Réponse du PG à l’Appel "stop subventions pollutions"

lundi 16 juillet 2012.
 

A : Monsieur Marc Mossalgue, Chargé de l’information Réseau Action Climat

Madame Manuela Lorand, Fondation Nicolas Hulot pour la Nature et l’Homme

Objet : campagne « Non aux subventions à la pollution »

Madame, Monsieur,

Le Parti de Gauche souhaite vous faire part de son soutien à l’appel « pour l’arrêt des subventions à la pollution et la mise en place d’une fiscalité française cohérente et écologique », vous transmettre quelques remarques sur les argumentaires développés dans le cadre de cette campagne, et enfin vous proposer des pistes de travail en commun.

Tout d’abord, nous ne pouvons qu’approuver votre démarche, qui préconise de nombreuses mesures identiques à celle défendues dans la proposition de loi n°2028 « instaurant une autre fiscalité écologique par la création du revenu maximal autorisé, l’abrogation de niches fiscales néfastes pour la planète et l’introduction de taxes écologiques ciblées », déposée par nos député-e-s Martine Billard, Jacques Dessalangres et Marc Dolez le 5 novembre 2009. Si ce texte doit être actualisé quant aux mesures d’urgence alors défendues, nous le joignons à ce courrier car l’essentiel de la démarche reste valide. Vous constaterez les convergences qui existent sur la suppression des niches fiscales concernant le transport aérien, le transport routier, les agrocarburants et les investissements nuisibles à l’environnement dans les Dom. De même, sur les mesures visant à orienter l’évolution du parc automobile et la réflexion sur la taxe kilométrique. Nous partageons votre souci que, parallèlement aux incitations à modifier les comportements, les pouvoirs publics offrent des alternatives à nos concitoyen-ne-s, en facilitant la création de débouchés pour le secteur des énergies renouvelables, en aidant à des plans massifs d’économies d’énergie et de développement des transports en commun.

Si cette proposition de loi n’abordait pas les questions agricoles, les mesures que vous préconisez concernant les engrais sont cohérentes avec le changement de modèle que nous défendons, en faveur d’une agriculture paysanne respectueuse de l’environnement, de la santé publique et du travail des producteurs.

Nous avions, pour ce qui nous concerne, souhaité aller plus loin dans le domaine de la publicité, car la question de la culture dominante nous semble centrale. Pour rompre avec le productivisme, nous devons nous attaquer aussi à ses vecteurs, et la promotion d’une consommation à outrance, de l’accumulation de biens sans interroger leur utilité, doit être remise en cause. Nous défendons, au plan économique, la rupture avec les politiques de l’offre qui sont au cœur du productivisme, pour passer à une politique de la demande fondée sur l’examen de l’intérêt écologique et social des productions. C’est pourquoi, nous souhaiterions échanger avec vous aussi sur la question de fiscalité appliquée à la publicité.

Toujours pour marquer la rupture avec le modèle de gaspillage et de surconsommation qui façonne l’imaginaire productiviste et aliène les consommateurs et consommatrices, nous défendons le revenu maximal. Poser ainsi une limite à l’enrichissement individuel nous semble essentiel pour empêcher les gaspillages causés par les ultra-riches, et changer le rapport aux biens matériels dans les consciences. Nous vous soumettons cette réflexion.

Nous souhaitons également attirer votre attention sur certains points des argumentaires qui accompagnent cet appel et méritent débat.

Ainsi, les discours sur le passage d’une fiscalité pesant sur le travail à une fiscalité écologique peuvent recouvrir des intentions fort différentes. Bien entendu, les conséquences sur l’emploi des mesures fiscales et des prélèvements sociaux doivent être mesurées. Mais les idéologues libéraux sont moins motivés par la préservation de l’environnement ou par la lutte contre le chômage que par la volonté de poursuivre les transferts du travail vers le capital dans la répartition des richesses, œuvrant de la sorte au creusement des inégalités que vous dénoncez à juste titre. Le remplacement de cotisations sociales versées par les entreprises par des taxes payées par les consommateurs et consommatrices peut être un instrument de ces politiques libérales. C’est d’autant plus vrai que l’abandon de ces cotisations, base des systèmes de sécurité sociale solidaires, au profit d’une fiscalisation, relève aussi d’enjeux idéologiques, avec la volonté d’exonérer les patrons de leurs responsabilités dans leur relation aux salarié-e-s. Les conditions de travail sont pourtant déterminantes en matière de santé, pour ne prendre que cet exemple.

