Pédagogisme et pédagogie... Par Jean-François Chalot (Repère n° 120)

mardi 6 février 2007.
 

Certains nostalgiques comparent l’école d’autrefois, libératrice et celle d’aujourd’hui qui serait en voie de liquidation.

S’il s’agit de condamner les politiques publiques qui visent à marchandiser l’école, à la démanteler,je ne peux qu’être en accord avec ces censeurs.

Mais s’il s’agit de vanter une pédagogie d’hier, pédagogie de la réussite à une autre celle de l’échec, je ne peux que m’opposer à ce procès en sorcellerie....

Il ne faut ni un enfant roi, ni non plus un enfant martyr...

Là où j’habite, une des écoles porte le nom d’un ancien directeur de cours complémentaire et comme je l’ai dit un jour, et pas seulement par boutade : « si les droits de l’enfant avaient existé à l’époque où il enseignait, il aurait eu plus que quelques problèmes !? »

La confusion et l’amalgame sont aux postes de commande.

Les pédagogues modernes très souvent confondus avec les « pédagogistes » sont dénoncés par de nombreux ouvrages parus et soutenus par les défenseurs des lettres, des mathématiques, du latin...

Comme s’il n’était pas possible à la fois de condamner le libéralisme, le démantèlement de l’éducation nationale et à la fois de promouvoir et de pratiquer une pédagogie dite moderne...

« L’école française est devenue l’école des sciences de l’éducation. Dans cette école, les sociologues et les pédagogistes rejettent la singularité de la personne au nom de déterminismes liés principalement à l’origine sociale. Dans les IUFM on prétend former des professionnels de l’enseignement, sans tenir compte des disciplines à enseigner. En réalité la pédagogie n’est pas séparable des connaissances à transmettre, elle prend des formes différentes selon les disciplines. A l’inverse, le pédagogisme sépare la pédagogie des disciplines, il veut se situer au-dessus des connaissances à transmettre, auxquelles il substitue un arsenal de techniques et de procédés. »

Voici ce qu’écrivait Liliane Lurçat dans un article paru dans Philosophie politique, "Ecole et démocratie", n°10, novembre 1999, P.U.F.

Je suis totalement en accord avec Liliane Lurçat et rappelle pour mémoire que Célestin Freinet a toujours distingué méthode et technique et d’ailleurs sa crainte fut que ses idées soient récupérées et dévoyées pour être transformées en simples boîtes à outils.

Les pédagogues modernes considèrent qu’effectivement l’enfant doit être un acteur essentiel de son apprentissage, ce qui ne signifie pas que le « maître » se transforme en assistant, moniteur ou facilitant.

De nombreux pédagogues qui se réclament de l’école moderne se sont opposés et s’opposent à la diminution drastique du nombre d’heures de français ou de mathématiques....

Rendre l’élève acteur, ce n’est pas refuser, bien au contraire d’apporter les connaissances indispensables... Les règles de grammaire et d’orthographe ainsi que les modes opératoires doivent être enseignés....

Les enseignants doivent à la fois maîtriser les disciplines et à la fois pouvoir intéresser, passionner l’enfant... Il faut bien connaître les matières à enseigner, le développement de l’enfant et pouvoir choisir une pédagogie adaptée à sa personnalité et à son public.

Rien ne s’improvise, ni se bricole, le tout s’apprend. L’école est un espace éducatif, il ne s’agit pas seulement de transmettre les connaissances indispensables mais aussi de participer à l’éducation des enfants....

Construire avec les élèves des règles de vie communes, les associer à l’aménagement des cours de récréation, ce n’est ni gaspiller du temps ni se laisser aller à de l’animation, bouche trou.

Par ailleurs les enseignants en zone sensible qui ont mis en place des conseils d’élèves se sont aperçus que les règles appropriées étaient mieux appliquées et que le nombre des incivilités et petites violences diminuait.

Il ne doit exister aucune norme pédagogique, la seule obligation étant de respecter les programmes nationaux.


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