Rendre coup pour coup et manifester pour la VIème République ce 5 mai

mercredi 10 avril 2013.
 

En relisant mon précédent post, je me disais : on dirait que j’ai écrit tout ça dans un autre temps. C’est bien le cas. Les aveux de Cahuzac ont fait basculer le temps politique. Comme il y a un avant et un après Chypre, il y aura un avant et un après Cahuzac.

Moralement, même quand on n’y est pour rien, même quand au contraire on a prévenu sur tous les tons au prix de pluies d’injures et d’attaques les plus viles, on a quand même honte, parce qu’il s’agit de notre pays. Mais politiquement c’est jubilatoire de voir pris au piège de la vérité tous ces donneurs de leçons solfériniens ! Et de voir montrer madame Le Pen prise dans la chaîne du mensonge qui unit les belles personnes !

Ensuite intellectuellement, c’est très satisfaisant. Les événements confirment l’analyse sur la pente des événements qui fonde notre stratégie et nos méthodes de campagne. Ce régime est vermoulu jusqu’à l’os ! L’argent qui croyait tout « fluidifier » a tout desséché. Toute secousse l’atteint dorénavant au cœur. Lequel est en pâte à modeler ! Evanescent, incohérent, même au moment de faire des propositions pour produire je ne sais quel « choc » imaginé par des communicants à deux balles, le président trouve encore le moyen de proposer quelque chose de déjà censuré par le Conseil Constitutionnel. Ce qui en dit long sur l’inconsistance des équipes en place autour de lui !

Partisan de l’agir davantage que du seul parler, mes amis, après un tour de table avec mes camarades, je fais donc la proposition d’une marche pour la Sixième République. Et j’assume de proposer une date pour éviter de perdre du temps. Le 5 mai. Jour anniversaire du second tour de l’élection présidentielle. Jour anniversaire de l’ouverture des Etats Généraux de 1789…

Notre dénonciation de l’oligarchie prend des visages, des noms, des adresses. La communauté de mœurs, de vie, d’appétits, de fréquentations qui unissent les puissants du « bipartidarisme » éclate au grand jour. Voilà ce que j’appelle « l’officialisme ». Importants « officiels », partis « officiels », experts inamovibles « officiels », et ainsi de suite. Tous ceux-là se sont garantis une circulation libre et non faussée entre les camps politiques et les comptes en banque. Ils parlent tous la même langue internationale de la finance. Si bien qu’un Chinois véreux et un boucher-libraire, trésorier de la campagne de François Hollande, peuvent ouvrir ensemble un compte offshore sans problème linguistique pour se comprendre ! Mais ce n’est pas tout.

Le filet du silence et du harcèlement qui a accablé Mediapart a aussi joué son rôle : nous faire douter, hésiter. Nous enfermer dans nos propres exigences morales. Les faits démontrent que c’était la meilleure protection dont disposait le criminel. Psychologiquement, ce fut sans doute une aide précieuse pour lui, pour persister dans le mensonge. On peut même penser que c’est aussi ce qui lui a permis de croire que son subterfuge fonctionnerait jusqu’au bout ! N’empêche. Quand il est devenu de bon ton de supputer sur « le discrédit de la classe politique », j’y vois surtout un écran de fumée protecteur du naufrage d’une certaine caste médiatique. Les quatre-vingt tweet d’un Jean-Michel Aphatie pour mettre en cause l’enquête de ses confrères de Mediapart ont joué un rôle aussi important dans le pourrissement de l’affaire Cahuzac que les cécités volontaires des importants du Parti Solférinien et de leur gouvernement. Maintenant un nouveau piège autobloquant est tendu par l’officialisme médiatique. Critiquer et taper sur l’oligarchie ce serait dire : « Tous pourris ». Horreur ! Tant vaudrait signer une carte chez Déat et Doriot comme dirait l’infâme Attali. Je me suis fait avoir sur ce thème par Nicolas Poincaré. Peu lui importait ce que je racontais, il conclut : « Vous dites « tous pourris ». Alors vous dites « tous pourris » ? » Et moi comme un ballot : « Non, non, non, pas tous pourris ! ». Ce coup-là j’ai perdu. Mais il n’y aura pas de deuxième fois. Méfiance, la caste va se défendre.

