De Tunis à Paris, indignons-nous et ouvrons une nouvelle voie à l’humanité !

dimanche 6 février 2011.
 

Tôt ou tard, ce qui devait arriver advient…Plus de trois ans après l’éclatement de la crise mondiale, les soubresauts politiques qu’elle entraîne se manifestent de façon spectaculaire. L’onde de choc de la « révolution de jasmin » en Tunisie secoue désormais de nombreux pays arabes, d’Égypte au Yémen en passant par l’Algérie. Le décor semble y avoir été dressé par le même régisseur : des régimes autocratiques, qui cherchent à légitimer leur pouvoir en organisant périodiquement des parodies d’élections, accaparent les richesses nationales au profit d’un clan ou d’une poignée d’oligarques.

Depuis longtemps, ce cocktail était explosif. La crise économique et la flambée des prix des denrées alimentaires ont allumé la mèche. Ainsi, en Égypte, le prix du pain augmente de 10% tous les mois depuis la fin 2010 et la majorité de la population a toutes les peines du monde à se nourrir convenablement. Partout, les jeunes, même diplômés, pesant dans la société d’un poids comparable aux baby-boomers européens des années 60, sont réduits au chômage ou à la déqualification professionnelle. Car la croissance, bien réelle (4% en Tunisie en 2010), ne profite qu’à la minorité opulente au lieu de servir de tremplin à d’ambitieux projets de développement. « L’Occident pris de court par les révoltes arabes », titre le Monde dans son édition du 28 janvier. Passons sur la nullité unanimement reconnue de la baronne Catherine Ashton, haute représentante ( !) pour les affaires étrangères de l’Union Européenne.

Attardons-nous un instant sur la France. Son ambassadeur à Tunis n’a rien vu venir, rien entendu du vacarme de la rue. Sa ministre de tutelle s’est ensuite couverte de ridicule en proposant le savoir-faire répressif hexagonal au gouvernement Ben Ali (en France, on n’a pas de pétrole mais on a des CRS !). Quant à Sarkozy, il reconnaît n’ « avoir pas pris la juste mesure de la désespérance et de la souffrance » de la population. Rien d’étonnant à cela, puisqu’il ne veut rien savoir de celles du peuple français, qui ne s’est pourtant pas privé, l’automne dernier, de se rappeler à son bon souvenir !

Cependant, Washington reste à la manoeuvre. Chef d’état-major de l’armée tunisienne, le général Rachid Ammar a été contacté au plus fort des émeutes par le général William Ward, commandant des forces américaines pour la région Afrique, qui l’a enjoint de ne pas tirer sur la foule malgré les ordres de Ben Ali. Le retournement des militaires a précipité le départ du dictateur. Aujourd’hui, c’est le contrôle du processus politique par l’armée, étroitement conseillée par la Maison Blanche, qui explique qu’il y ait plus de jasmin que de révolution dans l’ancienne Carthage…Les États-Unis pourraient être tentés, à la faveur des évènements, de remodeler/moderniser le « grand Moyen Orient » comme ils en affichent l’intention depuis la présidence de Bush. Mais le jeu du pêcheur en eaux troubles est souvent incertain.

Quoi qu’il en soit, le peuple tunisien vient de donner une formidable leçon au monde entier. D’abord en faisant la preuve qu’il n’y a pas de fatalité, que la réputation de résignation indolente associée à l’Orient relève du mythe néo-colonial. L’exigence de dignité exprimée à Tunis – pouvoir s’exprimer, se nourrir, se loger, travailler…- s’inscrit dans le mouvement universel amorcé par la Révolution française et poursuivi par le combat du mouvement ouvrier international. Autre leçon : le monde est inévitablement appelé à changer suite à la crise dans laquelle le capitalisme financier l’a plongé. En Europe, la résistance aux politiques d’austérité imposées par l’UE et le FMI est vivace et sa traduction politique surviendra tôt ou tard. De Tunis à Paris, indignons-nous et ouvrons une nouvelle voie à l’humanité !


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