Sondage Harris interactive : un choix idéologique repeint en vérité "scientifique" par le recours aux fétiches et grigris

samedi 24 septembre 2011.
 

Si je manquais de raison de me méfier de l’impact des sondages sur les meilleures têtes, il me suffirait de lire les commentaires de mon propre blog. Celui-ci, celle-là, pourtant ouvertement positionnés dans l’extrême gauche critique, se sentent obligés de détecter ce qui est « sans doute vrai » dans le sondage que je combattais. Je n’entre pas dans l’incohérence des argumentations bâties sur l’idée d’une vérité « relative ». Ni sur le fait que ces commentaires font comme si trois lignes plus loin je n’avais pas mentionné des sondages disant le contraire de celui-ci. Ni sur l’argument central de mon argumentation bâtie sur le fait qu’une méthode d’investigation réputée scientifique ne pouvait avoir deux conclusions contradictoires. Une telle crédulité me désole, bien sûr. Mais cela marque cependant tellement bien la force d’injonction de ces soit disant « résultats ».

Je suis davantage peiné par l’extrême docilité des rédacteurs du « Parisien » qui acceptent, sans aucune vérification, ce qui leur est dit du moment que c’est un sondeur qui le leur dit et qu’ils ont payé pour l’entendre. Nous avons donc fait le travail de vérification de leur source que ces deux rédacteurs du « Parisien » n’ont pas fait. En commençant par le plus simple. Aller voir la notice que le sondeur, a l’obligation légale de déposer à la Commission des Sondages. S’il l’avait fait « Le Parisien » aurait été en droit d’exiger de son fournisseur les explications que celui-ci doit aux citoyens et dont il se dispense comme on va le voir en détail. Car il ne l’a pas fait. Ce n’est pas le pire. Un journal écrit et publie bien sur ce qu’il veut, même si Albert camus, journaliste engagé, a bien dit que la force de l’engagement n’empêche pas le gout de la vérité.

On est en droit d’attendre autre chose et plus de rigueur de la « Commission des sondages ». Car c’est son rôle officiel de protéger les citoyens contre la désinformation qui résulterait d’usages inacceptables de la liberté de sonder. La loi n’est pas très contraignante, on le sait. Et toute tentative pour la rendre plus regardante est combattue par un lobbying d’une admirable d’efficacité. Car c’est ce travail d’influence, purement intellectuelle bien entendu, qui a permis à la loi pourtant adoptée à l’unanimité au Sénat d’être enterrée à l’assemblée nationale. Mais si une telle alerte en suspicion existe, la Commission des Sondages ne devrait-elle pas être spécialement sourcilleuse dans l’application de la loi telle qu’elle est aujourd’hui ? La loi ne marque-t-elle pas quelle importance elle attache à cette protection en punissant de 75 000 euros ceux qui ne la respecteraient pas ? Pourtant ce minimum n’est pas respecté dans le cas du sondage réalisé par « Harris interactive » pourtant publié, sans aucune précaution ni vérification, par le journal « Le Parisien ». Donc nous avons commencé le travail que j’avais annoncé dans ma précédente note. En commençant par le plus simple. Aller regarder la notice que la loi impose de déposer pour chaque sondage. La notice transmise par Harris Interactive à la Commission des Sondages la veille de la publication du sondage du 7 septembre dans le journal « Le Parisien » peut être consultée. C’est la loi. Encore faut-il la demander. Mon avocate, Raquel Garrido, s’est donc rapprochée de la Commission pour l’obtenir. Cette notice lui a été remise, bien entendu.

