Le Parti Socialiste que j’ai connu n’existe plus

lundi 20 décembre 2010.
 

Je ne crois pas que le PS se tire d’affaire avec ses Conventions sur le projet davantage qu’avec ses primaires. Le parti que j’ai connu n’existe plus. 37 présents à l’assemblée générale de la section de Calais, à peine 900 votants pour toutes les sections de la fédération de l’Essonne un soir de grande élection pour la liste sénatoriale et désignation du candidat président du conseil général alors même que chacun accuse l’autre d’avoir gonflé les effectifs ! Ces deux exemples illustrent une dissidence passive de masse des adhérents. François Hollande lui-même la pointait récemment avec angoisse en notant que les textes étaient adoptés par moins du tiers des adhérents à jour et de même dans le conseil national du parti. Il y a aujourd’hui 65 000 cartes à jour au PS. Autant dire les seuls élus et le premier cercle de leurs collaborateurs et clients. Partout les instances ne se réunissent plus qu’occasionnellement. Les bureaux départementaux autrefois hebdomadaires sont de plus en plus en plus souvent mensuels, les réunions de conseil fédéraux trimestriels, les sections hautement épisodiques. Et ainsi de suite.

La soi disant « remise au travail » du parti est un pur leurre, et la paix interne est la paix du vide. Si Strauss-Kahn parait, il emportera tout en une seconde. Nul ne résistera car il n’y a aucune force pour le faire. Mais si la primaire a vraiment lieu avec plusieurs candidats ce sera une foire d’empoigne sans légitimité. On y verra rappliquer, sous prétexte de citoyens extérieurs invités à voter pour un euro, tout le monde et n’importe qui, de grosses cohortes de clients et commensaux de tous poils, révélant aux derniers restes du parti des adhérents leur place de figurants dérisoires. Terrible leçon de choses qui illustre l’existence des cohérences profondes de l’action politique. Le programme, la stratégie et la forme du parti sont bien liés intimement comme on nous l’enseignait dans les écoles du PS dans les années de la construction du PS du programme commun. Un parti de rupture a besoin de militants qui s’impliquent pour la construction des rapports de force sociaux que le contenu du programme appelle. Un parti d’accompagnement de l’ordre établi n’a besoin que de supporters sans organisation ni culture politique. Ce parti là est une bétaillère.

Naturellement l’actuel « projet » en cours de rédaction n’a aucune signification concrète. Surtout quand il envisage des mesures de progrès social remettant en cause le partage actuel de la valeur ajoutée. Copé a pointé la bonne faille en rappelant que rien de ce programme ne tient face aux banques qui surveillent l’orthodoxie libérale de la gestion du pays. Raison pour laquelle notre premier forum, au Parti de Gauche, avant même le début de la rédaction des fiches programmatiques, a été celui que nous avons consacré à définir comment « gouverner face aux banques » avec la définition de notre stratégie de rapport de force face à la finance. Que vaut la moindre « promesse » face a la décision d’une agence de notation si on n’a pas prévu la stratégie pour affronter les banques qui feraient du chantage aux taux d’intérêts ?

Au demeurant qui peut dire au PS sans rire que le projet sera celui du candidat ? Quelqu’un croit que Strauss-Kahn l’appliquerait ? Ou Ségolène Royal qui a déjà dit qu’elle s’en inspirerait sans le retenir tel quel ? Tout le monde connait la musique. En 2002 Martine Aubry fit le tour des popotes pendant des semaines pour mettre au point le projet « pour dix ans » en vue de la campagne présidentielle. Personne n’en entendit parler le moment venu. Personne ne songea non plus à en demander des nouvelles à Lionel Jospin. En 2007, Henri Emmanuelli réalisa trois ou quatre grande assises du programme de la transformation sociale et le projet pour dix ans. Pas une ligne n’en fut évoqué ensuite pendant la campagne de Ségolène. Là, avant même que l’encre soit sèche, les principaux prétendants ont dit qu’ils n’en pensaient aucun bien. C’est dire. C’est cela que savent les militants et les élus : tout ceci est une comédie.

C’est pourquoi le front de gauche peut disputer le terrain avec confiance. Le programme partagé, lui, ne sera pas une comédie. Nous allons en rabâcher les grands traits et en décliner les axes de toutes les manières possibles pour les ancrer dans les consciences de ceux qui vont coproduire ce programme. Avec cette façon de faire, en bétonnant notre espace nous allons construire du solide, une conscience collective, une volonté, et des aspirations clairement identifiées qui ne seront pas a la merci des politiciens d’entre deux tours.

Mardi 14 décembre 2010


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