François Mitterrand et la guerre d’Algérie

mardi 26 octobre 2010.
 

France 2 diffuse un documentaire éclairant la période trouble entre 1954 et 1957 durant laquelle Mitterrand fit exécuter un militant communiste : Fernand Yveton.

Entre 1954 et 1957, François Mitterrand fut ministre de l’Intérieur et de la Justice dans le gouvernement de Guy Mollet, confronté à la guerre d’Algérie. On parlait à l’époque de pacification et de maintien de l’ordre alors que le FLN avait, à la Toussaint 1954, appelé le peuple algérien à se soulever contre la France et à réclamer son indépendance. C’est ès qualités que le jeune ministre de l’Intérieur, en charge de la sécurité des « trois départements » d’Algérie, mena une politique extrêmement répressive. À cette époque, et il le démontra, Mitterrand était favorable à la peine capitale. Dans un documentaire, François Mitterrand et la guerre d’Algérie, réalisé par Frédéric Brunnquell, et un livre au titre identique, qui paraît aux Éditions Calmann-Lévy, l’historien Benjamin Stora et le journaliste du Point François Malye lèvent le voile sur cette période sombre où le Mitterrand déjà ambitieux et de « l’Algérie, c’est la France » approuva la mise à mort de 80% des militants du FLN. En cinq cents jours d’exercice, il a fait guillotiner 45 militants du FLN, dont Fernand Yveton, trente ans, membre du Parti communiste algérien, le seul Européen exécuté. C’était le 11 février 1957. Celui-ci avait été arrêté parce qu’on avait trouvé une bombe baptisée Betty dans son casier de l’usine de gaz d’Alger où il travaillait. La bombe n’a jamais été posée. Mais ça suffisait pour en faire un terroriste. Yveton fut arrêté le 14 novembre 1956, torturé, condamné à mort et finalement exécuté. De son dossier 9456, on ne trouva plus trace à la chancellerie.

Les auteurs de cette passionnante enquête ont retrouvé dans les archives du Conseil supérieur de la magistrature, dont Mitterrand, garde des Sceaux, était le vice-président, une pièce de six petites pages montrant qu’il n’a jamais été favorable à la grâce du militant communiste. Mitterrand sera le président de la République qui abolira la peine de mort, en 1981. Par remords  ? Pourquoi n’a-t-il pas, à l’époque, démissionné  ? « Par calcul politique », répond Franz-Olivier Giesbert, son biographe. Mitterrand calculateur et embusqué rêvant plus à son avenir politique. Il espérait en particulier, devenir président du Conseil à la place de Guy Mollet.

Ce documentaire est riche de témoignages, comme la parole émouvante de Louisette Ighilahriz, combattante du FLN, ou celle de Gisèle Halimi, l’une des signataires de l’Appel des douze, paru dans l’Humanité, le 31 octobre 2000, appelant la France à condamner la torture. En résonance avec le témoignage du colonel Antoine Argoud racontant tranquillement avoir lui-même fusillé, ou fait fusiller, 200 personnes, « sans jamais l’avoir regretté », lors des sinistres « corvées de bois ».

Claude Baudry, L’Humanité


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