Notre campagne, leurs dérives (par Christian Picquet, tête de liste Midi Pyrénées)

vendredi 12 mars 2010.
 

On me demande souvent, dans ma campagne de Midi-Pyrénées, quels sont les atouts du Front de gauche. Ils tiennent, de mon point de vue, en une triple dimension.

* Un, la solidité des idées et propositions que nous mettons dans le débat public.

* Deux, la qualité de celles et ceux qui mènent la campagne, colistiers et militants, lesquels portent tous une expérience de terrain et se font au quotidien l’écho de ces hommes et femmes qui souffrent, espèrent et luttent.

* Trois, le rassemblement, dont seul le Front de gauche peut se targuer, des traditions ayant structuré la gauche et le mouvement ouvrier tout au long de leur histoire : la culture communiste, celle du socialisme républicain, celle du combat anticapitaliste dont je suis issu avec mes camarades de Gauche unitaire… Dit autrement, nous redonnons ses lettres de noblesse à la politique…

Ce dimanche, un journaliste de 20 minutes Toulouse m’interrogeait sur le fait qu’à la différence des trois autres principales têtes de liste, je n’avais pour ma part pas cru bon d’avoir recours à ces nouvelles instruments que sont, par exemple, Facebook ou Twitter. Ma réponse fut simple : la politique, à mes yeux du moins, et quitte à paraître ringard à mes contradicteurs, est d’abord affaire de projets, non de « communication », de mise en scène de sa personnalité lorsque l’on est un responsable politique, de résignation aux dérives de la peopolisation… Et, à la question selon laquelle mes « concurrents » expliquaient que c’était pour eux le moyen de « toucher » un public jeune, je rétorquai que la jeunesse méritait d’être respectée, autant que ses aînés, qu’elle était elle aussi en attente d’arguments, de visions d’ensemble susceptibles de lui redonner confiance en la chose publique.

L’autre façon de mener campagne

Précisément, je sors d’une semaine où il m’aura été donné de sillonner Midi-Pyrénées et de m’y entretenir avec ceux qui y vivent et y luttent. Mercredi 24, je me serai de nouveau retrouvé aux côtés des Molex, à l’occasion d’un rassemblement qui les réunissait à Toulouse, avant de me rendre à Gourdon (dans le Lot) pour y tenir meeting. Le lendemain, journée tarnaise, avec présence sur le marché d’Auch le matin, rencontre avec les élus communistes et républicains puis avec les retraités agricoles à Jéguin à midi, réunion avec les syndicalistes de divers secteurs de la santé de nouveau à Auch en fin d’après-midi, avant de terminer ma journée par une réunion publique à Muret (Haute-Garonne). Le 26, retour à une journée passionnante dans le Lot : pour une réunion, d’abord, à Cahors, avec les représentants départementaux de la CGT, de la FSU et de Force ouvrière ; pour une entrevue ensuite avec des acteurs du monde de la culture et une réflexion (trop brève mais formidablement intéressante) autour d’un projet d’appel du Front de gauche sur cette question essentielle aux yeux des tenants de l’émancipation que nous sommes ; pour une visite, par la suite, d’une exploitation agricole de Belfort-du-Quercy, à l’occasion de laquelle il m’aura été donné de vérifier à quel point l’agriculture paysanne s’avérait victime - tout autant que les salariés - des logiques financières qui dévastent nos conditions d’existence ; pour une discussion enfin avec des responsables syndicaux de la Mecanic Vallée et de l’entreprise Ratier, à Capdenac-Gare à la « frontière » du Lot et de l’Aveyron. La soirée s’acheva à Decazeville, avec un sympathique meeting qui m’aura permis de retrouver Guilhem Serieys et Martine Perez, respectivement numéros un et deux de notre liste sur le département de l’Aveyron.

