Jean-Luc Mélenchon progresse chez les jeunes, les abstentionnistes, employés, ouvriers et chômeurs

vendredi 20 avril 2012.
 

Pour Emmanuel Rivière, de TNS Sofres, le candidat du Front de gauche séduit un nouveau public : ceux qui s’intéressent peu à la politique.

À vingt-cinq jours du premier tour de l’élection présidentielle, Jean-Luc Mélenchon continue de monter dans les sondages. Mercredi, l’institut TNS Sofres a mesuré le candidat du Front de gauche à 13,5%*, soit 3,5 points de plus par rapport à sa précédente étude (réalisée le 12 mars). Une progression forte, notamment chez les jeunes et les catégories précaires, ainsi que dans l’électorat socialiste. Le sondeur Emmanuel Rivière (TNS Sofres) décrypte cette évolution.

LEFIGARO.FR - Depuis le début du mois de mars, Jean-Luc Mélenchon a connu une progression fulgurante dans les sondages. Dans quels camps politiques a-t-il puisé ses nouveaux électeurs ?

Emmanuel Rivière. - La progression de Jean-Luc Mélenchon est constante depuis novembre. Elle repose d’abord sur une accumulation de l’ensemble de l’électorat de la gauche de la gauche qui, avec le PCF et l’extrême gauche (Lutte ouvrière et le NPA), représente 10% des intentions de vote. Sur son seul nom, il a capté la totalité de cet électorat, au détriment des autres concurrents…

Il y a, aussi un phénomène de vase communicant entre Eva Joly et lui. Le candidat du Front de gauche a conquis une grande partie des électeurs qui ont donné leur voix à Europe Écologie lors des élections régionales et des élections européennes.

Enfin, Jean-Luc Mélenchon, ces dernières semaines, a progressé dans l’électorat socialiste. Il récupère des voix d’électeurs qui ne veulent pas voter pour le PS dès le premier tour. Il attire 10 à 15% des électeurs traditionnellement socialistes. Et, même chez les électeurs du MoDem, il a gagné quelques voix, mais plus modestement.

Quelles catégories socioprofessionnelles a-t-il séduites ?

Jean-Luc Mélenchon a réalisé une forte progression chez les jeunes : +6 points par rapport à la dernière enquête (le 12 mars). Il progresse en outre chez les catégories précaires : employés, ouvriers et chômeurs. Son discours le place en défenseur de ces catégories. Mais, jusqu’à récemment, il n’y faisait pas d’aussi bons scores que chez les enseignants ou les cadres.

En fait, Jean-Luc Mélenchon a fait une percée chez ceux qui s’intéressent un peu moins à la politique. Il séduit un nouveau public. C’est la vigueur de sa campagne qui lui a permis de récupérer ces électeurs souvent abstentionnistes. Cela dit, ce succès est peut-être provisoire, parce que sa progression se fait dans ces électorats qui sont friables, fragiles.

C’est une forme de vote protestataire…

À côté du débat gauche-droite, à côté du match des personnalités entre Nicolas Sarkozy et François Hollande, il y a un enjeu, pour les Français, que Jean-Luc Mélenchon a su capter : est-ce qu’on va profiter de cette élection pour dire du mal des politiques qui ont été menées depuis dix ou vingt ans ? Jean-Luc Mélenchon récupère ce vote très marqué « antisystème » grâce à ses talents de tribun.

Mais il a aussi réussi à convaincre de l’utilité du vote Mélenchon : ses électeurs se disent qu’avec un gros score pour lui il y aura plus de gauche dans le programme du futur gouvernement.

La contrepartie, c’est que l’électorat de Jean-Luc Mélenchon veut que François Hollande soit élu. Les reports de voix au second tour pour François Hollande, à 85%, restent très élevés, même s’ils sont en légère baisse dans cette nouvelle enquête.

Est-ce qu’il y a des qualités ou des propositions qui ont contribué à convaincre ces nouveaux électeurs de Jean-Luc Mélenchon ?

Il n’y a pas eu d’étude réalisée par TNS Sofres sur ce point. Mais je crois que ce qui attire, ce n’est pas tant une proposition qu’un corpus de propositions, c’est la lisibilité et la cohérence de son parcours à gauche. Par ailleurs, il a voté non au référendum de 2005 et il est le réceptacle, le débouché politique, de ces électeurs inquiets vis-à-vis de l’Europe et en quête de protection.

* Sondage réalisé par téléphone les 26 et 27 mars auprès d’un échantillon de 1000 personnes représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus, inscrites sur les listes électorales. Marge d’erreur de 1,5 à 3 points pour un échantillon de 1000 répondants. Notice consultable à la Commission des sondages.


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