Les risques de la retraite par capitalisation : l’exemple des Pays-Bas

mercredi 25 mai 2011.
 

En attaquant notre système de retraite, le MEDEF et le gouvernement veulent se voir se mettre en place un système à plusieurs vitesses : une retraite par répartition réduite à un niveau de survie, et inciter ceux qui le peuvent à mettre leurs économies dans des fonds de pension pour espérer garder un niveau de vie décent lors de leur cessation d’activité.

Pourtant là où ils sont mis en application, les systèmes de retraite par capitalisation ont fait la preuve de leur incapacité à apporter aux cotisants la sécurité de revenu espérée.

Les travailleurs hollandais en font l’amère expérience.

Aux Pays-Bas, les syndicats, après avoir refusé l’allongement de l’âge à la retraite du système de base, par répartition, viennent de signer l’accord retardant progressivement l’âge du départ de 65 à 67 ans. A côté de cette retraite universelle, versée à tous les résidents, les salariés cotisent presque tous, de manière obligatoire, à des fonds de pension de branche ou d’entreprise, fonds gérés paritairement le plus souvent.

Ces fonds garantissaient 70% du dernier salaire jusque dans les années 90, puis les retraites ont été calculées sur l’ensemble de la carrière. La loi a posé le principe d’une indexation de la pension versée sur les salaires, mais cette indexation est conditionnée par la rentabilité du fonds, définie par un "taux de solvabilité". Si les réserves du fonds de pension tombent en dessous d’un certain niveau, l’indexation des pensions est totalement suspendue et les fonds doivent proposer un plan de rétablissement de la situation en trois ans. Pour déterminer le taux de solvabilité, les gestionnaires des fonds de pension font des prévisions à long terme de leurs actifs et passifs appuyés sur des paramètres de valorisation économiques et financiers fixés par un décret traçant le cadre du contrôle financier exercé par la Banque centrale des Pays-Bas. Pour revenir à l’équilibre, les fonds doivent choisir entre le maintien du blocage de l’indexation ou l’augmentation de la cotisation. La loi prévoit même qu’ils peuvent baisser le montant nominal de la retraite.

Au cours des années 1990, les fonds les fonds de pension étaient passés à une gestion en actions plus risquée mais plus rémunératrice, en réduisant leurs placements obligataires pour profiter de la valorisation boursière de la bulle Internet. Lors de l’éclatement de cette bulle en 2002, il a fallu renflouer les fonds de pension, soit par injection de liquidités par les entreprises, soit par augmentation de la cotisation pour les fonds de branches. Entre 2001 et 2004, le montant des cotisations a ainsi augmenté entre 40% et 50%.

En 2008, le taux de solvabilité de ces fonds a connu une chute brutale. Le soutien du gouvernement s’est limité à passer à cinq ans, au lieu des trois prévus par la loi, du délai pour rétablir la situation. Pour la première fois, il est envisagé de recourir à la baisse du montant des pensions.

Les entreprises profitent des circonstance pour mettre en avant un partage égal des risques financiers entre les entreprises et les salariés et une limitation des garanties collectives de retraite offertes en termes réels aux salariés, avec plus de marge pour les choix individuels.

Les syndicats salariés sont amenés à faire des concessions, d’où cet accord de juin 2010 repoussant l’âge du départ pour la retraite universelle par répartition. "« Pour les organisations syndicales,rester seuls maîtres à bord des fonds de pension professionnels avec les organisations patronales est une question non négociable, les retraites professionnelles faisant partie intégrante des conditions d’emploi à négocier avec les employeurs. Elles préfèrent prendre elles-mêmes les mesures nécessaires plutôt que de se les voir imposer par le gouvernement." Cette position des syndicats passe tout de même plutôt mal à la base. Une consultation a été organisée à propos de cet accord qui l’a approuvé à 80% ; mais seuls 85% des syndiqués ont pris part au vote.

En avril 2011, les désaccords persistent entre certains syndicats nationaux et leur fédération. Ils veulent que celle-ci se retire de négociations qui s’apparentent à un piège tendu par le gouvernement, les employeurs et les assureurs. L’âge du départ à la retraite est toujours en question. Les syndicats déplorent le projet du gouvernement de réduire les abattements fiscaux sur les primes de retraite, comme celui de lier les augmentations de la pension aux mouvements de la bourse.

(1) Pays-Bas : Les partenaires sociaux tentent de reprendre la main sur les retraites

Marie WIERINK Chronique internationale de l’IRES - 126 - septembre 2010

Sur le site de l’UL CGT du Havre


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