Du 18 au 23 juillet 2010, la 18ème Conférence internationale sur le sida a constaté les dégâts

mardi 27 juillet 2010.
 

Alors que l’été bat son plein en France, charriant son cortège de corps alanguis sur les plages, dans le sourd brouhaha d’un relâchement général, la XVIIIe Conférence internationale sur le VIH tient tribune dans la capitale autrichienne du 18 au 23 juillet. Organisée tous les deux ans par l’International Aids Society, cette échéance fait office de point d’orgue récurrent dans la mise en avant sur le devant de la scène globale de ce fléau qui aura creusé en moins de trente années 25 millions de sépultures humaines. Chiffre vertigineux s’il en est, il conviendra toutefois de le compléter par la lecture du rapport publié en 2008 par l’institution Onusida [1].

Actuellement, mieux vaut encore le marteler, plus de 33 millions de personnes sont infectées par le VIH (virus de l’immunodéficience humaine), dont les deux tiers vivent en Afrique subsaharienne. A cela, chaque année, il faut ajouter plus de 2,7 millions de personnes nouvellement contaminées, soit de quoi effrayer encore bien des consciences humaines au moyen de cette arme que représentent les chiffres de cette épidémie[2].

Si, le « positive lounge » [3] est un espace qui fait désormais partie des meubles lors de la tenue des conférences internationales consacrées au redoutable virus du sida, l’endormissement des militants associatifs n’est toutefois pas d’actualité, bien au contraire. Associés aux chercheurs ainsi qu’au corps médical, les activistes de tous horizons redoublent ici d’énergie afin de donner le plus ample écho à leurs différentes revendications souvent pétries à la lumière de leurs expériences de terrain, puis étayées par les meilleurs travaux scientifiques.

Ainsi, il a été question du fameux gel microbicide de troisième génération, puisque les résultats d’une étude sud-africaine ont été rendus publics dés les premiers jours de la conférence [4]. Avec une efficacité de 39% en matière de réduction de risques, cette innovation dans le champ de la prévention ne peut que susciter de nouveaux espoirs - notamment pour les femmes, premières concernées par ce produit - même si certains observateurs avouaient une certaine déception au regard des attentes qui prévalaient [5].

L’autre grande difficulté soulevée par les intervenants concerne l’épineux problème des usagers de drogues, population aussi largement discriminée que massivement exposée au risque d’infection par le VIH. Dans cet esprit, il faut noter que le texte de la Déclaration de Vienne [6] prône une ligne politique assise sur les notions fondamentales de santé publique et de droits humains, le tout débarrassé de toutes considérations morales déplacées. C’est ici un saut qualitatif de grande importance qui permettrait de franchir enfin les derniers obstacles dressés par une société civile encore toute endimanchée dans des représentations archaïques d’une nocivité parfois affligeante. La fin des années 80 n’est pas si loin, et dans son sillage il n’est pas rare d’entendre encore nombre d’inanités insupportables qu’il faut combattre sans relâche. Les préjugés ont la peau au moins aussi dure que celle du VIH ! Dans ce sens, on remarquera l’appel courageux lancé par Françoise Barré-Sinoussi [7], pour que cesse enfin la guerre à la drogue et à ses usagers, politique stérile dont les effets indésirables sont désormais des plus saillants.

Absence indécente du ministre français de la santé lors de la précédente conférence qui s’était tenue à Mexico en 2008, Roseline Bachelot ne pouvait pas se permettre de récidiver, au risque de se voir clouée au pilori par une juste vindicte. Aussi, Act-up Paris n’aura pas manqué sa cible en questionnant cette dernière sur le délicat sujet de l’aide médicale d’État, ainsi que sur la mise en place des salles d’injection sécurisées. Ces dossiers sensibles constituent encore des pierres d’achoppement entre pouvoirs publics et le monde de l’activisme éclairé.

Mais tel l’éclair, elle aura traversé le ciel de cette conférence, n’hésitant pas à se faire dépister sous les projecteurs médiatiques, vantant les mérites de cette pratique qui se doit d’être la plus ample possible. Puis, notre ministre de disparaître, le rapport du groupe d’experts présidé par professeur Patrick Yeni sous le bras [8], document consacré à la prise en charge médicale des personnes infectées par le VIH. Production scientifique qu’elle ne manquera pas de lire avant de rejoindre le cortège des aoutiens béats.

Enfin, c’est toujours la question du financement qui demeure le véritable nœud gordien de la lutte contre l’épidémie du sida puisque la menace du manque d’argent dans les pays les plus pauvres préoccupe l’ensemble des parties prenantes au débat. L’organisation Onusida rappelle qu’il faudrait consacrer une somme d’environ 25 milliards de dollars à la lutte contre l’épidémie alors que plus 11 milliards de dollars font à ce jour défaut. Encore une fois, si la crise à bon dos, le cynisme ne fait pas dans la demi-mesure ! L’économie mondiale est fébrile, convalescente, et tout ce qui compose la planète des puissants se tient à son chevet, alors même que la machine à profits continue à danser, certes d’un pas plus feutré. Trêve de balivernes, il y a suffisamment de richesses produites pour que soit financée non seulement la lutte contre le sida, mais aussi pour que soient éradiqués tous les fléaux les plus meurtriers qui courbent l’échine des peuples les plus exposés.

Ainsi va le monde, pendant que certain(es) cultivent avec soin leur mélanome futur en surexposant leurs corps gras aux rayons d’un soleil sans complaisance, d’autres attendent dans l’indifférence quasi générale une thérapie antirétrovirale, au premier rang desquels figurent plus de 2 millions d’enfants de moins de 15 ans...


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