C’est une lecture accablante pour le sondeur, mais édifiante pour le citoyen confiant et le lecteur du « Parisien » crédule. En effet, on n’y trouve presque aucune des mentions obligatoires prévues par la Loi. Commençons par le commencement de ces obligations légales. L’objet du sondage. Il doit figurer dans la notice. Il n’y a rien sur le sujet. Bon, soyons indulgent ! On va considérer que c’est évident : il s’agit des intentions de vote pour le premier tour de l’élection présidentielle de 2012. Avec cette nuance, qui mérite d’être soulignée, mais qu’on aimerait pouvoir lire dans cette notice : si cette élection avait lieu dimanche prochain. Soyons généreux, oublions ce détail qui biaise pourtant lourdement la sincérité des questions s’il n’a pas été précisé. Laissons tomber pour cette fois-ci. Voyons le reste ! On devrait pouvoir trouver dans la notice « la méthode selon laquelle les personnes interrogées ont été choisies ». C’est intéressant, en effet. Va-t-on lire que ce bon « Harris interactive » a fait du racolage sur internet ? Nenni. Une formule creuse à souhait et voilà la « Commission des Sondages » semble avoir été aussitôt rassurée. Voici la réponse fournie par « Harris Interactive » dans sa notice : « à partir de l’Access panel Harris Interactive ». Passez muscade ! « L’accès panel », bon sang mais c’est bien sûr ! Vous n’en saurez pas davantage. Autre exigence de la loi : indiquer le « Choix et composition de l’échantillon » Oui, ça aussi c’est très utile à savoir. Voici la réponse : « ventilation par sexe, âge, CSP et région d’habitation ». Rien de plus. Ni sur la « ventilation » elle-même ni sur le dosage des échantillons. La « Commission des Sondages » semble s’en contenter, apparemment.

Autre obligation qui permet ici une révélation. Le sondeur doit préciser « les conditions dans lesquelles il a été procédé aux interrogations ». Là, il y a une réponse claire : « en ligne ». Ah bon ? On croyait que c’était du bon vieux téléphone ! Non. C’est du « en ligne » ! Certes c’était indiqué dans « Le Parisien ». Je précise donc ce que cela veut dire. Le panel est constitué de gens qui s’inscrivent par internet pour faire partie de « l’Access panel Harris interactive » et qui reçoivent des cadeaux pour répondre ! Aucune garantie de sérieux. Nous le savons d’autant mieux que nos amis s’inscrivent en ligne, à tout bout de champ, et sous diverses identités professionnelles, ici et là, à ce qu’on m’a dit, juste histoire de s’amuser. Revenons aux déclarations obligatoires de la notice que devait donner « Harris interactive », cette entreprise sondagière aux méthodes si spéciales et le journal « Le parisien » qui vous sert ces salades. La loi prévoit que soit publié « le texte intégral des questions posées ». Alors, ici ? Rien. Rien ne figure dans la notice à ce sujet. Le lecteur du journal « Le Parisien » n’a donc plus qu’à croire sur parole que c’est bien ce qui est écrit dans le journal qui est vrai. Dommage qu’il y ait déjà un mensonge publié à propos de la méthode d’enquête « en ligne » et non "par téléphone" ! De plus, la loi prévoit que soit précisée "la proportion des personnes n’ayant pas répondu à chacune des questions". Ne cherchez pas : il n’y a rien dans la notice. Rien de chez rien, à ce sujet non plus. Osera-t-on faire encore remarquer qu’il est obligatoire de faire connaitre « les limites d’interprétation des résultats publiés » ? Pas la peine. Il n’y a rien de ce genre dans la notice de « Harris interactive ». Les divagations du commentateur et le copié-collé des »rédacteurs de l’article sont donc à croire sur parole quoique fondée sur des données inconnues. C’est beau l’éthique ! Pour finir notons que l’obligation est aussi faite, « S’il y a lieu » d’indiquer la méthode utilisée pour en déduire les résultats de caractère indirect qui seraient publiés ». Eh ! Eh ! Bonne pioche. Harris interactive et « Le Parisien » auraient du dire sur quelle base ils ont fait leur déduction à propos de la distance que marqueraient les électeurs par rapport à mon volontarisme « faire payer les riches ». Et bien ? Pouic ! Rien du tout. On ne saura jamais d’où sort cette affirmation ni comment elle est déduite des bidonnages que cachent les divers silences et commission de la notice officielle de « Harris interactive » déposée à la Commission des Sondages ! C’était donc bien un simple slogan politique. Juste l’expression d’un choix idéologique repeint en vérité "scientifique" par le recours aux fétiches et grigris d’Harris interactive.


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