NPA : Il va nous falloir composer avec Mélenchon, de gré ou pas.

jeudi 10 juin 2010.
 

2012 est déjà dans toutes les têtes et tout le monde en politique ne pense et ne se définit que par rapport à ça. C’est dans deux ans, il peut se passer toutes sortes de choses entretemps mais voilà : l’enjeu est tellement fort dès maintenant qu’il est impossible de ne pas y penser et de se demander comment on peut se positionner par rapport à cette échéance. Et c’est là qu’au NPA, nous avons clairement un problème.

L’humiliation des régionales qui suivait une piteuse campagne européenne nous a trouvés inaudibles et incompréhensibles : si on part du principe qu’on agit en général parce que les choses qu’on fait possèdent un sens déterminé, force est d’admettre qu’il n’y avait pas de sens à voter pour nos candidats de préférence à d’autres dont le discours avait au moins le mérite de la clarté. Alors, des bilans et des analyses vont être tirés, le congrès de novembre est en préparation et la prochaine université d’été permettra d’y voir plus clair. Et précisément, si il y a quelque chose de vraiment urgent, c’est d’être plus clairs par rapport à ce qu’on veut en tant que parti politique et comment ce qu’on exprime est perçu par les gens auxquels on s’adresse.

Et le décalage entre l’état d’esprit de l’opinion en général et les discours qu’on a pu lui tenir est malheureusement d’une rare cruauté.

Et on ne peut que constater une chose simple, terriblement simple, mais dont il faut prendre compte : les gens n’ont pas envie de se battre. Ils n’en ont pas envie parce qu’ils sont fatigués et qu’ils ont peur. Ce sentiment de dépression collective larvée mais présente existe, est réel, partant se pointer avec des discours ultra-volontaristes sur l’urgence de lutter avec pour seul objectif d’installer la grève générale, ça tombe et ça continuera de tomber à plat. Avec le risque qui plus est de continuer de s’agiter dans une fuite en avant stakhanovisto-militante stérilisante pour se donner l’impression qu’on fait quelque chose...

La fenêtre historique du libéralisme est en train de se refermer, comme écrit précédemment, et commence d’exister un espace où les idées progressistes commencent sinon d’être prises complètement au sérieux - les réflexes de déni vont encore fonctionner quelque temps et on aura encore droit à des crétins couinant "totalitarisme" et "Corée du Nord" dont certains complètement incurables -, du moins commencent-elles d’être écoutées avec une certaine attention. C’est un progrès. Mais ce n’est pas encore suffisant pour convaincre le plus grand nombre, cette majorité qui trime et dont le seul rapport concret au politique passe par l’électoralisme et l’expression de son sentiment par le bulletin de vote. Nous, avec nos discours de dépassement de l’État bourgeois et d’appropriation collective des moyens de production, sans parler d’une certaine confusion quant à ce qu’on propose et veut dans l’immédiat le plus concret, on est mêmes plus "trois pas en avant des masses" : on est à un kilomètre devant elles et on les attend en se demandant ce qu’elles peuvent bien foutre...

Et pendant ce temps là, il y’en a un qui a méchamment pris des vitamines : c’est Mélenchon. J’ignore ce qui s’est passé récemment chez lui, cure de jus de goyave, shaker de protéines ou décoction de couilles de taureau, mais en ce moment et indépendamment de ce qu’on peut penser du personnage en lui-même, il déchire partout où il passe. Le voir humilier les néolibéraux qu’il a en face est un vrai délice, ne cachons pas notre plaisir, et si ça continue comme ça, il va se retrouver en pôle position pour une candidature de la gauche radicale en 2012. Ça tombe bien : c’est ce qu’il veut. Mélenchon a ce côté "visité" du mec qui croit à son destin - devenir le Chavez français, rien moins - pour ce qui est de booster la confiance en soi, croire en soi-même au sens quasi-mystique du terme, y’a rien de mieux.

Et c’est contagieux, en plus. Si des présidentielles étaient en cours, là maintenant tout de suite, il pourrait faire ce Graal du "score à deux chiffres" que la gauche radicale espère depuis si longtemps. Il y a un peuple de gauche qui en a marre d’attendre et qui veut espérer, qui veut un signe, et de plus en plus de gens exaspérés par les batailles de chiffonniers dans la vraie gauche sont prêt à accorder leur confiance à celui qui parle le plus clair et le plus haut, qui exprime qu’il veut le pouvoir et qu’avec lui ça va chier. Je ne dis pas que c’est génial : je dis ce qui est.

Ce qui signifie aussi que du côté NPA, on a pas intérêt à encore se louper là dessus. Parce que dans l’hypothèse, terrifiante, où OB - mettons que ce sera lui - se présente en face de Méluche dans le cadre des élections présidentielles, on aura beau argumenter toutes les subtilités dialectiques du monde, tout ce que les gens retiendront de toutes façons, c’est que pour la troisième fois consécutive, on la joue perso. Même si ce n’est pas vrai. Oui, c’est malheureux. Mais c’est ce qui se passera. Partant et si ils ont le choix, les gens voteront pour le plus "crédible"...celui dont ils pensent qu’il peut et veut faire des choses maintenant tout de suite. Et pour dire les choses très crûment : Nous ne survivrons pas à un troisième échec électoral.

Il va donc falloir composer avec Mélenchon, de gré ou pas.

CSP


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