Comment changer ? (Olivier Besancenot)

lundi 30 octobre 2006.
 

Droit de décider et de contrôler

La démocratie est bafouée tous les jours. L’immense majorité de la population n’a aucun pouvoir de décision dans tout ce qui concerne sa vie quotidienne, les grands choix économiques et sociaux. Les gouvernements peuvent démanteler les services publics, la protection sociale sans que la population soit consultée sur ces choix fondamentaux. Il en est de même pour les interventions militaires françaises, en Afrique notamment, ou le choix du tout nucléaire imposé sans débat depuis 40 ans. Des millions de grévistes et de manifestants contre la réforme des retraites n’ont pas empêché Raffarin de répéter : « ce n’est pas la rue qui gouverne. » Mais lorsque les urnes prennent une claire position, comme lors du référendum sur le Traité constitutionnel européen, il n’est plus question de tenir compte de la décision majoritaire et de répercuter le choix populaire.

Il n’y aura pas de réelle démocratie politique tant que les capitalistes et les banquiers continueront à détenir le réel pouvoir économique et social, dans les entreprises - en soumettant tous les jours les salariés à la dictature patronale-, mais aussi dans toutes les grandes décisions concernant la société. La démocratie impose la remise en cause de la détention des leviers de commandes par une petite minorité, minorité à laquelle se soumettent les gouvernements et les grandes institutions. Mais nous pouvons nous battre dès aujourd’hui pour remettre en cause des institutions antidémocratiques qui accentuent encore plus cette coupure entre les aspirations du plus grand nombre et les choix des gouvernants. La lutte du CPE nous a montré que la démocratie pouvait s’imposer par la lutte et la grève.

Nous pouvons aussi nous battre pied à pied contre les institutions antidémocratiques de la Ve République :

En exigeant la proportionnelle intégrale pour les élections municipales, régionales, législatives, de même que la parité, le non-cumul et la limitation du nombre de mandats

La suppression du Sénat et de la fonction monarchique de président de la République.

Toute une série de choix démocratiques se heurtent à la réalité d’un système de classe dans lequel, de fait, les capitalistes possèdent un pouvoir largement supérieur à celui d’une assemblée élue.

La démocratie sociale dans l’entreprise implique une remise en cause du pouvoir patronal. Celle-ci ne peut se produire sans que la mobilisation populaire ne s’attaque à l’ordre existant, sans incursion dans la propriété privée des moyens de production, sinon cette démocratie reste virtuelle et sans aucune prise sur la réalité.

C’est donc bien seul un processus de mobilisation populaire qui pourrait aujourd’hui déboucher sur une Constituante, remettre en cause l’ordre économique, social et politique existant et redéfinir une nouvelle architecture.

Cette voie est à prendre en France, mais aussi au niveau de l’Union européenne qui reproduit, en les aggravant, tous les travers des institutions nationales.

En finir avec une France impérialiste et militariste

Avec une dette déjà remboursée plusieurs fois, la France, comme les autres pays occidentaux, fait crouler des millions de personnes sous la pauvreté.

Les salariés de ce pays, l’immense majorité de la population n’a aucun intérêt au maintien de cette situation qui ne sert qu’à enrichir les banques et les marchés financiers, permet d’imposer des plans d’ajustement structurels prônés par le FMI.

Abolition de la dette.

Nous devons aussi rompre avec la politique africaine de la France, sinistrement symbolisée par la complicité dans le génocide au Rwanda, qui sert les intérêts des grands groupes : Total, Bolloré, Bouygues, Vivendi,...

Retrait des 10 000 soldats français stationnés en Afrique

Indépendance monétaire des pays africains vis à vis de l’euro.

La France maintient des rapports de domination et d’exploitation avec ses dernières colonies. Les peuples de DOM et des TOM doivent avoir leur propre pouvoir de décision.

En Kanaky et à la Réunion, aux Antilles, en Guyane, et plus près de nous en Corse, les populations doivent obtenir le droit à s’autodéterminer, choisir librement leur statut et leur régime politique.

La course aux armements fait peser sur l’humanité le risque de sa propre destruction, pour le seul bénéfice de l’industrie d’armement et de ceux qu’elle enrichit et corrompt.

Suppression immédiate des armes de destruction massive, nucléaire, chimique ou biologique

Réduction drastique du budget militaire

Sortie du pacte militaire impérialiste de l’OTAN

Où prendre l’argent pour toutes ces mesures ?

