Le revenu de solidarité active a abouti 
à une baisse de ressources des plus pauvres

mercredi 22 juin 2011.
 

Mesure phare du gouvernement, la loi généralisant le revenu de solidarité active entrait en vigueur il y a deux ans. Le RSA devait permettre à la fois de réduire le nombre de travailleurs pauvres ou d’améliorer leur situation en leur fournissant un complément de revenu et inciter les allocataires de minima sociaux à accepter des emplois. La gauche, qui aspire à revenir au pouvoir en 2012, se doit de tirer un premier bilan.

Pour les bénéficiaires du « RSA socle » (celui qui remplace le RMI) et « du RSA majoré » (qui remplace l’API), rien n’a changé. Pour les bénéficiaires du « RSA activité », la situation ne change guère durant la première année car le cumul RMI et revenu d’activité était déjà possible depuis 1992. Au-delà de douze mois cela peut en effet représenter une petite amélioration financière pour eux. Mais cela signifie également qu’il ne s’agit plus d’accompagner des situations transitoires et de soutenir des trajectoires d’insertion. La collectivité reconnaît que les salaires sont trop faibles et accepte de payer un complément de salaire à la place de l’employeur et favorise ainsi l’emploi précaire. Pour l’essentiel des bénéficiaires, cela se traduit au total par une baisse de ressource en raison de la perte des droits connexes.

Les droits connexes sont ces droits qui découlaient du statut d’érémiste. Être au RMI ouvrait un droit automatique à la CMU pendant un an et ce droit conditionnait l’ouverture à d’autres prestations. Ce statut donnait également droit à une aide au logement au taux maximal, à une exonération de la taxe d’habitation et à la prime de Noël. Aujourd’hui, ceux qui perçoivent le RSA activité doivent remplir les conditions classiques de ressources. Ainsi, alors que le RSA devait permettre une augmentation des ressources pour les personnes qui travaillent, il semble, au contraire, qu’il y ait en fait très souvent une baisse.

De plus, aujourd’hui, on travaille moins à l’insertion qu’on ne le faisait auparavant. Avant 2004, l’État versait le revenu minimum et l’insertion incombait aux conseils généraux, qui étaient tenus de consacrer à l’insertion l’équivalent de 17% des sommes versées au titre du revenu minimum. Depuis le transfert du RMI aux départements, cette obligation légale n’existe plus. Et la part consacrée à l’insertion se réduit considérablement en raison du poids financier de l’allocation dans
un contexte où l’État ne compense pas ses transferts à la hauteur des besoins et où la demande sociale croît avec la crise. On ne voit pas bien comment les départements pourraient faire mieux aujourd’hui avec moins
de moyens.

Il ne faudrait pas que l’« échec » du dispositif incombe aux seuls allocataires et aux travailleurs sociaux. Il n’y a pas assez d’emplois pour que tous ceux qui le souhaitent puissent travailler. Le RSA n’est pas un stock de pauvres gens. Dans leur grande majorité, ce sont des chômeurs en fin de droits, qui ne demandent qu’à vivre dignement de leur activité, mais auxquels aucun contrat n’est proposé. Ils n’ont pas de problème d’emploi ou d’employabilité, mais des problèmes de logement, de santé, qu’ils régleraient s’ils avaient un travail. Si les institutions ont leur part de responsabilité dans les difficultés à réinsérer les personnes, n’oublions pas celles des entreprises. Ce sont bien elles qui licencient  !

Le RSA ne peut être efficace qu’à condition que l’on accepte l’idée que l’obstacle à la reprise d’emploi est moins d’ordre monétaire, mais d’abord lié à des problèmes de santé, d’autonomie, de handicap, de contrainte familiale (mode de garde notamment) ou de fragilités diverses. Il faut également accepter que, pour certaines personnes, il est illusoire de penser qu’elles puissent, aujourd’hui, retourner sur un marché du travail, dont les exigences de compétitivité engendrent une pression avec des conséquences dramatiques que l’actualité nous rappelle régulièrement.

Enfin, à l’opposé de la proposition de
Laurent Wauquiez, chacun doit pouvoir bénéficier de l’assistance de la collectivité, même s’il ne peut rien donner en contrepartie. Dans notre pays qui est encore parmi les plus grandes puissances économiques du monde, le principe du maintien d’un petit rempart contre la grande misère, sans conditions, n’est-il pas d’abord une obligation morale  ?

Barbara Romagnan


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