Les Kurdes syriens prennent le contrôle du Kurdistan

mardi 24 juillet 2012.
 

En trois jours, les kurdes syriens ont pris le contrôle de quatre villes dans le Kurdistan Occidental et ont annoncé la création des forces armées pour but de défendre les intérêts nationaux du peuple kurde. Le principal mouvement kurde a appelé les arabes, arméniens, assyro-chaldéens à se ranger de leur coté.

Les kurdes ont lancé le 21 juillet un assaut contre toutes les institutions du régime Baas, au pouvoir depuis 40 ans, dans deux villes, Derika Hamko et Amude, après avoir pris le contrôle de Kobani et d’Afrin, les 19 et 20 juillet. Les autres villes attendent leur tour.

La création des forces armées kurdes

Le 20 juillet, la création des forces armées kurdes (YPG), connues jusqu’ici sous le nom "comités de défense du peuple", a également été annoncée.

« Notre principal but est de défendre les intérêts nationaux du peuple Kurde. Nous annonçons à notre peuple que nous sommes en mesure de protéger toute la région » a déclaré YPG dans un communiqué.

Appel aux arabes, arméniens et assyro-chaldéens

Le mouvement de la société démocratique du Kurdistan Occidental (TEV-DEM), une organisation qui chapeaute les principales formations kurdes syriennes dont le plus influant PYD, appelle de son coté les arabes, arméniens, assyro-chaldéens à se ranger du coté du peuple kurde. Le mouvement promet de protéger ces peuples, sans distinction, affirmant soutenir un pays uni et démocratique où les peuples vivent ensembles.

« Nous sommes pour une vie commune avec tous les autres peuples de la Syrie dans un pays démocratique » a affirmé le mouvement, appelant les kurdes à rester vigilants et organisés contre toute provocation.

Exprimant son soutien aux Unités de Défense du Peuple (YPG), le mouvement dit : « Nous appelons le peuple du Kurdistan, notamment les jeunes, à soutenir le YPG. Nous sommes convaincus que le YPG protégera les arabes, le arméniens et les assyro-chaldéens et ouvrira aussi ses rangs à tous. »

Les kurdes unissent leur force

Le Conseil du Peuple qui regroupe plusieurs partis kurde dont le PYD et le Congrès national kurde (CNK), deuxième formation au Kurdistan syrien, avaient décidé d’unir leur force au sein d’un seul et même bloc après des discussions menées au Kurdistan irakien entre le 9 et 10 juillet. L’accort avait été signé en présence de président du Kurdistan irakien, Massoud Barzani.

Accusé par les turcs et les médias occidentaux de soutenir le régime Bachar Al-Assad dans le cadre d’une campagne de désinformation, le PYD a été en réalité le seul parti refusant de prendre place au sein du CNS et de soutenir le régime dont il est victime, dès le début de la révolte lancée mi-mars 2011, déclarant que le but de trio répressif Qatar-Turquie-Arabie Saoudite n’était pas de construire la démocratie, mais de faire obstacle devant les réalisations du peuple kurde.

Rejetant les menaces des colonisateurs et refusant tout conflit interne, les kurdes continuent à unir leur force dans toutes les parties du Kurdistan pour retrouver enfin leur véritable place au Moyen-Orient. Ils n’ont pas encore joué toutes leurs cartes, mais ils ont dit leur parole en faisant un pas en avant, en prenant les contrôles des villes au Kurdistan syrien.

Pas de places pour une erreur

La prise de contrôle du Kurdistan est la conséquence d’une préparation de 16 mois, soit depuis le début de la révolte. Les organisations kurdes sont conscientes qu’elles ne peuvent pas se permettre le luxe de commettre des erreurs face à un conflit régional américano-iranien, ce qui exige de grandes précautions et une bonne préparation. Car, les iraniens et les turcs joueront surement leurs cartes.

L’Iran provoque le gouvernement irakien

Le régime iranien a déjà déployé son armée sur la frontière avec l’Irak et la Turquie. Une attaque serait envisagée contre le Kurdistan irakien à partir de la région de Qandil, où de violents affrontements avaient été éclatés en 2011 entre l’armée et le PJAK, principal mouvement armé et populaire kurde. Plus de 10 millions kurdes vivent en Iran, soit au Kurdistan Oriental.

Même si une participation directe de l’Iran dans une guerre n’est pas envisagée, il peut pourrait cependant pousser le gouvernement irakien de Nouri Al-Maliki pour lancer une attaque contre la région kurde. Dans un avenir proche, des combats pourraient éclater à Kirkouk, riche en pétrole, et à Khanekin, deux régions disputées région les Kurdes aimeraient rattacher à la Région autonome du Kurdistan, selon les analystes kurdes.