D’ailleurs comme aux temps déjà si précurseurs de l’affaire Strauss-Kahn, on apprend à présent que « tout le monde savait ». Hervé Morin, ancien ministre de la défense, de droite, dans « le Parisien » révèle : « Il se disait depuis longtemps dans les dîners en ville que, sur dix cheveux transplantés par monsieur Cahuzac, neuf l’étaient au noir ! » Car dans les dîners en ville, en vacances, et que sais-je encore, tous les « officiels » se voient, se parlent, échangent des adresses pour les cheveux et que sais-je encore. Tous les officiels et donc aussi le chien de garde de la maison commune du fric, la troupe Le Pen. Voyez le financier de madame Le Pen. Il savait depuis vingt ans puisque c’est lui qui a ouvert le compte de Cahuzac et n’a rien dit ! Il a prévenu la madame qui savait donc et n’a rien dit non plus. Peut-être est-ce avec cette sorte de silence qu’elle a réussi à faire avancer sa dédiabolisation médiatique ? On apprend dans « Le Parisien » que ce financier des Le Pen a rencontré récemment monsieur Cahuzac dans un bar du seizième ! Il lui aurait annoncé qu’il allait avouer. Il est certain qu’il a prévenu madame Le Pen. Mais il n’a rien dit publiquement. Normal. Ces gens-là s’appelaient entre eux le « gang des implants » (Le Monde) ! Autrefois ils dînaient ensemble en vacances ! Mais oui ! Mais oui ! Je suppose que bientôt on en apprendra d’autres. Et on nous dira « tout le monde savait ! » Tout le monde ? Vous aussi madame Michu ? Noooon ! Et toi camarade du PS qui nous fait la leçon depuis des mois sur « ceux qui aident Le Pen par leur critique du gouvernement » ! Hein ? Toi aussi, tu allais en vacances avec le responsable du Front national de ton village comme le font tes chefs ? Va savoir ! « Tout le monde savait », qu’ils disent. « Tout le monde », ça veut dire « les officiels », les importants. Les autres n’existent pas à leurs yeux et rien ne le dit mieux que cette expression « tout le monde savait ». Les autres, c’est « personne ».

Bon donc, « tout le monde savait » que les implants de cheveux chez Cahuzac « se payaient au noir » ! Ah ! Ah ! Et si c’était là que s’était construite la chaîne du mensonge ? Tous ceux qui ont été se faire implanter des cheveux suaient peut-être à grosses gouttes en se demandant quand sortirait la liste des clients et le prix payé. Alors, ils regardaient ailleurs, ils croisaient les doigts, ils éteignaient les petites flammèches de l’incendie quand ils en trouvaient une à portée de main ! Hommes politiques, médiacrâtes, il doit y avoir un monde qui se tient par les cheveux et les paiements au noir de la coquetterie. Suivez les nouveaux cheveux, amis, si vous êtes curieux ! De toute façon je suppose que la justice va le faire. Car l’agent caché de monsieur Cahuzac venait bien de quelque part ? La justice va vouloir savoir d’où et de qui ! Petits ruisseaux ou grandes rivières, le nombre des mouillés va faire tignasse !

Nous n’en resterons pas aux gémissements et aux commentaires. Ni même aux sarcasmes bien mérités par toute cette engeance officialiste. Il faut entrer dans l’agir. C’est de notre honneur de citoyen dont il est question. De notre dignité de peuple libre. La décomposition politique des institutions a une origine : le mépris du peuple et le règne de l’argent. C’est là qu’il faut frapper et changer de cap. Mais avant même de discuter de cela, de son bien fondé ou non, c’est la règle de la discussion civique qu’il faut changer. La règle du jeu démocratique. C’est-à-dire la Constitution. Hollande veut encore la changer trois fois. Elle l’aura été plus d’une vingtaine de fois depuis sa promulgation. Jamais par une Constituante ! Et trois fois seulement au suffrage universel. Nous vivons sous l’empire d’un bricolage de circonstance, de convenance et de connivences.

