Sarkozy sur les télés : un pudding digne de la la culture plébiscitaire Cinquième république

dimanche 5 février 2012.
 

Qu’ont retenu les téléspectateurs de l’émission ennuyeuse et embrouillée, mais gratuite et quasi obligatoire, que s’est offert Sarkozy dimanche dernier ? Que ça allait saigner pour les ménages, sans doute. C’en est le meilleur résumé. Quant au détail, il fallait s’accrocher. Nous avons subi une avalanche d’annonces volontairement floues, certaines d’application immédiate, d’autres opportunément retardées au lendemain de l’élection et dont on peut parier qu’elles ne verront jamais le jour.

Cet enfumage est destiné à semer la confusion. Confusion des mesures exposées qui tend à empêcher le débat citoyen sur leur contenu. Même quand on y trouve des choses aussi essentielles que la remise en cause de tout notre droit social par la suprématie des accords d’entreprise chère à la République contractuelle ! Confusion des pouvoirs, aussi, quand l’on voit un même homme parler tout à la fois comme chef de l’Etat, chef de l’exécutif, patron de la majorité parlementaire et candidat à sa réélection devant le peuple. Un vrai pudding.

A la critique argumentée de son contenu, il faut donc ajouter que cette intervention démontre encore une fois le viol démocratique que représente l’institution présidentielle dans la Cinquième République. Il est bien sûr intolérable que des choix essentiels soient soustraits à l’arbitrage du peuple et quasiment imposés au Parlement par un homme qui se trouve à quelques jours de la fin de son mandat. Il devrait soumettre ses trouvailles au verdict des urnes ! Mais même dans le courant du mandat, les pouvoirs exorbitants du président de la République sont insupportables. Faut-il que la culture plébiscitaire ait fait du dégât dans les têtes pour qu’il soit nécessaire de le rappeler ! J’ai même entendu une journaliste expérimentée se référer à une métaphysique fumeuse, la transcendance (sic) de l’élection, pour se persuader que la magie de la Cinquième transformerait le François Hollande présent sur son plateau en chef doté de « qualités exceptionnelles » (re-sic). Quel bla-bla infantilisant !

La remise en cause de ce modèle imbécile n’est donc pas un à-côté de la campagne du Front de Gauche. La révolution citoyenne que nous voulons implique d’abord que chacun reprenne le pouvoir sur lui-même. Et donc que chacun se libère de l’illusion selon laquelle il suffirait de changer une personne pour que le pays reprenne un cours « normal ». Ce n’est pas facile car il apparaît habituellement plus simple de déléguer le pouvoir à ceux qui semblent les plus à l’aise et les plus disponibles pour l’exercer. Cet objectif doit donc être poursuivi de manière très méthodique. Ce n’est pas un hasard si nous ne crions pas le nom d’un candidat dans les meetings, que notre méthode pour gouverner le pays repose sur une Constituante et une Sixième République, que dans chaque secteur de l’activité humaine nous cherchions à susciter l’implication permanente. Notre dynamique de campagne nous permet d’ébranler un à un les ressorts les plus profonds de l’aliénation du peuple. Nous avons entamé l’invisibilité du peuple ouvrier et employé. Nous avons réimpliqué dans le combat politique des milliers des nôtres qui en étaient exclus. Nous avons démasqué le rôle de la finance. Nous avons mis en difficulté la fabrique médiatico-sondagière du consentement. Ce ne sont là que des premiers craquements, mais déjà le mur offre de nouvelles prises. Y parvenir dans le courant d’une campagne électorale montre que la révolution par les urnes est possible.

François Delapierre


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