Quant à la Turquie, elle est confrontée à un surgissement d’une nouvelle région autonome kurde à ses frontières, après la région autonome kurde en Irak. Ce sont les États-Unis qui définiront les mouvements de la Turquie dans la région, car cette dernière est coincée et elle n’a pas beaucoup de marge de manœuvre à cause de ses politiques destructives et négationnistes. D’ailleurs, les kurdes de Turquie ne resteront pas les bras croisés devant une attaque turque contre leurs frères au Kurdistan syrien.

Maxime Azadi le 22 juillet 2012

2) Les Kurdes tentent de s’unir pour préparer la Syrie de demain (AFP)

Vendredi 27 juillet 2012 à 12h24

Les Kurdes syriens, hostiles au régime qui les a réprimés et méfiants envers l’opposition qu’ils jugent peu encline à reconnaître leur spécificité, ont décidé de s’unir et de gérer leur région pour faire valoir leurs droits dans la Syrie de demain.

> Ils se sont prudemment engagés dans le soulèvement contre le régime de Bachar Al-Assad mais ont tenté de garder à l’abri des violences leurs régions, où les rebelles de l’Armée syrienne libre (ASL) ne sont pas présents.

> Depuis la semaine dernière, l’armée s’est retirée sans combat de certaines régions kurdes où des militants proches du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK, autonomistes kurdes turcs) se sont déployés, suscitant des soupçons de collusion avec le régime.

> Le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan a même accusé Damas, son ancien allié, d’avoir "confié" plusieurs zones du nord de la Syrie à la branche syrienne du PKK, le Parti de l’union démocratique (PYD).

> Le PKK est considéré comme une organisation terroriste par Ankara et plusieurs autres pays.

> La Turquie a également considéré l’installation du PYD près de la frontière comme "dirigée contre" elle. Ce parti compte de nombreux combattants venus du Kurdistan d’Irak pour soutenir leurs frères de Syrie.

> Malgré la grande méfiance entre les partis kurdes syriens traditionnels et le PYD, les deux parties ont signé le 11 juillet, sous le parrainage du chef kurde irakien Massoud Barzani, un accord pour unifier leurs rangs.

> Désormais, le Conseil national kurde, qui regroupe une douzaine de partis traditionnels kurdes syriens et le Conseil populaire du Kurdistan occidental (CPKO), émanation du PYD, sont réunis sous la bannière du Conseil suprême kurde.

> "L’accord est extrêmement positif car nous craignions des affrontements fratricides avec le PYD qui faisait auparavant le jeu du régime", souligne Havidar, journaliste kurde dans le nord de la Syrie.

> Il semble que les Kurdes syriens aient décidé de travailler ensemble", estime Ignace Leverrier, ex-diplomate français qui a passé une partie de sa carrière en Syrie. Selon lui, le PYD "commence peut-être à comprendre que le régime est fini".

> Le CPKO nie lui toute collusion avec le régime. "Nous avons nettoyé pacifiquement nos régions de la présence des forces gouvernementales", affirme à l’AFP son porte-parole, Chirzad Izidi.

> Selon lui, son parti a formé des "unités populaires kurdes", sorte de peshmergas syriens, à l’instar de leurs frères irakiens, pour assurer l’ordre.

> Si les combattants du PYD étaient jusqu’à présent les seuls à disposer d’armes dans les zones kurdes, Massoud Barzani a révélé récemment que les kurdes irakiens entraînaient leurs frères syriens, en grande partie des déserteurs de l’armée.

> Des décennies de discrimination

> Installés dans le nord de la Syrie, les Kurdes représentent près de 15% des 23 millions de Syriens selon les estimations de Fabrice Balanche, géographe spécialiste de la Syrie.

> Ils se plaignent d’être discriminés par le régime du parti Baas au pouvoir et réclament la reconnaissance de leurs droits culturels et politiques, mais jurent ne pas avoir de visées autonomistes comme leurs frères irakiens.

> "Nous voulons que nos droits soient clairement reconnus dans la prochaine Constitution", affirme Bahjat Bachir, un dirigeant du Parti démocratique kurde en Syrie."Nous voulons être des partenaires à part entière dans la nouvelle Syrie et sommes attachés à l’unité du pays", assure M. Bachir.

> Les Kurdes ont aussi des relations difficiles avec le Conseil national syrien (CNS), qu’ils accusent de chercher à marginaliser les groupes religieux et ethniques minoritaires. Et même si son nouveau chef, Abdel Basset Sayda, est kurde, il ne représente pas pour autant cette minorité, selon les militants.

> "Les Kurdes veulent que la révolution leur garantisse leurs droits avant l’issue finale", explique Ignace Leverrier.


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