Libye : le Conseil de sécurité a voté une zone d’exclusion aérienne (4 articles)

samedi 26 mars 2011.
 

4) COMMUNIQUE LIGUE DES DROITS DE L’HOMME - LIBYE

Enfin ! Pour des mesures efficaces de solidarité avec le peuple libyen

Il était temps. Le peuple libyen, soulevé contre son dictateur, est menacé des pires représailles par un régime barbare disposant d’importants moyens militaires. La partie du pays, contrôlée par les opposants mal équipés, risque d’être reprise par ses armées au prix d’un massacre terrible. Pendant plusieurs semaines, les Etats arabes, ceux d’Europe et les grandes puissances qui ont armé le régime de Mouammar Kadhafi ont regardé en spectateurs les préparatifs de ce massacre sans prendre aucune mesure effective pour aider le peuple libyen. Le Président français s’est contenté de quelques effets d’annonce pour tenter de faire oublier ses actes passés.

Le vote du Conseil de sécurité des Nations unies, dans la nuit du 17 au 18 mars, laisse espérer dans l’attitude de la communauté internationale un changement historique. Les Nations unies, écartant une intervention terrestre dont l’invasion de l’Irak par les troupes de l’Otan a montré les effets néfastes, ont enfin réagi. Elles se sont souvenues que la fondation de l’Onu repose sur le refus du principe qui avait causé la perte de la Société des nations (SDN) selon lequel, comme l’avaient dit les dirigeants de l’Allemagne nazie, « charbonnier est maître chez soi », la souveraineté d’Etats, même barbares, ne doit jamais connaître de limite. Les Nations unies se sont souvenues de ce que les principes universels des droits de l’Homme peuvent prendre le pas sur celui de la souveraineté des Etats, et imposent à la communauté internationale la responsabilité d’y intervenir sur la base du droit international.

La Ligue des droits de l’Homme s’en réjouit. Tout en sachant que seule la mobilisation des opinions publiques en faveur de la solidarité avec le peuple libyen pourra obliger les Etats à mettre en œuvre effectivement des mesures efficaces.

3) Aubry, Mélenchon, Cohn-Bendit et Villepin ont soutenu, hier, la position défendue par la diplomatie française.

Une intervention militaire internationale en Libye va-t-elle provoquer un retour de l’union sacrée ?

A quelques heures du vote du Conseil de sécurité de l’ONU sur une « zone d’exclusion aérienne », position soutenue par la diplomatie française, l’opposition de gauche semblait se ranger derrière le gouvernement.

Ainsi, Martine Aubry, en visite hier dans le Val-d’Oise, s’est-elle longuement exprimée pour dire sa « honte pour l’Europe » et « pour les organisations internationales » de n’avoir pas réussi à s’accorder sur une solution. « Je suis désolée de ce coup de gueule, mais j’y pense jour et nuit, je suis choquée, a ajouté la première secrétaire du Parti socialiste. On a été infoutus d’être au rendez-vous d’un peuple qui est martyrisé et qui le sera encore plus par l’incapacité des puissants de ce monde à se mettre d’accord. » Faisant le parallèle avec la guerre d’Espagne, Aubry a rappelé que le PS avait, « dès le 27 février », demandé la mise en place d’une zone d’exclusion aérienne.

Ces déclarations passionnées tranchent avec son attitude passée. Jusqu’à présent, la patronne du PS avait eu un discours très technique vis-à-vis de la Libye, et s’en était surtout servi pour critiquer le gouvernement. Fin février, juste après le remaniement, elle fustigeait le « naufrage de la diplomatie française ». Il y a une semaine, elle expliquait encore à Nicolas Sarkozy que « l’on ne règle pas les problèmes avec des coups de menton » et qu’« on est un grand président quand on arrive à convaincre les autres ». Hier, elle avait rangé ses critiques, en se gardant bien de tout soutien appuyé.

Cette approbation a minima se retrouve d’ailleurs chez d’autres responsables politiques, habituellement opposés à Sarkozy. Dominique de Villepin a ainsi été reçu deux fois à l’Elysée ces dernières semaines pour évoquer la Libye. Et l’ancien ministre des Affaires étrangères, qui avait fait sensation par son discours à l’ONU contre la guerre en Irak en 2003, en est ressorti en se disant favorable à une « initiative concertée » de la France. « J’ai une conviction, nous ne pouvons laisser faire, a assuré le meilleur ennemi à droite du Président. Nous devons concentrer nos efforts sur Benghazi pour empêcher un bain de sang - que ce soit par un brouillage immédiat des communications, une zone d’exclusion aérienne ou la définition de zones humanitaires. »

Dans le même camp, on trouve Jean-Luc Mélenchon. Le leader du Parti de gauche a voté au Parlement européen la résolution présentée par les socialistes et la droite incitant les « gouvernements de l’UE » à se « tenir prêts pour une décision du Conseil de sécurité des Nations unies concernant [...] la possibilité d’une zone d’exclusion aérienne ». Le leader du Parti de gauche s’en est longuement expliqué sur son blog. Tout en se disant conscient des risques « d’escalade militaire », il dit avoir pris sa décision, après discussion avec la direction du PCF. Et ajoute : « J’ai voté pour le texte et les mesures proposées concernant l’espace aérien dans le but d’aider le peuple en action contre le tyran qui le bombarde. Mon vote s’entend dans le strict cadre suivant : tout acte de guerre comme la création d’une zone d’exclusion aérienne ne peut être décidé que par l’ONU. »

