Ouverture d’un vaste front citoyen pour la retraite

samedi 10 avril 2010.
Source : L’Humanité
 

À l’initiative d’Attac et de la fondation Copernic, près de 400 personnalités, dirigeants des partis de toute la gauche, intellectuels, syndicalistes, lancent un appel à la mobilisation « contre la paupérisation programmée des futurs retraités ».

« L a question des retraites pose celle de la société dans laquelle nous voulons vivre. Nous ne pouvons accepter la paupérisation programmée des futurs retraité(e)s, l’idéologie absurde du ’’ travailler toujours plus ’’ et la destruction des solidarités sociales. Nous souhaitons contribuer à une vaste mobilisation citoyenne pour stopper cet engrenage. » Alors que les syndicats viennent d’engager leur propre processus de mobilisation, et préparent, notamment, un1er Mai de grande envergure, c’est en quelque sorte un nouveau front qui s’est esquissé hier, pour contrer le projet sarkozyste de réforme des retraites. À l’initiative de l’association Attac et de la fondation Copernic, près de quatre cents personnalités lancent un appel à « faire entendre les exigences citoyennes sur les retraites » (lire p. 22).

La quasi-totalité de l’arc des forces de gauche y est représentée : PCF (Marie-George Buffet et Pierre Laurent), PS (Razzy Hammadi, Gérard Filoche), NPA (Olivier Besancenot), Parti de gauche (Jean-Luc Mélenchon), Verts (Cécile Duflot)... De nombreux intellectuels, économistes (tels Dominique Plihon, Henri Sterdyniak, André Orléan, Frédéric Lordon, Catherine Mills), sociologues (Luc Boltanski, Patrick Champagne, Loïc Wacquant, Robert Castel), philosophes, figurent également sur la liste. Si les premiers dirigeants des principales confédérations n’ont pas signé le texte, des syndicalistes de la FSU, de Solidaires, de la CGT, côtoient les animateurs d’associations. Pour les initiateurs, « une dynamique se met en place ». Sur ce texte, désormais ouvert à « tout citoyen » (1), « on espère des millions de signatures », affirme Willy Pelletier, de la fondation Copernic. « On va sillonner la France, comme pour le Traité constitutionnel européen (TCE, en 2005 - NDLR) », ajoute-t-il, annonçant « 200 meetings d’ici aux vacances ».

Cette campagne se veut à la hauteur de l’enjeu. La nouvelle réforme en gestation « risque de porter un coup fatal au système de retraite par répartition en jurant une fois de plus que c’est pour le sauver », souligne l’appel. Report de l’âge légal, allongement de la durée de cotisation, ces mesures «  condamneraient à la pauvreté la plupart des futurs retraités ». Réfutant le pseudo-argument de la démographie, les signataires mettent en exergue le véritable but poursuivi par la droite et le patronat dans cette affaire : faire payer la crise, par la réduction des dépenses publiques, aux salariés, plutôt qu’aux marchés financiers, aux profits, aux actionnaires, décrypte Pierre Khalfa, de Solidaires. Si le texte ne présente pas, à proprement parler, un autre projet de réforme, il affirme haut et fort « normal » de couvrir les besoins liés à l’accroissement de la part des retraités dans la population « par un accroissement des prélèvements sur la richesse produite ». « Le financement des retraites est possible à condition d’en finir avec l’actuel partage éhonté de la richesse au bénéfice des revenus financiers. »

« Le sens de l’appel, c’est de dire qu’une alternative » à la régression sociale « existe », insiste Jean- Marie Harribey, président d’Attac. Présents, hier, à la conférence de presse de lancement de l’appel, les responsables des partis de gauche ont tous mis en relief le « choix de société » que représente la défense du système de retraite par répartition, du contrat de solidarité intergénérationnelle qu’il incarne, à l’opposé du « chacun pour soi » de la capitalisation, vers laquelle gouvernement et patronat voudraient pousser les salariés. Pour Pierre Laurent, qui a annoncé que « le PCF a décidé d’engager toutes ses forces dans les mois à venir au service de cette bataille cruciale », il s’agit de faire en sorte que le sujet « devienne l’affaire des citoyens ».

Pour cela, politiques et syndicalistes ont, à l’unisson, affirmé la volonté de mener une bataille à la fois « idéologique », « pédagogique », pour « contrer la pensée unique », en s’adressant à toutes les générations, mais en consacrant un effort spécifique à la jeunesse, « qui doute de la répartition ». « Les salariés, les retraités, les jeunes ne pourront se mobiliser que s’il y a une alternative crédible », montre Elizabeth Labaye, de la FSU. Et Jean-Baptiste Prévost, de l’Unef, insiste, dans le même esprit, sur le besoin de « faire évoluer le système » pour que les périodes d’études, d’inactivité forcée, ne soient pas pénalisantes pour le droit à retraite. Enfin, le représentant du NPA a traduit, à son tour, la tonalité résolument offensive de cet appel, en dénonçant le « manque de légitimité de ce gouvernement, qui vient de recevoir une raclée électorale, pour casser les conquêtes sociales de 1945 », et en proclamant « possible de refaire ce qu’on a fait pour le TCE ».

Yves Housson


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