Rencontre avec des agriculteurs à Belfort-de-Quercy le 26/02/10

Ainsi que je le répète pratiquement chaque soir, j’ai un authentique plaisir à conduire une telle campagne sur cette terre de rébellion et d’espérance. Quel contraste, en effet, avec ce que les médias nous donnent à voir autour de nous. Les manœuvres de caniveau auxquelles se livre l’UMP pour sauver de la débâcle sa chef de file en Île-de-France, en stigmatisant la tête de liste socialiste sur le Val-d’Oise, comme par hasard issue de l’immigration... L’incapacité d’un très grand nombre des barons socialistes (à l’instar des maires de Dijon et de Lyon) de renoncer à leur soutien traditionnel à cette honte de leur parti en Languedoc-Roussillon, Georges Frèche pour être précis, démagogue populiste qui va, de meeting en meeting, jusqu’à clamer (c’est Libération qui le rappelle, ce 27 février) : « Les cons sont cons et en plus, ils sont bien dans leur connerie. Pourquoi les changer ? (…) Mais les cons sont sympathiques, moi je suis bien avec les cons (…). Je suis bien avec les cons parce que je les aime ! »… L’opiniâtreté d’un François Hollande, candidat à l’investiture du PS pour 2012, à battre les estrades en faveur de l’allongement de l’âge du départ à la retraite… La promptitude avec laquelle Martine Aubry en profite pour, d’un même mouvement, se revendiquer de la position officielle de son bureau national en faveur du maintien à 60 ans de l’âge légal de la cessation d’activité, et expliquer que cela ne devait pas empêcher la majorité des salariés de travailler jusqu’à 62 ou 63 ans… Les préconisations du Fonds monétaire international, sous l’égide d’un autre prétendant socialiste possible à la magistrature suprême, Dominique Strauss-Kahn pour ne pas le nommer, visant à éponger totalement la dette publique des pays européens d’ici 2020, au prix de la suppression des mesures de soutien à l’économie, de la réduction des dépenses publiques et des hausses d’impôts, d’une stabilisation des dépenses de santé et de retraite…

Le véritable enjeu du premier tour

Il ne manquait au concert qu’Europe écologie. Depuis quelques jours, ses dirigeants ont rejoint l’escouade des formations traditionnelles et ils résument l’objectif de leur campagne de premier tour… à la négociation, pour le second tour, des meilleures conditions de la fusion de leurs listes avec celles du PS. Et de brandir implicitement la menace de leur maintien, au soir du 14 mars, s’ils franchisent la barre des 10% et si les présidents sortants de Régions ne les traitaient pas avec la considération qu’ils estiment mériter. Cécile Duflot vient d’apporter sa caution à cette « stratégie », dimanche soir, sur le plateau du journal de France 2. Parlons franchement. Il ne serait pas acceptable que les têtes de liste socialistes, si elles arrivaient en tête au soir du premier tour, se croient autorisées à retourner à un comportement hégémonique. Doit-on, pour autant, signifier aux électeurs que la présentation de listes concurrentes n’a d’autre objet que la négociation des rapports de force entre celles-ci, indépendamment des nécessités de clarification entre les options politiques en présence à gauche ?

Le Front de gauche ne saurait entrer dans une démarche aussi délétère. Il m’a donc fallu, le 26 février, dans la région où je mène campagne, répondre aux interrogations dont les militantes et militants du Front de gauche s’avéraient l’objet, en publiant le communiqué suivant au nom de toutes les composantes de ma liste : « Certains commentateurs évoquent, pour le second tour des élections régionales, l’éventualité d’un accord particulier entre Europe écologie et le Front de gauche, qui aboutirait à une "triangulaire" dans notre Région. Ceci ne correspond pas à la réalité. Je tiens à répéter la position qui a toujours été la mienne et celle des organisations du Front de gauche, le PCF, le PG et la GU : au second tour de ces régionales, le rassemblement de toute la gauche, sans exclusive, sera de rigueur, sur la base des résultats du premier tour, afin de barrer la route de la Région à la droite et à sa représentante, Madame Barèges. L’enjeu n’est pas aujourd’hui de se livrer à des supputations et à des calculs tacticiens. Il est, pour la liste que je conduis, de faire grandir, au cœur de la gauche, une force qui ait la capacité d’orienter vraiment à gauche la politique de notre Région. Une politique qui, face aux désastres engendrés par le capitalisme et les politiques de la droite au pouvoir, devra conjuguer réellement l’exigence sociale avec l’exigence écologique. Au premier tour nous avons constitué une liste de rassemblement à gauche et au deuxième tour pour nous les choses sont claires toute la gauche doit se rassembler dans le respect des résultats obtenus et des propositions de politique régionale. Ce sera le sens du vote Front de gauche le 14 mars. »

Comment, lorsque le débat s’enlise à ce point, sortir la campagne des régionales de la molle indifférence qu’affecte une majorité des électeurs ? Une indifférence qui n’est que de façade, je peux en juger au regard de la révolte ou de la colère qui s’exprime sur les marchés ou à la porte des entreprises, de la conscience que manifestent désormais sans réserves mes interlocuteurs syndicaux qu’il y a urgence à offrir un débouché politique aux mobilisations sociales, de l’intérêt qu’affichent un nombre croissant de militants et élus d’autres composantes de la gauche.

Pas de doute, le vote Front de gauche sera, ce 14 mars, le seul à pouvoir convaincre des milliers d’hommes et de femmes de revenir aux urnes, de reprendre espoir en la gauche, de donner un prolongement à leur sourde colère …


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