Parmi les signataires du texte se trouvait, sans surprise, Daniel Cohn-Bendit. Le député d’Europe Ecologie plaidait, dès la fin février, pour une « intervention immédiate de l’ONU et, si nécessaire, une aide de l’Otan, avec notamment des forces turques et égyptiennes ». Pour briser ce concert de va-t-en- guerre, il fallait se tourner vers le Front national. Interrogée hier sur France 24, Marine Le Pen s’opposait frontalement à toute solution militaire : « Faire la guerre à la Libye ? Moi, je crois que c’est un très mauvais choix. » Et d’ajouter que, sur le coup, Nicolas Sarkozy a tort car « la responsabilité d’un président de la République, c’est de penser d’abord à l’intérêt du peuple français et à l’intérêt de la France ». Marine Le Pen a d’ailleurs une solution de rechange : laisser les pays arabes s’occuper de la situation car, « dans le cadre des bassins civilisationnels, c’est à eux d’intervenir ».

NICOLAS CORI

2) Après le vote sur la Libye : c’est inespéré, l’ONU fonctionne

Source :

http://www.rue89.com

Un événement majeur a eu lieu, ce jeudi.

L’ONU fonctionne.

Le Conseil de sécurité de l’ONU a décidé à 10 contre 5 d’utiliser « toutes les mesures nécessaires » pour empêcher le dictateur-fou de Libye de reprendre le contrôle de l’entièreté de son pays.

Évidemment, c’est très tard. Évidemment, il aurait fallu que la communauté internationale cloue l’aviation de Khadafi au sol dès qu’elle a tiré sur la foule, aux premiers jours de la rébeillon. Évidemment, il sera beaucoup plus difficile de refouler les troupes (et mercenaires) pro-Khadafi aujourd’hui que si l’ONU avait agi il y a trois semaines.

Tout de même, le vote est majeur.

Pas de véto.

La Chine et la Russie, représentants de l’autocratie au sein du Conseil de sécurité, donc défenseurs du droit des États de réprimer tranquille, n’ont pas utilisé leurs vétos pour empêcher l’adoption de la résolution, comme ce fut le cas dans des situations similaires précédentes ;

Le rôle de la Ligue arabe.

Évidemment, la décision de la Ligue Arabe, samedi dernier, de faire appel à la communauté internationale pour sévir contre l’un des leurs a pavé la voie à cette décision majeure ;

Le réveil de l’administration Obama.

Le réveil, tardif mais salutaire, de l’administration Obama qui a, dans les dernières heures, décidé de peser de tout son poids en faveur d’une intervention anti-Khadafi (contre le vœu du Pentagone), indique que Washington a finalement choisi l’audace, plutôt que l’hésitation ;

Le bonheur de Benghazi.

Dans les rues de Benghazi, dernier bastion de l’opposition libyenne, la décision de l’ONU a été accueillie avec un bonheur égal à la crainte d’être abandonnés, et massacrés, qui l’avait précédé.

La position de la France

Signalons aussi, dans les derniers 24 heures, la position courageuse prise par la France, notamment le ministre des Affaires étrangères Alain Juppé, affirmant avant ce mardi dans un billet de son blogue intitulé Notre honneur :

« Il ne suffit pas de proclamer, comme l’ont fait à peu près toutes les grandes démocraties, que “Kadhafi doit partir”. Il faut se donner les moyens d’aider efficacement ceux qui ont pris les armes contre sa dictature.[…]

Seule la menace de l’emploi de la force peut arrêter Kadhafi. […]

La participation arabe.

L’essentiel, dans les frappes qui devraient commencer dans les heures qui viennent, est la participation de plusieurs pays arabes dans cette coalition, en plus de la France, des la Grande-Bretagne et, bien sûr, des États-Unis dont la marine s’est positionnée ces derniers jours en Méditerrannée.

Juppé affirmait mercredi que plusieurs pays arabes avaient confirmé leur participation.

La pousuite du Printemps arabe.

Cette décision, et l’intervention militaire qui s’ouvre, est essentielle dans le Printemps arabe en cours. En effet, après les succès des démocrates en Tunisie, puis en Égypte, la capacité du dictateur Khadafi d’écraser la rébellion dans son pays avait pour effet de mettre un cran d’arrêt à l’espoir de renouveau.

L’appui de l’Europe, de pays arabes et de la communauté internationale aux rebelles libyens à l’heure même où ils sont acculés à leur dernier quartier envoie au contraire le signal à la rue arabe que l’histoire est avec eux, que le monde est avec eux, que la route est ouverte.

La décision signale aussi aux dictateurs restants qu’il ne leur suffira pas d’utiliser leur police et leur armée pour réprimer leurs peuples. La situation internationale a changé. Le risque d’une intervention étrangère à l’appui des rebelles devient - évidemment nullement automatique et toujours problématique - mais désormais dans l’univers du possible.

Bref, l’ONU fonctionne. C’est une extraordinaire nouvelle pour les rebelles de Benghazi, une extraordinaire nouvelle pour le Printemps arabe, une extraordinaire nouvelle pour chacun de nous.

Par Jean-François Lisée

1) La Libye en débat au parlement européen (par Jean-Luc Mélenchon)


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