La vraie origine de la dette publique : les baisses d’impôts

mardi 21 juin 2016.
 

Moins d’impôts. Ce slogan était assorti d’une promesse : c’était bon pour l’économie. Mais à force de cadeaux aux entreprises et aux plus riches, les dirigeants de droite ou sociaux-libéraux ont vidé les caisses et créés de la dette : 700 milliards d’euros de plus en France en 10 ans !

Pourquoi on doit refuser de payer leur dette

Depuis 2007, les dettes publiques de la zone euro ont grossi sous l’effet de la récession. Le ralentissement de l’activité économique a fait baisser les rentrées fiscales, les mesures de relance d’abord mises en place ont parallèlement augmenté les dépenses publiques, d’où des déficits publics qui se sont ajoutés à l’endettement antérieur. Elles ont gonflé aussi parce que les États ont dû renflouer les banques. C’est le cas tout particulièrement de l’irlandais de l’Espagne, où les dettes publiques sont passées respectivement de 25 % et 36,2 % du PIB en 2007 à 79,7 % et 62,3 % en 2010. Deux pays encensés jusque-là par la Commission européenne pour leur rigueur en matière de gestion de leurs finances publiques, dont les gouvernements avaient décidé de la jouer « à l’américaine », laissant banques et entreprises s’enfoncer toujours plus dans le crédit facile et la spéculation immobilière – sans que la Banque centrale européenne, soi-disant si vigoureuse, alerte sur les dangers encourus. Quand les prix de l’immobilier se sont effondrés et que les impayés se sont accumulés, les banques, au bord de la faillite, ont appelé les États à l’aide. Les dettes privées sont devenues des dettes publiques. En deux ans, l’État – donc les contribuables – irlandais a dû débourser 29,3 milliards d’euros pour renflouer rien que l’Anglo Irish Bank, 46 milliards pour l’ensemble du système bancaire et 24 nouveaux milliards seraient nécessaires cette année, ce qui porterait la facture à une somme équivalant à 45 % du PIB (somme des richesses créées dans le pays en un an). En Espagne, l’État a dû débloquer 9 milliards d’euros pour sauver des caisses d’épargne, puisque 30 milliards d’euros pour un fonds de restructuration des banques en déconfiture.

Avant même qu’ils puisent dans l’argent public pour sauver les banques, une partie des États de la zone euro avaient déjà un niveau d’endettement relativement élevé. Pourquoi ? Parce que le l’Union européenne s’est bâtie sur un credo – celui du libéralisme – et sur la volonté de baisser les impôts, censés être un frein à la bonne marche des affaires. Ces baisses d’impôts au profit des entreprises et des plus riches, orchestrées par les gouvernements, qu’ils soient de droite ou sociaux-démocrates, ont privé les caisses des États de sommes considérables. En France (1), les petits cadeaux cumulés sur la dernière décennie ont fini par faire perdre 101 à 119 milliards d’euros par an au budget de l’État (10 milliards d’euros d’allégements de l’impôt sur les sociétés, 40 milliards d’allégements de l’impôt sur le revenu, 27 milliards d’euros de transferts à la Sécurité sociale pour compenser les allégements de cotisations sociales...).

Avec cet argent dans les caisses, il ne resterait pas grand chose du déficit de l’État en 2010 (148 milliards d’euros). Et le poids de la dette serait inférieur de 20 points de PIB, elle dépasserait donc à peine les fameux 60 % imposés par le pacte de stabilité de la zone euro ! En Grèce, l’État perd chaque année 20 milliards d’euros du fait de la fraude fiscale, soit l’équivalent de son déficit public soi-disant abyssal. Qui fraude ? On peut en avoir une petite idée en constatant que, en 2008, le revenu annuel moyen déclaré au fisc par les professions libérales était à peine supérieur à 10 000 euros, celui des banquiers et des hommes d’affaires tout juste au-dessus de 13 000 euros ! Quant aux armateurs, la Constitution elle-même organise leur statut fiscal et les met à l’abri de tout contrôle sur leurs comptes, au nom bien sûr de la lutte contre les délocalisations !

Dominique Sicot

(source L’Humanité Dimanche)


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