5 octobre 1946 : Adoption du statut de la fonction publique qu’il nous faut défendre aujourd’hui

jeudi 7 octobre 2021.
 

Fonction publique : au-delà des fantasmes, la vérité des chiffres et la réalité du terrain

Un statut pour le compte de l’intérêt général

Conçu par le ministre communiste Maurice Thorez, en 1946, le statut du fonctionnaire date de la Libération. Mais, d’une part le principe d’une protection des agents de l’administration publique est bien plus ancien que cela en France. Il n’a, d’autre part, rien de rigide et depuis 1946 le statut a été modifié, bien plus souvent même que le Code du travail. Par exemple, en 1983, quand Anicet Le Pors, alors ministre de la Fonction publique, l’a étendu aux salariés de l’hôpital et des collectivités territoriales. Mais que les évolutions viennent d’un gouvernement de gauche ou de droite, le législateur ne s’est jamais attaqué de front à ses principes fondamentaux. Jusque-là au moins… Parce qu’avec le statut, il s’agit de s’assurer qu’un agent, dans l’exercice de ses missions pour le compte de l’intérêt général, est dans une position de neutralité et d’impartialité quelle que soit la politique de ses employeurs. Il s’agit aussi d’offrir à tous les citoyens l’égalité d’accès au service public. Un salaire, une carrière et une retraite garantis, le fonctionnaire sera plus à l’abri des pressions financières et partisanes et n’obéira qu’à l’intérêt général. Pour obtenir un permis de construire, un papier d’état civil, une inscription à l’école ou un soin à l’hôpital, nul besoin en France de « graisser la patte » à l’employé de l’administration, comme dans les pays où ces garanties ne leur sont pas assurées. Le but n’est donc pas d’abord la protection du fonctionnaire, c’est la garantie d’un service public tel qu’il est conçu en France, c’est-à-dire assurant l’égalité de son accès à tous et garantissant l’intérêt général. Pour le fonctionnaire, le statut est vécu comme un équilibre entre des droits et des devoirs. Les droits sont ceux d’avoir un déroulement de carrière assuré jusqu’à la retraite et une pension civile de l’État, la garantie de l’emploi. Ses devoirs sont ceux de servir l’intérêt général, 24 heures sur 24 et 365 jours par an si cela lui est demandé, l’obligation d’accomplir ses missions pour tous les citoyens, d’obéir à sa hiérarchie non par crainte d’une sanction mais par adhésion à sa mission de service public.

Le secteur marchand en embuscade

Ce coup de force contre le statut intervient dans le contexte d’une attaque contre les services publics dont témoigne la privatisation de La Poste. Cette attaque met en œuvre simultanément un double mouvement. Le premier est la réduction de la fonction publique avec l’objectif de transférer les missions au secteur marchand. Avec la révision générale des politiques publiques, on supprime 20 % des effectifs, mettant les services publics dans l’incapacité de répondre aux missions. Et devant la faillite, on privatise. Le second mouvement met la fonction publique non plus au service de l’intérêt général, mais au service des intérêts partisans et particuliers. Ils se heurtent cependant à un obstacle  : les 5 millions de fonctionnaires ont le souci de l’intérêt général et, selon un sondage BVA-La Tribune, 57% des Français sont opposés à la politique menée par Nicolas Sarkozy à l’égard des fonctionnaires. Faire sauter le verrou du statut est devenu un impératif pour les partisans de la privatisation. Il ne s’agit donc pas de défendre un intérêt corporatiste. Les salariés du public et du privé non seulement n’ont rien à gagner d’une attaque contre le statut des fonctionnaires, mais ils ont beaucoup à perdre. D’autant qu’il ne s’agit pas de défendre un quelconque privilège. Ainsi, pour les retraites, le dernier rapport du Conseil d’orientation des retraites montre que la retraite moyenne d’un salarié non cadre du privé s’élève à 83,6 % de la moyenne de ses revenus salariés, tandis qu’elle n’est que de 68,7 % pour un fonctionnaire.

Olivier Mayer


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