain nombre de commentaires non seulement ici même, mais aussi par ci par là, ailleurs. Je ne les commente pas à mon tour. Je veux dire deux choses cependant. L’une à propos de Julien Dray, l’autre à propos de la direction socialiste de l’Essonne.

* En ce qui concerne Dray, je suis frappé de constater que les reproches qui me sont adressés à son sujet illustrent avec précision ce que je condamne. En effet on me reproche mon attitude parce qu’elle serait une défense des actes attribués à Julien Dray. « Vous osez défendre Dray alors que … ». Je ne défends pas Julien Dray. Je défends son droit à la présomption d’innocence. Si j’en crois mes contradicteurs, celle-ci ne s’applique qu’à la condition que la personne soit… innocente, et qui plus est, innocente à leurs yeux, selon leur propre critère de valeur ! Par exemple, Dray dépense trop pour être défendu ! Et quoi encore ? Je clos ce point en évoquant pour faire comparaison une discussion récurrente du même type à propos de l’avortement. J’ai entendu des milliers de fois nos adversaires nous dire : « vous qui êtes pour l’avortement, … » Erreur. Nous ne sommes pas pour l’avortement. Personne n’est pour l’avortement. Pas même les femmes qui avortent. Nous sommes partisans du droit à l’avortement. Ce n’est pas du tout la même chose. J’affirme donc que Dray est innocent, totalement innocent, aussi longtemps qu’il n’est pas reconnu coupable.

* L’autre chose est que l’équipe de « Arrêt sur image » a été assez aimable pour me lire et retenir mon papier, ce dont je suis plutôt fier et même faraud. Elle s’est arrêtée sur ce que j’ai dit concernant Manuel Valls et son rôle dans cette histoire. Je me suis aperçu que j’avais oublié de mentionner ce fait que le premier secrétaire fédéral, suppléant et obligé de Valls est dorénavant la tête de liste à la place de Julien Dray. Ca doit limiter les douleurs de Valls. Les spécialistes en essonneries noteront un point de plus. C’est dans ce département qu’est élu député, maire et président d’agglomération, François Lamy bras droit de Martine Aubry et à maints égards quasi Premier Secrétaire du PS, nonobstant sa prudente obligation de modestie. Cet homme d’influence dispose dans la Commission fédérale qui a éjecté Dray de son propre quota de partisans. Qu’a–t-il fait au moment du vote ? Je mentionne tout cela en défense et illustration de ce que j’ai dit au sujet des larmes versées ensuite par tous ces grands chefs : hypocrisie. Julien Dray a été éjecté de la liste avec l’aval des plus hautes instances du PS national et local. Ce n’est pas mon affaire, cela va de soi. Mais je veille à ce que dit Manuel Valls, pour la raison qu’il a osé affirmer, dans le fil de l’affaire Frédéric Mitterrand, à propos de ce qu’il considérait comme une affaire de mœurs grave, qu’il y avait une différence « générationnelle » d’approche « de la loi et de la règle », infamie que personne n’a voulu relever et que je considère comme une injure gratuite proférée dans le même but d’auto glorification vertueuse que cette affaire concernant Dray.


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