Eric Woerth : des legions d’honneur en veux-tu en voilà

vendredi 20 août 2010.
Source : Mediapart
 

Après la Légion d’honneur remise par Eric Woerth à Patrice de Maistre (employeur de sa femme et gestionnaire de fortune de Liliane Bettencourt), Mediapart est tombé sur une autre décoration accordée par le ministre qui exhale le conflit d’intérêts. Le 13 juillet 2008, en effet, un expert-comptable inconnu du grand public, Bernard Godet, a été nommé officier de la Légion d’honneur sur le contingent d’Eric Woerth (alors ministre du budget). Le décret paru au Journal officiel déclinait sobrement ses titres : « 35 ans d’activités professionnelles et de services militaires »... Deux mois plus tôt, Bernard Godet avait surtout visé les comptes de campagne du ministre, candidat victorieux aux municipales de Chantilly dans l’Oise, avant que ces derniers ne soient remis à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP).

Plus gênant encore : Bernard Godet est l’homme qui a certifié les comptes 2008 du micro-parti du ministre – déjà dévoilés par Mediapart. Fin juin, il était apparu que cette formation politique « maison », créée dans l’Oise en toute discrétion et baptisée « association de soutien à l’action d’Eric Woerth », avait bénéficié de la générosité de Liliane Bettencourt (qui lui aurait signé un chèque de 7.500 euros en 2010, selon l’entourage du gestionnaire de fortune de la milliardaire). Légale sur le papier, cette structure contribue comme tous les autres « partis de poche » à « détourner » l’esprit de la loi sur le financement de la vie politique – pour reprendre le mot du président de la CNCCFP, autorité administrative indépendante...

Interrogé sur les raisons pour lesquelles il a souhaité récompenser Bernard Godet, Eric Woerth n’a pas répondu à nos questions. L’heureux bénéficiaire, sollicité par l’intermédiaire de son cabinet parisien, n’a pas non plus retourné nos appels. Les interrogations soulevées par l’attribution de cette Légion d’honneur sont pourtant multiples.

Premièrement, Bernard Godet a-t-il pu, en 2009, quelques mois après avoir reçu la Légion d’honneur, se plonger dans les comptes 2008 du parti de poche du ministre et les certifier (c’est-à-dire évaluer leur sincérité et leur régularité) en toute indépendance ? Avait-il l’absolue liberté de dénoncer d’éventuelles tricheries ?

Le code de déontologie des commissaires aux comptes, dans son article consacré aux conflits d’intérêts, précise que « le commissaire aux comptes évite de se placer dans une situation qui compromettrait son indépendance à l’égard de la personne ou de l’entité dont il est appelé à certifier les comptes, ou qui pourrait être perçue comme de nature à compromettre l’exercice impartial de cette mission ». En clair, la seule apparence d’un mélange des genres pose déjà problème.

in : Mediapart .


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