De même, nous ne pouvons confier au marché le soin d’orienter la transformation écologique de l’économie, puisque les temps longs de l’écologie sont incompatibles avec les temps courts des retours sur investissements propres au capitalisme financiarisé, et nécessitent, pour être pris en compte, l’intervention déterminée de la puissance publique.

Enfin, si une fiscalité écologique participe aussi d’une gestion plus rationnelle des finances publiques, elle ne saurait être mise au service de politiques d’austérité interdisant de mener des politiques écologistes dignes de ce nom.

Constatant ces convergences et la nécessité de débattre de certaines modalités d’action, nous vous faisons les propositions suivantes.

Le Parti de Gauche travaille depuis plusieurs années sur l’outil et la méthode que constitue la planification écologique (proposition de loi et rapport parlementaire également joints). Nous considérons nécessaire de préparer de manière rationnelle, systématique et démocratique la transition entre les modes de production, de consommation et d’aménagement actuels et la société écologique de demain. Nous réfléchissons à un processus d’allers-retours entre un travail au niveau des bassins de vie et l’échelon national, où seront votées les lois de programmation et de financement – et nous proposons un tel modèle à l’échelle européenne. Dans ce cadre, pouvoirs publics, syndicats et associations doivent co-élaborer les orientations. La place des salarié-e-s des secteurs à reconvertir nous paraît centrale, car ce sont des acteurs décisifs des changements, et les meilleurs connaisseurs des processus de production.

Depuis plus de trois ans, nous rencontrons et dialoguons avec de nombreux collectifs et associations : Negawatt, FNE, Sortir du Nucléaire, Greenpeace, WWF, LPO, les Déboulonneurs etc. avec lesquels nous avons débattu des questions de planification écologique et de transition. Durant la campagne présidentielle, le PG a rencontré et soutenu de nombreux salariés en lutte pour la préservation de leur emploi. C’est le cas des salariés des raffineries menacées de délocalisation. Nous nous opposons à ces délocalisations non seulement pour des raisons sociales, mais aussi pour des motifs environnementaux : nous savons que la maximisation des profits des actionnaires pousse à délocaliser vers des pays assurant un moins-disant social, environnemental et démocratique. Qui plus est, nous avons besoin de conserver les savoirs et les savoir-faire des salariés du secteur pour penser et développer la chimie organique de l’avenir. Le 27 mars dernier, nous avons pris part à une rencontre avec les syndicats de plusieurs entreprises, dont Pétroplus, souhaitant échanger sur l’articulation entre projets alternatifs visant à éviter les délocalisations et prise en compte des enjeux environnementaux.

Or, les propositions de taxes sur le raffinage peuvent à bon droit inquiéter les salariés du secteur, car elles seront exploitées pour renforcer le discours des actionnaires en faveur de nouvelles délocalisations. Une rencontre entre associations écologistes et syndicats de la pétrochimie pourrait permettre un échange de point de vue et peut-être une convergence sur des objectifs communs. Une telle démarche préfigurerait pour nous la mise en œuvre de la planification écologique. Nous sommes disponibles pour faciliter des tels échanges.

D’autre part, nous avons travaillé sur les questions d’autres secteurs industriels, comme celui des transports, avec notre proposition de transport combiné « de la route au rail » où la fiscalité a toute son importance. Nous avons enfin échangé sur les questions de fiscalité écologique, au plan français et européen, avec des syndicalistes du ministère des Finances (notamment avec le secrétaire général de Solidaires Finances, issu de la fusion entre le Snui et Sud Trésor). Ces discussions ont été fructueuses sur le décryptage des discours en matière de fiscalité, et ont attiré notre attention sur la nécessité de travailler finement sur les modalités d’application des mesures fiscales. Si les différentes parties en sont d’accord, un groupe de travail commun nous paraîtrait des plus intéressants.

Nous sommes à votre disposition pour une première rencontre, afin de vous écouter et de revenir plus en détail sur chacune de ces propositions.

Avec nos salutations écologistes, socialistes et républicaines,

Jacques GENEREUX, Secrétaire national à l’économie

Corinne MOREL DARLEUX, Secrétaire nationale à l’écologie

Laurence SAUVAGE, Secrétaire nationale aux luttes sociales

Mathieu AGOSTINI, Responsable commission écologie

Guillaume ETIEVANT, Responsable commission économie

Thomas GIRY, Veille écologie


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