Haïti. L’endettement, la nouvelle servitude

samedi 27 mars 2010.
 

L’annulation de la dette due par Haïti aux pays riches et aux institutions financières
 est la condition indispensable à la reconstruction du pays.

Haïti dévasté doit maintenant se reconstruire. Son énorme handicap, l’extrême pauvreté, ne date pas d’aujourd’hui. Elle est née dès les premiers instants de l’indépendance du pays, quand les anciens esclaves qui s’étaient libérés du joug de la France allaient tomber dans une nouvelle forme de servitude  : l’endettement. Haïti a été saignée en 1825 par la France, qui pour prix de la liberté de l’île et des réparations dues aux colons, a exigé un tribut de 150 millions de francs-or. On se souvient qu’en 2003, avant qu’il ne soit chassé du pouvoir, le président Aristide avait demandé à la France la restitution de cette somme d’une valeur de 21 milliards de dollars.

La pression exercée par les pays riches et les institutions financières internationales n’a été qu’un perpétuel recommencement. Les politiques d’ajustement structurel imposées par le FMI et la Banque mondiale dans les années 1990 ont, par exemple, forcé Haïti, à sacrifier sa production de riz (abaissement des droits de douane entraînant l’afflux de riz américain), tandis que des aides massives sous forme d’assistance étrangère ont accru la dépendance du pays. En 2008, Haïti a consacré plus de 50 millions de dollars pour le service de sa dette, nettement plus que l’aide étrangère destinée à l’éducation, la santé et les projets sociaux.

Cette dette injuste était estimée à 1,2 milliard de dollars en 2009. Son « annulation totale, immédiatement et sans condition » est demandée par plusieurs organisations humanitaires et syndicats réunis dans la plate-forme Dette et développement. En juin 2009, la même réclamation avait été adressée aux créanciers d’Haïti, qui avaient promis de faire un geste. En France, Christine Lagarde, ministre de l’Économie, a annoncé l’annulation de 58 millions d’euros de dette, et demandé au Club de Paris, groupe informel des principaux pays créanciers, d’en faire autant. Depuis, RAS.

La Banque mondiale a suspendu (cinq ans) un remboursement de 38 millions de dollars, et le FMI a décidé d’octroyer une « aide » de 114 millions de dollars sous forme d’un prêt, sans intérêts, mais remboursable après un délai de cinq ans et demi. La Banque interaméricaine de développement (BID) et les institutions financières internationales détiennent à elles seules plus de 80 % de la créance haïtienne. Une façon de conserver les rênes du pays, qui risque de payer chèrement son avenir si la dette n’est pas effacée.

Bernard Duraud


Signatures: 0
Répondre à cet article

Forum

Date Nom Message