Plateformes pétrolières : d’autres marées noires en perspective ?

vendredi 14 mai 2010.
 

La plus grande plateforme pétrolière du monde, Atlantis, exploitée par BP dans le Golfe du Mexique, comporterait de nombreux défauts techniques. Selon le site d’information indépendant Truthout et des ingénieurs ayant travaillé pour BP, en cas de problème, ce forage pourrait provoquer demain une marée noire encore pire que celle qui menace aujourd’hui les côtes de Louisiane.

L’équivalent de 5.000 barils de pétrole continuent de se déverser chaque jour dans le Golfe du Mexique à cause de l’incapacité de British Petroleum (BP) de colmater son forage [1]. La gigantesque marée noire qui menace les côtes de Louisiane, du Mississipi, d’Alabama et de Floride est donc alimentée sans discontinuer depuis l’explosion du 20 avril de la plateforme pétrolière « Deepwater Horizon », qui a causé la mort de 11 salariés et provoqué le naufrage de la plateforme. La polémique enfle depuis les révélations du Wall Street Journal qui pointe les insuffisances du système de sécurité de la plateforme.

Deepwater Horizon était en effet dépourvue de vanne de sécurité pouvant être déclenchée par impulsion acoustique depuis un navire proche de la plateforme. Cette mesure est obligatoire pour l’exploitation pétrolière off-shore proche de pays comme la Norvège ou le Brésil. Dans une lettre du 29 avril, le démocrate Henry Waxman, président du Comité de l’énergie et du commerce à la Chambre des représentants, demande au président de BP Amérique, Lamar McKay, de fournir au Comité des copies des rapports d’inspections des vannes de sécurité de l’ensemble de ses plateformes. Une enquête fédérale est également en cours.

Plus grave : selon le site d’information indépendant Truthout, BP risquerait de provoquer d’autres catastrophes massives dans le Golfe du Mexique. En ligne de mire, Atlantis, la plus grande et plus profonde plateforme de pétrole et de gaz naturel du monde, située à environ 300 kilomètres au sud de la Nouvelle-Orléans. Lancée fin 2007, son forage descend à une profondeur de 2.150 mètres. Grâce à un « lanceur d’alerte » travaillant pour le pétrolier britannique, le site Truthout s’est procuré des correspondances internes évoquant les insuffisances du système de sécurité de la plateforme Atlantis. On apprend ainsi que les schémas techniques « ne sont pas complets » et que « cela pourrait mener à des erreurs catastrophiques de l’opérateur ».

Soudures sous-marines non conformes

En mai 2009, Max Sawer, un ingénieur texan ayant travaillé sur Atlantis, constate que 85 % des 2.108 instruments de contrôle et de commande des canalisations n’avaient pas été soumis à une validation des ingénieurs. 95 % des soudures sous-marines d’Atlantis ne seraient pas certifiées. « Si elles rompaient, la marée noire serait trente fois pire que celle générée par l’explosion de Deepwater Horizon », prévient le site d’information. Le 26 mars dernier, le Service fédéral de la gestion des ressources minérales a lancé une enquête sur les schémas de procédés et d’instrumentation d’Atlantis et attend dans les jours à venir un rapport détaillé. Le coût des mises à jour du système de sécurité d’Atlantis est évalué à 2 millions de dollars par la source de Truthout.

BP se voit régulièrement infliger des amendes. Selon le Service fédéral de la gestion des ressources minérales, « BP a été condamné à 75.000 $ d’amendes en 2003 pour ne pas avoir mis en adéquation la pression de l’eau avec l’un des systèmes de protection contre le feu d’une plateforme, ainsi que 80.000 $ d’amendes pour avoir évité les alarmes de sécurité indicatrices des dangers de la haute pression ». La responsabilité de BP est également engagée lors de l’explosion, en 2005, de la raffinerie de Texas City, qui a tué 15 personnes et en a blessé 170. Le groupe pétrolier a dû payer 135 millions d’euros au gouvernement américain. La société a aussi été mise en cause pour la pollution de Prudhoe Bay, en Alaska, en 2006. « Les imprudences de BP dans le projet Atlantis sont l’exemple manifeste de la manière dont une entreprise développe un modèle défectueux avec l’adoption de standards industriels minimums en matière de sécurité environnementale et des travailleurs », estime l’ingénieur Max Sawer, dans Truthout. Pour le premier trimestre 2010, BP vient d’annoncer une augmentation de 135 % de ses profits, soit 6 milliards de dollars.

Sophie Chapelle


Signatures: 0
Répondre à cet article

Forum

Date Nom Message