Jean-Luc Mélenchon refuse l’" austérité de gauche " (Article Le Monde)

samedi 3 décembre 2011.
 

Polariser le débat " face à la droite, mais surtout face à un candidat du Parti socialiste accusé de vouloir pratiquer une " austérité de gauche ", telle est la stratégie de Jean-Luc Mélenchon dans le débat sur les finances publiques et la politique économique. Le candidat du Front de gauche devait développer ses arguments lors d’un meeting à Talence (Gironde), jeudi 1er décembre, quelques heures après le discours de Nicolas Sarkozy à Toulon.

" Jeudi, c’est le triste deuxième anniversaire de l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, celui d’un désastre dont les responsables sont toujours en place ", souligne M. Mélenchon. Partisan du non au référendum de 2005, l’eurodéputé juge que ce traité, dont il souhaite s’affranchir, est " la cause du dérèglement absolu en Europe ".

" Cela fait trois ans que nous disons que l’austérité n’est jamais une solution à une crise économique et à une crise de surendettement, car elle ne fait qu’aggraver les choses ", martèle l’économiste Jacques Généreux, proche de M. Mélenchon. Pour sortir de la crise, explique ce dernier, il faut " mettre au pas immédiatement la finance et rendre le financement des dettes publiques indépendant des pressions des marchés financiers ".

Le programme économique de M. Mélenchon a été élaboré avec une équipe dont font partie, outre M. Généreux, Pierre Khalfa, coprésident de la Fondation Copernic, Frédéric Boccara (PCF) et Jean- Marie Harribey (Attac). Outre l’interdiction des licenciements boursiers, le Front de gauche prône le smic à 1 700 euros brut et un salaire maximum pour toutes les entreprises. Il prévoit une " planification écologique ", qui passe par des investissements " massifs " dans des secteurs tels que les énergies nouvelles et la recherche. Une politique de crédit à destination des PME sera mise en place, ajoute M. Généreux, ainsi qu’un " pôle public bancaire ", qui " financera de manière prioritaire, à taux réduit, les investissements dans les entreprises, avec des conditions d’emploi et de normes écologiques ".

" On sait où trouver l’argent " La relance prônée par le Front de gauche passe aussi par l’arrêt de la réduction du nombre de fonctionnaires et le développement des emplois publics dans la justice, les hôpitaux et l’éducation nationale. Le tout serait financé par une " nouvelle fiscalité ", avec la suppression de niches fiscales " inutiles ", l’augmentation de l’impôt sur la fortune et une réforme de l’impôt sur le revenu, afin de le rendre plus progressif. " On sait où trouver l’argent, il ne reste qu’à affiner les priorités ", affirme M. Généreux.

Et qu’on ne leur dise pas que leurs solutions sont irréalistes ! " Ce sont des propositions qui ne cadrent pas en effet avec des normes libérales ", répond M. Mélenchon. " Ce qui est irréaliste, c’est de croire qu’on va arranger quoi que ce soit par l’austérité ", conclut M. Généreux en citant l’exemple grec.

3) Mélenchon voit la présidentielle comme un référendum contre l’austérité (article Le Point)

Le candidat du Front de gauche, en progression dans les sondages, refuse la voie unique de la rigueur.

Jean-Luc Mélenchon (Front de gauche) espère faire de la présidentielle un "référendum" contre les politiques d’austérité, rêvant de devenir le centre de gravité de la gauche face à François Hollande qui se tourne trop, selon lui, vers François Bayrou. Dans le TGV pour Bordeaux, le candidat à la présidentielle s’en est longuement pris à Nicolas Sarkozy : "Le président a capitulé avec son béret à la main", c’est "Madame Merkel qui décide" pour l’Europe. Mais à ceux qui, comme Arnaud Montebourg (PS), accusent l’Allemagne de mener "une politique à la Bismarck", la réplique fuse : "Il faut s’en prendre à Mme Merkel, parce qu’elle est de droite, pas parce qu’elle est allemande !"

En soirée, dans la salle de La Médoquine de l’agglomération bordelaise devant 2 500 militants debout, celui qui a été présenté comme "notre candidat au premier comme au second tour", a commencé par dire que "le système capitaliste tout entier est déréglé", qualifiant au passage les États-Unis de "premier problème du monde".

Le discours de Nicolas Sarkozy à Toulon le soir même ? "Consternant", "un disque rayé", a-t-il lâché, critiquant un public de "réactionnaires applaudissant bestialement" le chef de l’État et "la ruine de tout ce que nous aimons", des 35 heures à la retraite à 60 ans. Selon Mélenchon, très en verve, Sarkozy aurait mieux fait de dire "une seule phrase : Françaises, Français, je vous prie de m’excuser".

"Alors même que c’est le deuxième anniversaire du traité de Lisbonne dont il s’est vanté d’être l’auteur (...), le voici qui fustige l’Europe du libre-échange, de la concurrence libre et non faussée", mais "c’est lui qui a organisé tout ça, c’est son aveu d’échec !" "C’est donc bien nous qui avions raison en 2005" lors du non au référendum ! a-t-il lancé, très applaudi, sous quelques "Hoouu, Sarkozy !"

"Briser les reins des spéculateurs"

Souhaitant "briser les reins" des spéculateurs, le candidat a alors appelé à l’harmonisation fiscale par le haut en Europe, à la taxation des revenus du travail comme ceux du travail, à la relance de l’activité, et au refus des politiques d’austérité qui "ne mènent nulle part", comme en Grèce. "Si vous faites les moutons, vous serez tondus !" a-t-il lancé à ses partisans, appelant à la "résistance".

Avant lui, Clémentine Autain (La Fédération) avait aussi assuré ne "pas voir ce qu’on pouvait faire avec des comptes publics au régime minceur". Pour Pierre Laurent (PCF), face à une droite "qui trahit le peuple français", il ne peut y avoir qu’"un seul camp à gauche : celui du refus de l’austérité" et de la régression sociale. Dans ces conditions, tous ont lourdement critiqué la main tendue de François Hollande à François Bayrou qui va dans "le sens de la rigueur". "Si on veut faire perdre la gauche, continuons comme ça !" a lancé Pierre Laurent.

Aux socialistes, Jean-Luc Mélenchon a dit : "C’est nous, le Front de gauche, qui représentons l’alternative, aidez-nous, n’acceptez pas le choix qu’ont fait vos chefs" de "l’alliance au centre", "déguisement de l’alliance avec la droite". Finalement, Mélenchon veut voir dans le premier tour de la présidentielle une sorte de "référendum" contre l’austérité. L’eurodéputé rêve même de "polariser" l’attention à gauche comme Marine Le Pen à droite. "À la fin, ce sera le Front de gauche ou le Front national", dit celui qui regarde désormais d’un bon oeil les sondages qui le donnent en hausse. Avec 7 à 8 %, "ça correspond à ce que disent ma grenouille divinatoire et le hamster extralucide du PC !" s’amuse le candidat, dont l’entourage prédit depuis des mois un score à deux chiffres en avril prochain.

Raphaëlle Besse Desmoulières


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