22 novembre 845 : Le Breton Nominoë bat les Francs

mercredi 17 avril 2019.
Source : Wikipedia
 

La Bretagne, cette péninsule indissociable de la physionomie de l’Hexagone, est de toutes les provinces françaises l’une des plus attachées à ses particularismes et à son Histoire, même si, depuis un demi-millénaire, son attachement à la monarchie et à la République n’a jamais été pris en défaut. Joseph Savès De l’Armorique à la Bretagne

Connue des Anciens sous le nom d’Armorique (on reconnaît dans ce nom la racine celtique armor, qui désigne la mer), cette région au sous-sol granitique s’est montrée très accueillante aux civilisations des mégalithes (grandes pierres dressées). Les vestiges de ces civilisations préhistoriques sont particulièrement denses autour du golfe de Vannes (Locmariaquer, Carnac...).

D’après le peu que l’on en sait, ces civilisations se seraient épanouies à partir de 3500 avant JC jusqu’en 1500 av. J.-C. environ, à l’époque néolithique. Elles auraient été développées par des populations venues en bateau de Grande-Bretagne ou d’Allemagne.

À la civilisation des menhirs, avec ses longs alignements de pierres dressées, comme à Carnac, à vocation funéraire, magique ou religieuse, aurait succédé, non sans violences, la civilisation des dolmens. Les dolmens sont des tables en pierres qui, à l’origine, étaient recouvertes d’un tumulus de terre. Ils servaient de tombes collectives. Les plus remarquables sont la table des Marchant, à Locmariaquer, et le tumulus de l’îlot de Gavrinis, dans le golfe de Vannes.

Beaucoup plus tard (600 ans av. J.-C.) ont déboulé les Celtes, que les Romains appelaient Gaulois. Les Celtes d’Armorique se répartissaient en cinq peuples principaux : les Redones, dont le nom se retrouve dans celui de la ville de Redon, les Vénètes (Vannes), les Namnètes (Nantes), les Curiosolites (autour de Saint-Brieuc) et les Osismiens (autour de Brest).

Ils ont été soumis non sans difficulté par Jules César. Le général romain eut fort à faire pour soumettre les Vénètes, en 56 av. J.-C.. Il les affronta dans une bataille navale et l’on montre encore, à la pointe du golfe de Vannes, le tumulus du haut duquel, paraît-il, il surveilla la bataille.

Intégrée par Rome à la province de Gaule belgique, l’Armorique, du fait notamment de sa situation excentrique, résista à la romanisation et conserva sans doute mieux que le reste de la Gaule ses racines celtiques. Elle fut également épargnée par les invasions germaniques au Ve siècle.

De ce fait, de la fin du Ve siècle au VIIe siècle, les Celtes de Britannia (la Grande-Bretagne actuelle) trouvèrent naturel de se réfugier en Armorique lorsque leur île fut envahie par des hordes d’Angles, de Saxons et autres Germains ! C’est ainsi que l’Armorique, devenue le refuge des Bretons, renoua avec la langue celtique et prit le nom sous lequel elle est aujourd’hui connue : la Bretagne. Parmi les nouveaux arrivants figuraient beaucoup de moines qui eurent à coeur d’évangéliser la péninsule et y multiplièrent les fondations d’abbayes (Samson, Paterne...). La Bretagne en quête d’indépendance

Charlemagne a le plus grand mal à soumettre les Bretons malgré la victoire du comte Wido sur les chefs locaux en 799. Son fils Louis le Pieux confère au chef breton Nominoë le titre de duc dans l’espoir de se l’attacher. Mais Nominoë ne tarde pas à se soulever contre les Francs. Le 22 novembre 845, il bat à plate couture les troupes de Charles le Chauve, fils de Louis le Pieux, à Ballon, près de Redon.

À sa mort, en 851, son fils Erispoé lui succède à la tête de la Bretagne et obtient de Charles le Chauve rien moins que le titre de roi ! La Bretagne devient indépendante pour près de sept siècles.

Erispoé ne profite pas longtemps de son triomphe. Il est assassiné en 857 par son cousin Salomon, lequel s’attribue le titre royal. Salomon adjoint la presqu’île du Cotentin à son royaume.

De nouveaux venus, les Normands, vont mettre à mal le frêle royaume. Installés à l’embouchure de la Seine depuis 911, ils l’envahissent par terre aussi bien que par mer. Alain II Barbe-Torte vainc enfin les Normands en 939 à Trans, près de Cancale et de l’actuel mont Saint-Michel. Cela lui vaut le titre de « duc des Bretons ».

Les avanies subies par les Bretons au cours des années passées ont entraîné un recul de la frontière linguistique. À l’aube de l’An Mil, celle-ci se fixe sur une ligne qui va de Suscinio, au sud, sur le golfe de Vannes, à Plouha, au nord, près de Paimpol. À l’est, on parle désormais un dialecte roman comme les autres Francs, le « gallo », à l’ouest, on reste fidèle au parler celtique.

Aux XIe et XIIe siècles, les Bretons affrontent deux puissants seigneurs voisins, les comtes d’Anjou et les ducs de Normandie. La situation se corse quand, en 1154, le comte d’Anjou Henri II Plantagenêt devient aussi roi d’Angleterre et duc de Normandie ! Celui-ci, qui lorgne sur la péninsule, marie son fils Geoffroi à Constance, fille et héritière du duc Conan IV.

La Bretagne est sur le point de tomber dans l’escarcelle des Plantagenêt quand meurt dans un tournoi son nouveau duc, Geoffroi II. Le duché revient à son fils posthume, qui lui-même meurt en bas âge en 1203, puis à la demi-soeur de celui-ci, Alix !

