Le MEDEF et Sarkozy préparent la fin du « monopole » de la Sécu (par Gérard Filoche)

vendredi 31 décembre 2010.
 

La brutalité de l’ensemble de la politique sarkozyste de destruction de tout notre édifice social est parfois anesthésiante. Certains de ses opposants jugent Sarkozy « déboussolé » ou « incohérent ». Mais pas du tout : il détruit consciemment tout ce qu’il y a de collectif, de service public qui fonctionnait encore bien dans notre pays.

* L’école ? Il casse la carte scolaire et baisse le nombre de profs, pour valoriser et donner sa place à l’école privée.

* L’Université ? La loi Pécresse les autonomisent pour mieux les privatiser, les américaniser.

* Les hôpitaux ? Mais il les met en concurrence défavorable avec le secteur privé depuis longtemps, tarification à l’activité (T2A) à l’appui.

* L’EDF, GDF, SNCF, La Poste ? c’est encore (un peu) public ? Mais c’est pareil, il les ronge, il les découpe, il les livre progressivement aux actionnaires qui les démontent.

* Les collectivités locales ? mais, c’est évident, toute la réforme territoriale vise à en privatiser des services entiers.

* Le Code du travail ? Mais c’est un « carcan ».

* Les 35 h ? Il ne faut plus du tout de durée légale et quand les consciences seront mûres, disent Fillon et Copé, on la supprimera.

* Le Smic ? On le bloque au plus bas niveau pour mieux le disloquer et le supprimer.

* La retraite ? On l’a vu, il la pille, pour faire travailler plus et faire mourir plus tôt.

* Les banques ? Il fait semblant de s’agiter pour les « réguler », mais il laisse tout faire, dévoué comme il l’est aux maîtres du Medef, du CAC 40, du Fouquet’s.

Comment peut-il être si nuisible à ce point, se demandent parfois des opposants avisés mais incrédules ? Mais parce c’est un néo-libéral intégriste, un de ces idéologues fanatiquement à droite, qui voit le monde à l‘envers, uniquement par l’œil des actionnaires, de la concurrence, de la loi du plus fort, du plus riche. Sarkozy l’a dit cent fois : il veut « rompre avec 60 ans de notre histoire » depuis la mise en oeuvre du programme du Conseil national de la Résistance.

Si Sarkozy faisait, par malheur, un deuxième mandat, ce sont six décennies de droits sociaux qui seraient effacées. Il avance en crabe, il zigzague parfois, mais agit en profondeur, sème le mal et la mort de tout ce qui est bon chez nous.

C’est pourquoi il faut le prendre au sérieux : ils privatisent une part de plus en plus importante de la Sécu !

La méthode est toujours la même : diminuer les recettes, augmenter les déficits, affaiblir son fonctionnement, crier au loup, réduire le coût des soins, mettre en concurrence peu à peu. Ils le font grâce à la PLFSS : ce sigle sinistre signifie « projet de loi de finances de la sécurité sociale ». Ils ont réussi, de 1965 (ordonnances de Gaulle-Pompidou) à 1995 (plan Juppé) à nous enlever le contrôle de la gestion de notre « salaire indirect », de nos cotisations maladie. Avant c’étaient les syndicats qui les géraient et il y avait des élections tous les 5 ans à la Sécurité sociale, maintenant ce sont les technocrates de Bercy et une vingtaine de députés, ceux qui s’y intéressent et se spécialisent, qui expédient, sans confrontation ni démocratie, l’orientation du plus gros budget du pays, le budget social (429,8 milliards).

La LFSS 2011 adopté le 28 novembre 2010 prévoit 21,4 milliards d’euros de déficit pour la Sécu (contre 23,1 en 2010). Le déficit du régime général entre 2008 et 2009 a doublé passant de 10 à 20 milliards. Les recettes ont été baissées : les exonérations de cotisations patronales ont doublé de 1999 à 2007, autour de 30 milliards d’euros en 2008. Délibérément énorme : pour tuer son chien, il faut qu’il ait la rage.

Pourtant ils fixent 2,5 milliards d’économies par rapport à 2010 : passage de 35 à 30 % du taux de remboursement des médicaments en vignette bleue et réduction du périmètre de prise en charge des Affections de Longue Durée (ALD). Ainsi il y aura :

- Baisse de cinq points de la prise en charge des dispositifs médicaux ;

– Passage de 91 € à 120 € du seuil de déclenchement de la participation forfaitaire de 18 € pour les actes coûteux, en ville et à l’hôpital ;

– Instauration d’un forfait de remboursement pour les dispositifs d’autocontrôle du diabète pour les patientes non-insulinodépendances ;

– Fin de la prise en charge systématique des dépenses de transports pour les patients en ALD lorsque leur état de santé ne le justifie pas ;

– Suppression de la possibilité d’entrée en ALD pour les patients ayant une hypertension artérielle sans complication ;

- Extension de la procédure de mise sous entente préalable aux prescriptions de soins de kinésithérapie en service de soins et de réadaptation ;

Au lieu de socialiser le coût des soins, ce sont les malades eux-mêmes qui vont devoir payer 550 millions d’euros de plus, avec un transfert, peu à peu, aux organismes complémentaires. Les mutuelles et assurances privées, d’ailleurs taxées à hauteur de 3,5 %, sont appelées à se substituer, en plus cher, à ce que ne fait plus l’assurance maladie. La contribution des laboratoires pharmaceutiques (ceux qui se goinfrent avec le vaccin H1N1 ou le « Moderator ») sera 11 fois moindre que celle des assurés sociaux.

Le gouvernement veut prendre en 2011 le prétexte de la « dépendance » pour conforter le rôle du privé : Fillon fait mine de lancer une "vaste concertation nationale" sur ce thème avec des discussions "élargies à toute la protection sociale" dans le but de "fixer la part des régimes obligatoires et complémentaires et diversifier les modes de financement". Bachelot en rajoute sur ce que "pourrait être la part de l’assurance (privée) par rapport à la solidarité". Ils avancent (comme sur les retraites) contre le « monopole » de la Sécu : ce « 5° risque » serait l’occasion de remettre en cause l’obligation de cotiser à la Sécu pour permettre l’individualisation du prélèvement et le choix de l’assurance. Ce serait la concurrence libre et non faussée là aussi. Au moment où les Etats-unis essaient de mutualiser une part (limitée) de leurs énormes frais de santé, Sarkozy et Fillon, tentent le chemin inverse en France, ils veulent nous ramener au XIXe° siècle, à Cro-Magnon.

Gérard Filoche


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