Réélection d’Hugo Chávez : et après ?

samedi 27 octobre 2012.
 

Réponse de Christophe Ventura, PG, intervenant à IRIS Sup’, délégué invité au Venezuela par le Conseil national électoral dans le cadre du Programme national d’accompagnement des élections*, lors de l’élection présidentielle du 7 octobre dernier.

1) La réélection d’Hugo Chávez est-elle symbolique de la dynamique de la gauche en Amérique latine ?

Absolument. Elle est non seulement symbolique de la dynamique de cette gauche latino-américaine mais elle est aussi nécessaire à sa consolidation et à l’approfondissement de ses actions. C’est d’ailleurs pour cela qu’avant l’élection, le fait que l’ancien président brésilien Lula ait prononcé cette phrase forte « Ta victoire sera la nôtre » a bien indiqué le sens et la place du Venezuela dans le dispositif latino-américain aujourd’hui.

Le pays est central dans le développement des gauches latino-américaines et dans celui des politiques économiques, sociales et internationales qui sont aujourd’hui mises en place dans la région. Le Venezuela est un élément clé dans la marche de cette dernière vers son indépendance et son autonomisation par rapport à la tutelle nord-américaine et dans la diversification de ses alliances vers le Sud, avec la Chine notamment.

*A chaque élection, le Conseil national électoral vénézuélien invite des délégués internationaux issus de la société civile, des élus politiques, des dirigeants d’organisations syndicales et politiques à venir au Venezuela observer le processus électoral et attester de sa bonne conduite.

2) Quels sont les principaux défis auxquels doit faire face Hugo Chávez, notamment en termes de sécurité ?

Il est clair qu’il s’agit d’un défi majeur pour Hugo Chávez et le gouvernement vénézuélien. Et ce, depuis maintenant plusieurs années puisque le Venezuela vit avec une insécurité structurelle qui n’est pas jugulée et qui évidemment pose des problèmes au pays.

On estime qu’entre 14 000 et 19 000 homicides sont commis au Venezuela chaque année –les chiffres sont discutés et divergent selon les sources–, ce qui en fait l’un des pays les plus touchés, juste derrière le Honduras.

Pendant assez longtemps, le gouvernement a misé sur la lutte contre la pauvreté – domaine où il a atteint d’importants résultats – comme moyen de contrer l’insécurité mais il n’avait pas pris la mesure de la mutation de la nature de cette dernière. L’insécurité est évidemment liée à la pauvreté mais également au développement des trafics et des gangs prenant part au commerce de la drogue. Le Venezuela est devenu l’un des théâtres d’opération de ce commerce dans la région. Il est victime, du fait de sa proximité avec la Colombie (principal producteur de cocaïne), de l’utilisation de son territoire par les narcotrafics comme voie de passage pour la production et l’intermédiation de la vente.

C’est bien sûr une lourde tâche de régler tout cela mais depuis maintenant un peu plus d’un an, le Venezuela a décidé de mettre en place une police nationale. C’est une première. Cela n’a jamais existé auparavant dans le pays. Quand on est en France, il est difficile d’imaginer une telle chose, mais jusqu’à présent, le Venezuela était un pays dans lequel la sécurité publique était assurée par des polices locales au nombre de 110 à 120 sur tout le territoire. Sans coordination nationale, elles constituaient autant de fiefs autonomes. Cette situation ne répondait pas du tout au défi de l’insécurité. De plus, l’existence d’une telle multiplicité de polices locales est très propice à la corruption. Le gouvernement vénézuélien a changé d’axe et a décidé de créer et de former une police nationale. Il a mis en place plusieurs structures : le Centre de formation policière (Cefopol), l’Université nationale expérimentale de la sécurité (UNES) et la Police nationale bolivarienne (PNB).

Les policiers devront à la fois répondre aux exigences des métiers de la police mais aussi à celles consistant à établir une certaine proximité avec les communautés, avec les quartiers. Il s’agit de construire un accompagnement social des politiques répressives, un travail préventif important. Les policiers ont également accès à une formation scolaire et universitaire en sciences sociales qui leur permet d’avoir une vision élargie des problèmes sociaux auxquels sont confrontés le Venezuela et, en particulier, les populations concernées par le crime, les trafics et les violences.

C’est une expérience assez novatrice qui débute, il est donc un peu tôt pour en tirer un bilan...

3) Quid de la succession de Chávez ? Pensez-vous que l’on voit émerger la constitution d’un parti chaviste et l’institutionnalisation de la révolution bolivarienne ?

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