Le fantôme de Sarkozy et les élections législatives 2012

mercredi 4 juillet 2012.
 

La séquence électorale présidentielle-législatives continue en apparence de tourner la page du sarkozysme. Mais derrière la rupture, elle conserve en réalité des éléments de continuité essentiels avec ce régime. Les cinq années d’hyperprésidentialisation ont laissé leur empreinte sur la vie politique française. La législative, qui se tient pour la troisième fois seulement dans la foulée immédiate de la présidentielle, a été comme effacée par celle-ci. La participation s’effondre. Dans cette décrue civique, le bégaiement de la présidentielle –donner une majorité à Hollande- devient électoralement dominant. Le PS atteindra donc son objectif d’une majorité absolue à lui seul. Mais le prix à payer pour la démocratie s’annonce sévère. Alors qu’ils totalisent seulement la moitié des suffrages au premier tour de la présidentielle, grâce au renfort déformant du « vote utile », le PS et l’UMP totaliseront plus de 90% des sièges dans la nouvelle Assemblée. Le système politique est plus contesté qu’en 2007. Il sera paradoxalement plus verrouillé qu’il ne l’a été ces cinq dernières années.

Fauteur de crise politique, ce décalage entre le pays et sa représentation parlementaire s’observe nettement quand l’on regarde les résultats du Front de Gauche. Malgré l’effet d’amplification de la victoire du PS, nous obtenons 70% de voix supplémentaires par rapport aux scores des candidats PCF en 2007. Or avec plus de voix et un meilleur pourcentage nous aurons moins d’élus. Tels sont les charmes du scrutin majoritaire à deux tours. Et cela malgré le fait que le Front de Gauche résiste bien mieux que d’autres. L’extrême-gauche atteint un plus bas historique qui la privera de financement public pour cinq ans puisque ni LO ni le NPA n’arrivent à dépasser 1% dans 50 circonscriptions. Le Modem est pulvérisé. Les Verts atteignent 3,5% dans les circonscriptions où ils concourraient sans le soutien du PS. Le Front de Gauche s’installe ainsi non plus seulement comme la deuxième force à gauche mais comme la seule alternative de ce côté-ci de l’échiquier politique.

A droite en revanche il n’y a pas eu de « vote utile » puisque l’UMP a perdu la présidentielle. En 2007, ce phénomène avait permis à Sarkozy de faire dégringoler le FN de 10% à 4% entre la présidentielle et les législatives. Cette fois le FN atteint un niveau qui lui permet de continuer à manger la droite. Le mouvement s’accélère même. Les candidats de droite succombent un à un sur le terrain à une arithmétique implacable qui fait des électeurs FN la clé du second tour. Les dirigeants nationaux de l’UMP justifient comme ils peuvent ce calcul. Ils ont ainsi engagé une campagne calomnieuse et grotesque contre le Front de Gauche, taxé d’antisémitisme pour avoir publié un appel du compositeur grec Theodorakis, artisan de la lutte conte les colonels et décoré par le ministre UMP Donnedieu de Vabres, sur un sujet sans rapport avec des déclarations que personne ne connaissait alors ! C’était l’argument du FN pour répliquer à l’indignation suscitée par l’hommage public rendu par Le Pen à Brasillach. La fin de la « digue » ou du « cordon sanitaire » entre la droite et l’extrême-droite est un autre héritage du sarkozysme. La stratégie d’extrême-droitisation de la droite se poursuit malgré le départ de son initiateur. Ce n’est pas le moindre facteur aggravant de la crise politique. La gauche gagne -heureusement !- mais tous les voyants sont au rouge. Il est plus urgent que jamais de tourner pour de bon la page du sarkozysme.


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