Congrès du PG : le Parti de gauche met la gomme pour faire vivre le Front de gauche (L’Humanité)

mercredi 24 novembre 2010.
 

Le congrès de l’organisation 
de Jean-Luc Mélenchon se tient au Mans. Deux ans après 
sa fondation, 
ses militants 
se réjouissent d’avoir installé une nouvelle force dans le paysage politique 
de la gauche.

Quand, fin novembre 2008, Jean-Luc Mélenchon, Marc Dolez et Claude Debons lancent le Parti de gauche (PG), ils ont en tête la constitution d’une force unique regroupant ce qu’ils nomment « l’autre gauche ». Deux ans plus tard, alors que s’ouvre, aujourd’hui et jusqu’à dimanche, au Mans, le deuxième congrès, leur but n’a pas varié d’un pouce. Un objectif largement partagé par l’ensemble de la direction.

«  Nous n’avons pas fait le PG pour l’éternité. Tout ce que nous faisons, nous devons l’inscrire dans la longue durée, et celle-ci nécessite un outil de longue durée qu’est la force politique nouvelle », explique Jean-Luc Mélenchon, le président du parti. « Le PG peut être amené à disparaître, cet outil est transitoire », renchérit François Delapierre, le délégué général. L’essence, la vocation, l’aspiration du Parti de gauche reste la création d’un Die Linke à la française, en dépit du « non » à la fusion que le PCF lui a renvoyé. Mais Jean-Luc Mélenchon et ses camarades ne désespèrent pas de l’amener à la « raison », lui comme les autres organisations, convaincus que « l’éparpillement n’est bon pour aucune formation », selon Martine Billard, la porte-parole. «  Nos partis ont un processus de rapprochement idéologique qui me conduit à redire à quel point l’existence séparée de nos organisations doit davantage à l’histoire qu’à la réalité du présent  », persiste Jean-Luc Mélenchon. Mais il «  respecte l’ordre des choses  ».

En attendant, le Parti de gauche met la gomme pour faire vivre le Front de gauche, cette alliance avec le PCF et la Gauche unitaire de Christian Picquet à laquelle il semble davantage tenir. Car, selon Claude Debons, «  c’est le cadre le plus approprié pour rassembler les forces qui auraient pu se retrouver dans un parti commun  ». Ce membre du bureau national rêve du Front de gauche comme d’«  une étape  » dans la construction de la formation politique unique. Pour lui, comme pour l’ensemble des dirigeants, il ne peut y avoir d’avenir pour le PG sans le Front de gauche, «  et vice-versa  », affirme Martine Billard.

Mais cette unanimité à la tête du PG ne reflète pas entièrement le débat parmi les militants. Ce soir-là, autour d’un repas chez l’une des adhérentes, à Montreuil, en Seine-Saint-Denis, la discussion s’anime fraternellement sur cette question. Riva Gherchanoc (trente-deux ans) et Rudy Pierron (vingt-cinq ans) s’opposent à Danielle Espinosa (soixante-quatre ans) et Luce Garcia Idalgo (cinquante-huit ans). Les premiers insistent et n’en démordent pas sur le besoin de la «  maison commune  », les secondes persistent à refuser une fusion entre le PCF et leur formation. «  Même s’il me gave par certains côtés, je ne souhaite pas que le PCF disparaisse, surtout à la lumière de ce qui s’est passé en Espagne. Avec sa dissolution, plus rien ne tiendra la route à gauche  », soutient Luce. La création du Front de gauche convainc tout le monde, même si certains de ces militants y décèlent un «  compromis  ».

Il n’empêche, la famille « pégiste » constitue une bonne force de frappe. Avec peu de membres. «  Il y a la jeunesse, le dynamisme, mais notre faiblesse, c’est le petit nombre que nous sommes  », reconnaît Martine Billard. De 7 000 adhérents au mois d’août, il avoisine aujourd’hui les 8 000, selon la porte-parole. «  C’est la conséquence du mouvement social, indique-t-elle. Nous avons enregistré l’arrivée de nombreux syndicalistes.  » À sa naissance, le Parti de gauche comptabilisait essentiellement des ex-militants socialistes. Le profil s’est modifié au bout d’un an  : «  Les nouveaux n’appartenaient à aucune organisation auparavant ou alors ils n’en faisaient plus partie depuis dix à vingt ans  », précise Martine Billard.

Du sang neuf qui dessine une formation politique moins monolithique qu’elle n’apparaît. Le « tous ensemble derrière Méluche » peut dissimuler les débats en son sein. La controverse sur les rapports que « l’autre gauche » doit entretenir avec le PS traverse aussi le PG. Pour Claude Debons, «  il faut construire le rassemblement au cœur de la gauche et non à sa marge. Il nous faut une gauche de transformation et non une extrême gauche plurielle  ». Or, pour François Delapierre, le bras droit de Jean-Luc Mélenchon : «  On peut être l’autre gauche à vocation majoritaire, pas dans le témoignage ou la critique stérile de la volonté de peser sur le PS, alors qu’il s’est durablement installé sur sa trajectoire sociale-démocrate.  »

Créé pour être le trait d’union, le creuset de traditions et d’histoires politiques différentes, le Parti de gauche peut se réjouir d’avoir su intégrer le courant écologiste, incarné par les 400 ex-membres des Verts, dont Martine Billard. «  Il y a aujourd’hui au PG une remise en cause de la croissance pour la croissance  », se félicite la porte-parole, qui confie reprendre «  goût au militantisme  ». Mais après deux ans d’existence, la formation de Jean-Luc Mélenchon ne cache pas ses difficultés à réaliser la synthèse entre les diverses familles qui la composent. «  Elle est amorcée sur le plan intellectuel, mais pas encore dans l’expression du parti, dans sa politique, dans son fonctionnement  », estime Claude Debons. Critique nuancée par le président  : «  Le triptyque République sociale-écologie-socialisme est maintenant une identité commune de tout le parti. La méthode du creuset ne signifie pas que les matériaux sont déjà fondus.  » Estimant que l’essentiel du travail de fondation qu’il s’était assigné arrive à son terme, Jean-Luc Mélenchon peut annoncer son départ de la présidence du PG. D’autant qu’il se sent «  capable  » de porter désormais les couleurs du Front de gauche en 2012.


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