Mélenchon Place Stalingrad : lorsque les tribuns parlent pour le peuple, ça tonne (article de Marianne)

lundi 25 juillet 2011.
 

Les orateurs sont assez rares dans la vie politique française. Il y eut, en 2002, Jean-Marie Le Pen et son style ampoulé, puis, en 2007, François Bayrou dans le genre pédagogue.

2012 pourrait être l’année de Jean-Luc Mélenchon. Le candidat du Front de gauche a fait, place de Stalingrad, à Paris, le 29 juin, une démonstration époustouflante.

Monté sur l’estrade, le député européen explose le micro avec sa voix grave. Il n’a pas de discours écrit. Juste un plan qu’il consulte, mais les mots s’enchaînent les uns aux autres et font sens. Quel homme politique ose encore ouvrir un meeting en criant d’un seul élan : "La saison des tempêtes est revenue dans l’histoire, et, dès lors, il nous revient d’être les coeurs fermes et déterminés qui sauront proposer les ruptures nécessaires pour tourner la page de cet ordre absurde qui plonge l’humanité dans le chaos" ? Reprenez votre souffle...

Le discours est truffé de références, souvent obscures pour le commun des mortels. Qui sait encore que lorsqu’il dit "les mauvais jours finiront", il emprunte à une chanson postcommunarde qui se poursuit ainsi : "Et gare à la revanche, lorsque les pauvres s’y mettront !" Que lorsqu’il critique ceux qui "font leur petite popote sur leur petit feu", c’est de Gaulle qu’il pille, et avec l’accent du Général, s’il vous plaît. "Méluche", qui dit s’inspirer de François Mitterrand, de Pierre Mauroy ou de Malraux devant le Panthéon, n’en a cure : "Quand je dis : "La France, la belle, la rebelle", tout le monde ne reconnaît pas Jean Ferrat. Mais c’est littéraire et poétique, et c’est beau, même entendu au premier degré. C’est la force du discours de parler en même temps au coeur et à l’esprit."

Ce soir-là, la magie du verbe a fonctionné. Les milliers de militants et sympathisants étaient ravis, au sens premier du terme. Les vieux trotskistes et les anciens communistes, composantes du Front de gauche étaient (re)pris de l’enthousiasme de leurs 20 ans. "Il me rappelle Jacques Duclos, qui fut candidat du PCF en 1969", s’émouvait un ex-coco. Par sûr que l’orateur de l’année parvienne à faire 20 % à son tour, tellement l’art oratoire a été minoré par les talk-shows télévisés. Mais il faut toujours se méfier du retour des tribuns : lorsqu’ils parlent pour le peuple, ça tonne.

Hervé Nathan


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