Jacques Généreux à Libourne « Changer la gauche pour éviter le chaos »

mardi 25 janvier 2011.
 

Jacques Généraux donnait, samedi à Libourne, une conférence sur « La Grande Régression », titre de son dernier livre.

« L’enfant ne vient pas au monde, mais du monde. Il ne naît pas libre, mais totalement aliéné au monde qui le fait naître. » Jacques Généreux, professeur à Sciences Po Paris, secrétaire national à l’économie du Parti de gauche, a ainsi tordu le cou samedi à un certain nombre d’idées reçues, lors de la conférence donnée devant plus d’une centaine de personnes, sur « La Grande Régression », en référence à son dernier ouvrage paru aux Éditions du Seuil.

Pendant plus d’une heure et sans le moindre pense-bête, l’économiste a livré les fruits de son travail anthropologique pour mieux éclairer l’auditoire sur les contradictions de l’être humain, pris en quelque sorte entre deux feux : l’aspiration à la liberté, à l’autonomie et à l’émancipation, et son désir de créer des liens sociaux, d’exister par les autres. Jacques Généreux explique ainsi comment, au cours de ces trente dernières années, à l’inverse des sociétés primitives, traditionnelles ou modernes, la promesse d’un monde meilleur et la foi dans le progrès se sont peu à peu effacées devant l’évidence d’une régression sociale, écologique, morale et politique.

« En développant un libéralisme contraire à la nature humaine, on est arrivé au bout du bout d’un système », constate-t-il.

« Il suffit de commencer »

« Le libre-échange, le capitalisme financier, la guerre économique mondiale, les pleins pouvoirs de l’argent sécrètent des inégalités et des violences, des désordres qui entraînent le rappel à l’ordre.

L’ordre moral, le retour du religieux, du fanatisme, du totalitarisme », nous confiait le conférencier, juste avant son intervention. « Une société à la dérive commence avec du libéralisme et se termine par de la réaction. Vouloir adapter l’homme à l’évolution du monde est un non-sens génétique. C’est l’évolution du monde qu’il faut adapter à l’humain », affirme l’économiste.

Mais comment faire, comment s’en sortir ? « Il suffit de commencer, affirme simplement Jacques Généreux. « Car la crise n’a rien d’une fatalité. Il faut savoir que seulement 1,7 % des transactions financières mondiales servent à financer l’économie. Le reste ne fait que nourrir la spéculation. Il faut donc abolir le pouvoir de l’argent, reprendre le contrôle des finances, des capitaux qui jouent contre les entrepreneurs et les travailleurs. Et on n’est pas obligé pour cela d’attendre les autres.

Sans renoncer ni à l’Europe ni à l’euro, mais en usant, comme les Britanniques, des exceptions nationales, on pourrait modifier les règles du jeu et changer la donne. Et je suis sûr qu’au sein de l’Union européenne, nous ne resterions pas longtemps les seuls à engager la partie. »

Ainsi, pour éviter le chaos qui s’annonce, Jacques Généreux ne voit de salut que dans un changement d’équipe. « Il faut battre la droite dans le cadre d’une alternance démocratique. Mais, pour cela, le Parti de gauche doit grossir et peser pour faire changer la gauche, convertie, il y a quelques années, au libéralisme. »

Jean-François Harribey


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