Les banques au cœur de la crise (article national PG)

mercredi 7 juillet 2010.
 

L’oligopole bancaire

A la suite des dérégulations mises en œuvre par les ultralibéraux à partir des années 1970, le poids des banques dans l’économie mondiale n’a cessé de croitre. Aujourd’hui, nous nous trouvons dans une situation d’oligopole bancaire. Sur les 45 000 banques existantes au monde, 30 peuvent être à l’origine d’une crise systémique majeure, comme l’a montré la faillite de la banque d’investissement américaine Lehman brothers. Un exemple parmi d’autre de cette puissance : BNP. Le bilan de cette banque, fin 2008, soit en pleine crise, était de 2 988 milliards de dollars, alors qu’à la même période, l’endettement français était de 1 839 milliards de dollars, soit 62 % du bilan de la banque.

Plus frappant encore, l’endettement public mondial est de 36 000 milliards de dollars (et il a connu une hausse de 40% depuis 2007). Mais cette somme, qui donne le frisson, ne représente que les valeurs détenues par les 10 premières banques au monde. Ces deux exemples montrent l’ampleur du rapport de force entre pouvoir financier et pouvoir politique.

Cette puissance, confiée aux banques par les politiques libérales menée par les différents gouvernement et notamment ceux de Thatcher au Royaume-Uni et Reagan aux États-Unis, se double d’une transformation de la structure bancaire. Si la France donne une définition très précise de ce que doit être une banque. En son article L311-1, le code monétaire et financier donne la définition suivante : « Les opérations de banque comprennent la réception de fonds du public, les opérations de crédit, ainsi que la mise à la disposition de la clientèle ou la gestion de moyens de paiement », la réalité des organisme bancaires est toute autre.

Aujourd’hui, les banques sont devenu des conglomérats financiers dont l’activité purement bancaire n’est plus forcément le cœur des préoccupations. Les activités d’assurance et les transactions financières, beaucoup plus rentables, deviennent de plus en plus importantes pour ces grands groupes mondialisés et financiarisés.

Dans le même temps, le rôle des banques centrales s’est profondément modifié. Si à l’origine, elles étaient un outil au service du pouvoir politique pour agir sur la monnaie, par le biais des dévaluations notamment, et donc sur l’économie réelle du pays, les dogmes libéraux les ont transformées en outil au service du capital. En effet, les banques centrales, et au premier rang d’entre elles, la Banque Centrale Européenne, sont désormais totalement indépendante de tout pouvoir politique. Dans le cas de la BCE, les différents traités européens affirment son indépendance et lui confie pour seule mission de lutter contre l’inflation et de maintenir l’euro à un niveau de change élevé face au dollars. Ces deux mesures favorisent les rentiers au dépend de l’économie réelle.

C’est dans ce contexte qu’éclate la crise des subprimes en 2008.

Le rôle des banques dans la crise

Si nous ne revenons pas sur les origines de la crise, il est important, de noter les réponses que les États y ont apporté. Alors que les banques venaient de faire la démonstration de leur objectif de rentabilité immédiate en spéculant sur les titres de crédits incertains, les Etats ont accepté de renflouer les banques à hauteur de plusieurs centaines de milliards. Et ceci sans aucunes contreparties. Les Etats auraient pu exiger d’entrer dans le capital des banque pour pouvoir agir et modifier les politiques bancaires, il n’en fut rien. Les Etats ont nationalisé les pertes et de ce fait encouragé les banques à continuer leur jeu spéculatif en se portant garant de leurs dettes. La dette privée a donc été absorbée par les Etats. La crise qui touche actuellement les Etats européens n’est donc pas la crise de la dette publique mais bien celle de la dette privée. Dette privée qui est la conséquence d’années de compression salariale dans une société où la consommation est la mesure de toute chose.

Sauvées par les Etats, les banques peuvent maintenant s’attaquer aux bons du trésors des pays les plus fragiles, comme la Grèce. Cette spéculation n’est rendue possible que par l’abandon par les gouvernements de leur pouvoir monétaire. En effet, les banques ne peuvent prêter aux Etats que parce qu’elles achètent de la monnaie auprès des banques centrales. La BCE, lors de la crise a abaissé son taux à 1%. Les banques privées achètent donc à 1% pour revendre cet argent aux Grecs à 8, 10 voire 15%. Cette spéculation, basée sur le fantasme d’une faillite de la Grèce, n’est possible que pour 2 raisons :

La BCE refuse de financer directement un Etat au nom de la sacro-sainte lutte contre l’inflation et la préservation de la monnaie et avec elle des rentiers.

Le gouvernement grec a vu ses recettes s’assécher en raisons des politiques libérales menées depuis 20 ans et conduisant à une diminution des recettes fiscales des plus riches.

La réaction des autorités de l’UE et du FMI ne peut que renforcer les banques dans leur impunité. Au lieu, de réagir vigoureusement et de s’opposer frontalement au monde financier, l’UE et le FMI veulent faire payer la crise aux peuples en les soumettant à une cure d’austérité sans équivalent et qui ne peut qu’échouer, comme le montre les exemples sud-américains et comme le reconnaît le FMI lui-même. La baisse d’activité due a ces plans d’austérité et le poids supplémentaire de la dette provoquée par l’augmentation des intérêts de celle-ci vont contracter l’économie. En 2015, la part de la dette dans le PIB en Grèce aura augmentée pour parvenir à 150 %. La souffrance du peuple aura été inutile à part pour les banques. Cette crise sert donc de prétextes aux gouvernement pour se livrer à une politique ultra-libérale avec la complexité du FMI.

Le gouvernement français entend être un bon élève et justifie ainsi la contre-réforme des retraites. Et pourtant, même cela ne satisfait pas le FMI de m. Strauss-Kahn. Celui-ci affirme dans son rapport annuel sur la France : « Le fait que les autorités retiennent des projections de croissance à moyen terme dans le haut des prévisions du consensus risque d’aboutir à une sous-estimation significative de l’ampleur des efforts budgétaires requis ». Cette constatation les pousse à déclarer : « La réforme des retraites et du système de santé doit constituer la pierre angulaire de la stratégie budgétaire à moyen terme » et le gouvernement doit lui apporter « une attention particulière ». Il est nécessaire qu’il « résiste aux pressions » qui conduiraient à ne pas corriger les déséquilibres de la Sécurité sociale et qu’ils mettent en place des « mesures audacieuses ». Avec le FMI, même les zélateurs ne vont pas assez loin. Dans ce contexte, il est nécessaire de mener une politique ouvertement opposée aux intérêts bancaires.

Gouverner face aux banques

Un gouvernement de Front de Gauche doit se réapproprier les outils de la souveraineté populaire pour pouvoir mettre en œuvre sa politique. Cela passe par un refus d’appliquer le traité de Lisbonne. Pour ce faire, il sera utile de rappeler l’existence du « compromis de Luxembourg » obtenu par le général de Gaulle et qui permet à toute nation européenne de refuser d’appliquer une décision communautaire au nom de la défense des intérêts du pays. Ainsi libéré du carcan libéral, le gouvernement pourra prendre des mesures de ruptures.

Il est nécessaire, dans ce cadre, de prendre des mesures d’urgence en taxant les sorties de capitaux, en mettant en place un prélèvement exceptionnel sur le patrimoine financier et les plus hauts revenus pour apurer la dette publique ou encore en prenant des mesures contre les fraudes fiscales. Ces mesures d’urgence permettront de réguler le système bancaire et financier le temps de prendre des mesures pour le transformer en profondeur, en créant notamment un secteur publique bancaire.


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