Le roi de France, Philippe Auguste, profite de la situation. Il marie Alix à un sien cousin, Pierre de Dreux, de sorte que le duché passe dans la mouvance capétienne. . La guerre de Succession de Bretagne

Le duché, toujours attaché à son indépendance, passe de père en fils jusqu’à Jean III le Bon. Celui-ci décède le 30 avril 1341 sans enfant et sans héritier désigné.

Charles de Blois, neveu du roi de France et époux de Jeanne de Penthièvre, nièce du duc Jean III le Bon, réclame la succession de celui-ci. Il a l’appui de la haute noblesse et du roi de France Philippe VI de Valois.

Le demi-frère du défunt duc, Jean de Montfort, conteste la succession par les femmes. Il la dénonce comme contraire au droit capétien. Paradoxe : il a le soutien de la petite noblesse bretonne et surtout du roi d’Angleterre Édouard III qui, lui-même, vient de revendiquer la couronne de France... en arguant de la succession par les femmes !

Dans un premier temps, Jean de Montfort prend possession du duché mais il est rapidement défait par l’armée française et emprisonné au Louvre, à Paris. Sa femme Jeanne de Flandre poursuit le combat. Libéré en 1343 à la faveur d’une trêve, Jean de Montfort meurt peu après.

La guerre de Succession de Bretagne, aussi appelée guerre des deux Jeanne, étroitement imbriquée à la guerre franco-anglaise, plus tard appelée guerre de Cent Ans, va perdurer de longues années. Parmi ses péripéties les plus pittoresques, on retient le combat des Trente à Ploërmel. Vers la paix

En 1352, à Mauron, une bataille occasionne plusieurs centaines de victimes dans les deux camps. Enfin, à Auray, le 29 septembre 1364, Charles de Blois est défait et tué.

La paix signée à Guérande le 12 avril 1365 consacre la victoire posthume de Jean de Montfort. C’est son fils qui prend la couronne ducale sous le nom de Jean IV.

À la même époque, le capitaine Bertrand du Guesclin, un ancien partisan de Charles de Blois, se met au service du roi de France et donne la paix au royaume.

Resté secrètement allié au roi d’Angleterre dont il a épousé la fille, Marie, Jean IV est chassé de ses terres par Bertrand du Guesclin. Mais les protestations de la noblesse bretonne obligent la France à le rétablir dans ses droits par un second traité de Guérande, en 1381.

On assiste dès lors, au XVe siècle, en Bretagne comme en France, au retour de la prospérité et de l’effervescence artistique. La Bretagne découvre le gothique flamboyant et se dote de nombreuses et belles églises. Deux mariages pour le prix d’un

Au sortir de la guerre de Cent Ans, la France, qui a retrouvé de l’assurance, se fait de plus en plus pressante.

Dans l’espoir de préserver l’indépendance de son duché, François II de Bretagne commet la sottise de s’allier en 1485 à Louis d’Orléans (futur Louis XII) et à quelques autres grands seigneurs. Ensemble, ils combattent le jeune roi de France et sa soeur, la régente Anne de Beaujeu. Cette « Guerre folle » se termine par la victoire des troupes françaises commandées par La Trémoille, à Saint-Aubin-du-Cormier, non loin de la ville de Fougères, le 28 juillet 1488.

Le duc François II, vaincu, signe le 19 août 1488 le traité du Verger par lequel il promet que sa fille et héritière Anne ne se mariera pas sans le consentement du roi de France.

Après sa mort, trois semaines plus tard, les seigneurs bretons, soucieux de leur indépendance, prient Anne d’épouser par procuration le futur empereur d’Allemagne Maximilien 1er de Habsbourg (31 ans). Le roi de France Charles VIII n’apprécie pas d’être ainsi trompé. Après bien des péripéties, il obtient d’épouser la promise.

Avec ce mariage royal, la Bretagne devient fief français mais seulement en droit. La duchesse l’administre en toute liberté. Le contrat de mariage prévoit qu’Anne devra épouser le nouveau roi si son mari meurt sans enfant. Las, le couple a six enfants mais tous meurent en bas âge avant que ne meure à son tour Charles VIII, victime d’une chute malencontreuse dans son château d’Amboise, le 8 avril 1498.

Le trône revient à l’héritier des Orléans, lointain cousin du roi et époux de sa soeur Jeanne la Boîteuse. Devenu roi sous le nom de Louis XII, il annule sans regret son mariage, qui n’a pas été consommé, et épouse à son tour Anne de Bretagne, qu’il aimait, dit-on, en secret. Un peu plus chanceux que le précédent, ce nouveau mariage se solde par deux filles : Claude, future reine de France, et Renée, future duchesse de Ferrare. Intégration en douceur de la Bretagne

Anne obtient que sa fille aînée Claude de France, née en 1499, soit fiancée au futur empereur Charles Quint (comme à la génération précédente, elle espère ainsi sauvegarder l’indépendance de la Bretagne).

Mais Louis XII ne l’entend pas de cette oreille. En 1506, il fiance d’office sa fille à son cousin François d’Angoulême, héritier légitime du royaume.

Anne meurt le 9 janvier 1514, à près de 37 ans, et quatre mois plus tard, le 8 mai 1514, sa fille Claude épouse François d’Angoulême. À cette occasion, elle fait don de la Bretagne à son mari. Celui-ci devient roi de France sous le nom de François 1er à la mort de Louis XII, le 1er janvier de l’année suivante.

C’est seulement en 1532 que les états généraux de Vannes approuvent le rattachement du duché au royaume de France. Ils préservent toutefois leurs privilèges ainsi que l’autonomie judiciaire et fiscale du duché.


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