Déclaration du Secrétariat National du PG suite aux élections régionales

mardi 30 mars 2010.
 

Le résultat des régionales vient d’effacer politiquement la victoire de Sarkozy en 2007.

Trois ans après son large succès à la présidentielle, la droite enregistre une déroute électorale (35% des voix) qui est sans précédent depuis 1958. Elle est décimée. D’abord par l’abstention qui fait un retour en force puisqu’elle n’avait jamais été aussi élevée lors d’une élection régionale. Ensuite par le glissement d’une partie de son électorat qui retourne à l’extrême droite. Le Front national, qui a profité du débat sur l’identité nationale et plus largement des déclarations répétées de dirigeants de l’UMP flirtant avec le racisme et la xénophobie, dépasse 11% des voix au premier tour, et 17% au second là où il a pu se maintenir. Dorénavant, la droite des beaux quartiers contribue aussi à cette poussée. Symbole de cette déroute, la droite est battue par la gauche dans son fief des Hauts-de-Seine pour la première fois depuis la création de ce département. Et l’UMP est devancée par le FN dans le Pas-de-Calais.

Bien sûr la contestation du pouvoir ne s’est pas uniquement exprimée par l’abstention et le vote FN. Elle s’est aussi traduite par un vote massif pour la gauche qui a dépassé les 54 % le 21 mars, un score qu’elle n’avait jamais atteint sous la Cinquième République sauf au second tour de la présidentielle de 1988. C’est aussi un succès pour la stratégie du Front de Gauche. Nous avons toujours dit qu’en rassemblant dans la clarté l’autre gauche de manière autonome au premier tour, on élargissait le périmètre du rassemblement au second tour dès lors que la volonté de cet électorat est respectée et non manipulée.

En revanche, on a pu vérifier que le pays ne cherche pas d’issue au centre : le Modem s’effondre littéralement à 4,2%. C’est une très grande satisfaction pour nous de voir les sirènes de l’alliance démocrate si brutalement écartées. Cette disparition tient lieu de vertu aux écologistes et aux socialistes qui se sont aussitôt rabattus sur l’alliance à gauche, comme nous l’avions voulu.

Enfin on ne peut se cacher que le NPA est également en net recul. Cela ne signifie pas que la radicalité qu’il a incarnée se soit effacée. Au contraire. Elle a voulu se rendre efficace. Les électeurs de l’autre gauche ont clairement fait le choix de l’unité et appuyé notre ambition de changer la gauche pour gouverner le pays sur de nouvelles bases. On peut dorénavant espérer que nos camarades du NPA entendent ce message de masse et fassent dorénavant le choix de l’unité.

Bien sûr institutionnellement, tout pourrait continuer comme avant car l’élection concernait uniquement les assemblées régionales. Mais politiquement, c’est une autre affaire. Le pouvoir a perdu l’assise qui lui a permis jusqu’ici d’appliquer ses orientations sans relâche. L’échec personnel de Sarkozy fait que la clé de voûte de la droite et des institutions vermoulues de la Cinquième République est à terre. L’édifice est déjà en train de se défaire. On le voit par exemple avec la cacophonie sur la taxe carbone. Cela rappelle la vieille formule « en bas on ne veut plus, en haut on ne peut plus ». D’autant qu’en donnant à voir ce décalage, l’élection en est aussi un terrible accélérateur. Le pays est entré en état d’urgence politique.

Ce résultat remet donc en question la légitimité du pouvoir. Comment Sarkozy répond-il à cette situation ? Pour l’heure il envoie un double signal. D’abord son remaniement vise à empêcher toute alternative au sein de la droite en bâillonnant par la solidarité gouvernementale les composantes de la droite qui pourraient être tentées par l’autonomie. Mais cela ne règle rien. Au contraire, s’il parvenait ainsi à empêcher toute expression d’un désaccord à droite, hors du vote FN, il rendrait le système politique plus bloqué que jamais. Ce serait un nouveau facteur de crise.

Deuxièmement, Sarkozy a décidé de maintenir sa réforme des retraites. Il veut exploiter la position accommodante du PS sur le sujet et tenter d’effacer sa défaite électorale par une victoire sociale. Les formes et l’issue de la crise dépendront donc des résultats de la lutte sociale et politique que nous mènerons ces prochains mois sur la question des retraites. Pour l’heure, nous avons heureusement l’avantage. Mais il ne faut surtout pas déduire de ces régionales qu’un chemin assuré et paisible s’est ouvert sous les pas de la gauche.

Troisièmement, malgré l’urgence des défis écologiques tels que la lutte contre le changement climatique et la sauvegarde de la biodiversité, Sarkozy claironne « l’environnement ça commence à bien faire ! », vértiable blanc-seing pour encourager les programmes autoroutiers, de construction d’aéroports, de développement de la filière nucléaire et de la filière OGM en agriculture.

La gauche doit maintenant se préparer avec méthode et détermination à la confrontation voulue par Sarkozy sur la question des retraites. Elle doit aussi penser l’alternative en 2012 à la lumière de l’expérience grecque, où les pressions des banques et le carcan des traités européens sont parvenus à priver le peuple de la politique pour laquelle il avait voté. C’est une gauche de combat que le cycle politique qui commence met à l’ordre du jour.

