Législatives : Sept questions autour d’une élection

vendredi 15 juin 2012.
 

Le premier tour des élections législatives a donné un fort avantage à la gauche, qui part favorite dimanche, pour remporter la majorité à l’Assemblée nationale. Mais un certain nombre d’inconnues demeurent… Petit tour d’horizon non exhaustif des objectifs, forces et faiblesses de chaque formation.

Front de gauche  : 
l’objectif de constituer un groupe à l’Assemblée nationale Avec onze candidats arrivés en tête de la gauche le 10 juin, la possibilité pour le Front de gauche de constituer un groupe au Palais-Bourbon semble difficile puisque, pour l’instant, dépasser le seuil de 15 élus est nécessaire. Cela même si les 9 candidats en lice sortants ou investis dans une circonscription Front de gauche et les deux candidats, Patrice Carvalho (Oise) et Fabien Thiémé (Nord), également arrivés en tête à gauche, sont élus. « Une anomalie démocratique », pour le PCF qui dénonçait hier dans un communiqué « un scrutin qui fait qu’une composante qui augmente son score national (+ 500 000 voix par rapport à 2007) perde dans le même temps des députés ». Reste le choix des candidats ultra-marins, Huguette Bello (réélue au premier tour à la Réunion) et Alfred Marie-Jeanne (qualifié pour le second tour en Martinique) qui siégeaient lors de la précédente législature aux côtés du PCF et du PG, au sein du groupe gauche démocrate et républicaine (GDR). Le député sortant de Seine-Saint-Denis, Patrick Braouezec, pourrait également, s’il est réélu, grossir les rangs. Si le seuil de 15 députés n’était pas atteint à l’issue du scrutin, deux possibilités resteraient aux députés Front de gauche  : constituer un groupe technique avec d’autres sensibilités de gauche, comme c’était le cas du groupe GDR, ou voir le seuil abaissé à 10 députés.

PS, la majorité absolue à portée d’urnes ?

Entre 297 et 332 sièges, quand la majorité absolue est à 289  : selon une projection de l’Ifop, le PS et ses alliés directs (PRG, MRC et divers gauche), sans Europe Écologie-les Verts ni le Front de gauche, pourraient avoir les coudées franches à l’Assemblée. Ce serait pour les socialistes un gage de tranquillité sur les textes qui engagent le gouvernement comme le budget national ou la Sécu, sans recourir aux négociations avec les autres députés de gauche. Mais disposer de tous les leviers du pouvoir implique aussi une grande responsabilité  : pas d’excuse à ne pas réussir dans ces conditions. Le gouvernement de Jean-Marc Ayrault devrait être remanié pour tenir compte des nouveaux rapports de forces issus des urnes, et des résultats des ministres, qui devront partir en cas de défaite.

L’UMP parviendra-t-elle à limiter 
la casse ?

À droite, il s’agit surtout de limiter la casse, une éventuelle cohabitation étant hors de portée. En 2007, la droite pouvait s’appuyer sur 310 députés. Dimanche, toute la question est de savoir ce qu’il en restera, avec le risque de sortir de cette séquence électorale avec moins de 200 élus. La défaite annoncée prendrait alors des allures de Berezina dans l’opinion. La droite se fixe aussi pour objectif d’empêcher la gauche d’avoir une majorité d’au moins trois cinquièmes des parlementaires, pour pouvoir bloquer les réformes constitutionnelles hors recours au référendum. Dans le collimateur, la réforme consistant à donner le droit de vote aux étrangers aux élections locales. Selon l’ampleur du groupe d’opposition, la guerre de succession, où pointe une rivalité entre François Fillon et Jean-François Copé, pourrait se poser de manière plus ou moins aiguë. Au-delà des hommes, la question est aussi celle de la ligne politique. Une défaite peu marquée pourrait donner une légitimité au rapprochement entre la droite et la droite extrême. À l’inverse, l’ouverture du débat dans la perspective du congrès de l’automne et la recomposition qui se profile se caractériseraient par des déchirures d’autant plus conséquentes que le centre ne paraît plus en capacité de jouer un rôle.

Le FN fera-t-il son entrée 
au Parlement ?

L’objectif pour le FN  ? Bénéficier d’une présence nationale hors des séquences électorales qui permette à sa présidente, Marine Le Pen, de faire passer ses idées. Absent de l’Hémicycle depuis 1998 (quand son seul député élu en 1997, Jean-Marie Le Chevallier, a été invalidé pour infraction à la législation sur le financement de sa campagne), il récupérerait une tribune. Même si le FN n’obtient pas de groupe à l’Assemblée nationale, la présence de figures (Marine Le Pen elle-même, sa nièce Marion Maréchal-Le Pen ou l’avocat Gilbert Collard) remplirait ce critère. Car même si en tant que non-inscrits, les élus frontistes n’ont que peu de temps de parole, l’omniprésence journalistique dans la salle des Quatre-Colonnes leur assurera une couverture médiatique quotidienne.

Les Verts 
gagneront-ils leur pari  ?

Europe Écologie-les Verts (EELV) sera présente au second tour de ces législatives, comme candidat de toute la gauche, dans 42 circonscriptions. une présence en décalage avec l’influence réelle des écologistes (2,3% à la présidentielle). L’accord passé fin 2011 avec le PS réservant une soixantaine de circonscriptions à EELV, au prix de renoncements politiques, y est pour beaucoup. Même si la présence de dissidents PS, comme à Lyon, a conduit à l’élimination de quelques candidats écologiste au premier tour, EELV espère avoir au moins 15 députés pour former un groupe. À partir des résultats du premier tour et selon le degré de mobilisation des électeurs, EELV peut envisager entre 10 et 18 élus.

Royal en posture délicate

Le PS aura mis tout son poids et ses ténors dans la circonscription de La Rochelle où se présente, en mauvaise posture, Ségolène Royal face au dissident Olivier Falorni. Faire venir Ayrault, Aubry, Duflot,… pèsera-t-il suffisamment quand son adversaire a beau jeu de jouer de son implantation locale  ? Un sondage, à prendre avec précaution, donne Ségolène Royal largement battue (à 58%), déstabilisée par l’affaire du tweet de Valérie Trierweiler. En cas de défaite, sans estrade à l’Assemblée, sans ministère, un destin national s’éloigne.

Patrick Braouezec 
gagnera-t-il son duel avec le PS  ?

Le député Front de gauche sortant de Seine-Saint-Denis, Patrick Braouezec, a décidé de se maintenir à Saint-Denis face au PS Mathieu Hanotin. « Le PS est sûr d’avoir une majorité absolue à l’Assemblée nationale, mais les quatre millions de voix du Front de gauche, qui n’ont pas fait défaut à François Hollande au 2d tour de la présidentielle, ne sont pas considérées, voire méprisées », a-t-il argumenté. Le député est arrivé deuxième, dimanche, avec 31,17%, derrière le candidat PS (36,51%). En vertu de l’accord de désistement réciproque à gauche conclu lundi, Patrick Braouezec ne bénéficie pas, au plan national, du soutien du PCF ni du Front de gauche. Sur le terrain, en revanche, le Front de gauche local, PCF compris, a appelé à voter en sa faveur, de même que le président du groupe des élus socialistes de Saint-Denis, le NPA, LO, et jusqu’à François Asensi, candidat Front de gauche de la 11e circonscription, seul en lice dimanche.


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