Le patronat et le gouvernement voudraient nous faire croire qu’il est normal que la vie soit plus difficile, l’emploi plus rare, les systèmes de protection sociale moins avantageux... à cause de la faible croissance, de la mondialisation.

Ils se moquent de nous, les richesses produites ne cessent de croître, mais elles sont de plus en plus accaparées par les capitalistes. De 1980 à 1995, la répartition des richesses produites (le Produit intérieur brut, correspondant à toutes les valeurs ajoutées produites par les entreprises) s’est largement détériorée au détriment des salariés : 10 % de moins pour les salariés, 10% de plus pour le capital. Ce transfert n’a pas accru les investissements, mais renforcé les profits financiers. 10 % cela représente 160 milliards d’euros par an.

Prendre sur les profits pour augmenter les salaires et les moyens pour la protection sociale

Chaque année le budget de l’Etat supporte 40 milliards de remboursement de la dette publique au profit de ceux qui ont souscrit des obligations, parmi lesquels évidemment les plus riches clients des principales banques, ceux-là mêmes qui profitent des allégements de l’impôt sur la fortune, les sociétés et le revenu.

Annuler le remboursement de la dette publique

De cadeaux aux détenteurs de capitaux en largesses pour les plus riches, les politiques fiscales des gouvernements successifs ont abouti à des inégalités fantastiques.

Taxer les richesses

- Etablissement d’une très forte progressivité de l’impôt sur le revenu
- Suppression des exonérations qui ne profitent qu’aux revenus les plus hauts
- Taxation lourde du capital et de ses revenus : 1 % de la population détient 20 % du patrimoine national
- Suppression des impôts indirects, comme la TVA, qui constituent plus de la moitié des recettes fiscales et sont les plus injustes socialement car leur taux est le même pour tous, quel que soit le revenu. On peut avoir une idée des richesses accumulées par quelques privilégiés quand on voit que, alors que, la croissance n’a été que de 1.6 % en 2005, les bénéfices des sociétés cotées au CAC 40 ont augmenté de 27 %. Ces richesses volées aux salariés, on en trouve aussi la trace dans les « golden parachutes », ces primes de départs indécentes dont bénéficient les patrons des grands groupes, représentant plusieurs années de Smic !

Il faut faire d’autres choix sociaux, réquisitionner les richesses au profit du plus grand nombre en récupérant ces milliards accaparés par les patrons.

Comment imposer ces mesures ?

La vraie question n’est pas de savoir si l’argent existe pour satisfaire les besoins sociaux, c’est le cas à l’évidence. La vraie question est de savoir comment imposer de tels choix sociaux qui remettent en cause le pouvoir patronal, la propriété privée des moyens de production.

N’ayons aucune illusion. Nous l’avons vu ces dernières années, le Medef hurle dès qu’il n’a pas tout ce qu’il veut et les gouvernants, même de gauche, disent ne rien pouvoir faire contre les actionnaires, au nom de la liberté d’entreprendre, de la liberté du marché. Dominique Strauss Kahn, comme Ségolène Royal n’entendent pas remettre en cause le pouvoir et les privilèges patronaux.

Des mesures favorables aux salariés, la remise en cause du capitalisme, la rupture avec les exigences patronales ne pourront être le fait que de la mobilisation populaire, du rapport de force imposé par les travailleurs. On le voit bien en Europe, aujourd’hui. Tous les gouvernements libéraux sont régulièrement désavoués lors des élections générales, mais les gouvernements de droite et de gauche qui se succèdent continuent les mêmes politiques. Les salariés, hommes, femmes, jeunes et anciens attendent d’autres choix sociaux. Nous n’imposerons de telles solutions politiques qu’en changeant le rapport de force à gauche, qu’en créant une force anticapitaliste qui s’impose face aux forces résignées à la gestion du système.

C’est le but que poursuit la LCR, en s’adressant à ceux et celles avec qui nous menons tous les combats sociaux, qui se sont engagés, notamment ces derniers mois, dans la bataille contre le Traité constitutionnel, celle contre le CPE et la précarité. Assez de reculs et de défaites, assez de compromissions et de reniements. Notre mobilisation et notre détermination peuvent imposer des mesures d’urgence qui changent notre vie et nous débarrassent de la dictature capitaliste.


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