Dans ce cadre, le Front de Gauche a une responsabilité décisive. Cette élection nous a installés politiquement malgré un verrouillage médiatique qui en dit long sur l’état de notre démocratie et le niveau d’asservissement de nombre de médias et grâce à la remarquable campagne de terrain menée par nos militants. Non seulement au premier tour avec la présence de nos listes dans 17 régions et les 7% que nous y avons obtenus. Mais aussi au second tour avec les 19% de la liste Front de Gauche-NPA en Limousin. C’est tout juste si ce résultat a été signalé lors des soirées électorales dimanche dernier. Il est pourtant extraordinairement révélateur des potentialités d’un Front de Gauche élargi. Nos camarades, conduits par Christian Audouin, gagnent plus de 50% de voix entre les deux tours !

Le PS était convaincu de nous faire reculer dans ce bras de fer qu’il a voulu localement comme nationalement pour relativiser le poids du Front de Gauche et jeter un interdit sur toute alliance avec le NPA (quand bien même dans le Limousin il se soit agi de NPA unitaires). Nous avons fait à l’inverse la démonstration que le Front de gauche a des réserves électorales considérables. La preuve est faite que la cohérence du vote Front de gauche se renforce dans l’épreuve de la clarification politique. Nous pensons que cela est de nature à faire avancer l’adhésion au Front de Gauche d’un nombre croissant de consciences de gauche. Et aussi de militants et dirigeants politiques. En particulier cela devrait définitivement convaincre les cinq régions et les départements dans lesquels les dirigeants communistes avaient le choix de l’alliance au premier tour avec les socialistes. Selon nous, cette confusion qui nous a couté cher ne se reproduira plus à l’avenir et nous félicitons les responsables nationaux et fédéraux du parti communiste qui ont fait avec nous le choix de l’autonomie quand bien même cette décision les a conduits à obtenir moins de sièges d’élus que par faveur socialiste. Nous avançons vers notre but. Un nombre croissant ne nous voit plus comme une nuance de premier tour ! Ils nous voient comme nous voulons être : une alternative pour diriger. Voilà ce qu’il nous faut conforter dorénavant.

Cela implique que le Front de Gauche trouve un nouveau souffle. Il doit se remettre en question positivement. Il n’y aurait pas de sens à vouloir seulement faire fructifier notre petit pactole électoral. Nous avons d’autres responsabilités dès lors que nous estimons que le PS et Europe Ecologie ne sont pas à la hauteur de l’état d’urgence sociale et écologique du pays. Le Front de Gauche doit se hisser à une nouvelle hauteur afin de devenir un recours pour le pays. Son objectif doit être un gouvernement d’unité populaire. Populaire par sa base et son programme, d’unité parce qu’il aura pour boussole l’intérêt général populaire. Dès lors, en accord avec ce projet, le Front doit s’enraciner par la base dans tous les secteurs de la société, sur tous les grands thèmes qui seront à l’ordre du jour de l’action d’un véritable gouvernement de gauche. Le Front de Gauche doit notamment incarner le projet d’écologie sociale dont notre société et la planète ont besoin. Il s’agit d’engager la planification écologique pour reconvertir nos modes de production et de consommation dans le respect de l’intérêt général, en rupture avec le système capitaliste, ce qui est incompatible avec le projet « écolo-centriste » ouvert à des personnalités de droite, que porte aujourd’hui Europe-Ecologie et que confirme les déclarations du 22 mars de Daniel Cohn-Bendit.

Cette conquête du pouvoir se prépare aussi par des candidatures communes au "paquet" des prochaines élections. Toutes : cantonales, sénatoriales, présidentielle, législatives, chacune épaulant la préparation de la suivante en élevant le niveau de conscience populaire. Notre méthode doit être de construire autour de plateformes partagées qui en viendront à constituer une alternative globale, un programme pour le gouvernement du Front de Gauche que nous proposons pour la France.

Dans les prochains jours, le Parti de Gauche demandera à rencontrer ses partenaires du Front de Gauche et toutes les forces de l’autre gauche. Mais aussi, d’une autre façon évidemment, le PS, Europe Ecologie. En effet, il y a de nouveau 21 régions métropolitaines sur 22 gérées par la gauche. Qu’allons nous faire de notre victoire électorale ? On doit éviter l’écueil de l’émiettement qui a prévalu dans la précédente mandature. Cela doit se traduire par des actions communes des régions construisant des rapports de force inédits avec le pouvoir. Au plan national, nous voulons savoir comment chacun compte engager la bataille des retraites. Nous souhaitons également discuter des enseignements de la crise grecque afin d’ouvrir le débat sur la manière dont la gauche, si elle gouvernait notre pays, ferait face à la guerre financière que mènent les banques contre les peuples avec le soutien du FMI.

Nous proposons que le Front de Gauche s’élargisse sans tarder. D’une part à toutes les forces de l’autre gauche qui le souhaitent et notamment à celles avec lesquelles nous venons de faire campagne. Ensuite en nous enracinant le plus largement possible. Nous proposons d’offrir la possibilité d’adhérer au Front de Gauche sans être obligés de rejoindre les partis qui le constituent. Ce mouvement d’adhésion pourra notamment nourrir les campagnes que lancera le Front de Gauche sur la défense des retraites. Enfin, nous proposons de constituer comme parties prenantes du Front de Gauche des rassemblements par professions et thèmes. Notre objectif doit être ainsi d’organiser la mobilisation et la prise de conscience pour aujourd’hui. Mais aussi de préparer l’implication populaire qui devra être demain la caractéristique d’un gouvernement d’unité populaire.


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