La construction pyramidale de la Vème république aggravée par l’inversion des scrutins et le raccourcissement du temps des mandats produit des effets destructeurs de grande ampleur. Le résultat de la concentration du pouvoir sur le prince éphémère, on connaît. On sait à présent l’effet d’isolement et le sentiment de toute-puissance nombriliste que la fonction distille dans l’organe humain qui l’occupe. Mais cette culture du sommet redescend en cascade sur tous les échelons du pouvoir qu’ils soient élus ou technocratiques. L’arrogance est partout, la vertu civique passe pour un défaut de communication, le débat, un ennui passager. Les alternances, loin d’aérer le système l’ont durci et irresponsabilisé. Les « insubmersibles » sont les créatures nées de ce monde. Hauts fonctionnaires, experts auto-proclamés, rapporteur de commission Dugenoux et ainsi de suite, survivent à tous les changements politiques, s’entre-protègent à chaque alternance. Ils maintiennent une continuité qui n’est plus celle de l’Etat mais de la mode idéologique qui les a rassemblés, de la promotion qui les a fait se rencontrer. C’est cette chair pale et insipide qui séduit Hollande. Il s’entoure de technocrates sans idées, de condisciples de sa promotion comme d’autres des natifs de sa tribu, de politiciens sans consistance voués à lui comme autant de commensaux émerveillés de l’entre-soi que crée l’absence de convictions. Ceux-là n’ont finalement plus aucun lien avec le monde qu’ils prétendent représenter.

Quel est le fil de l’existence de telles créatures ? Eux-mêmes. Le contenu est venu d’ailleurs. Au bout d’un certain temps, depuis que cette évolution a commencé dans les rangs du PS, les sociaux-libéraux ont trouvé la pratique de leur théorie. L’argent ce grand fleuve qui charrie déjà tant d’eaux mêlées leur a paru non seulement moins suspect mais tellement familier ! J’imagine le processus. On entendit raconter que les coups d’épuisette revenaient pleins. Certains se demandèrent où jeter des filets. D’aucuns y pourvurent. On pêche même parfois à la dynamite. Dès lors, rien jamais ne leur paraît plus aussi immoral qu’ils l’avaient d’abord cru. Peut-être parce qu’ils ne voulaient rien savoir de leurs propres actes privés, ils étendirent la règle aux actes publics. Une doctrine émergea qui satisfaisait tout le monde : les traîtres et les lâches. Une doctrine assumée. C’est ainsi que Pierre Moscovici peut dire qu’un ministre n’est jamais un « salopard » qu’il soit de droite ou de gauche (Le Parisien). La fonction exempterait de la responsabilité morale. Non seulement celle du ministre comme personne mais celle de sa politique. Voilà une pensée typique du technocrate le plus fanatisé. Il croit qu’il n’est rien de plus que l’agent zélé d’une loi de la nature. L’accoucheur de l’histoire n’a aucune responsabilité sur la personnalité du bébé, en quelque sorte ! Cette raison « technicienne », de la politique, son absolutisme intrinsèque, est mère des pires horreurs dans l’histoire. De la sorte et au total, l’infection est partout. Le coup de balai est le meilleur remède disponible.

Qu’est-ce qu’un coup de balai en démocratie et en République ? Rien de plus qu’une décision prise par le peuple lui-même. Elle concerne les personnes mais surtout le système. Robespierre fit voter que les élus sortant de la Constituante ne pourraient être élus à la législative suivante. Plus proche de nous, Rafael Correa fut élu en Equateur la première fois avec comme programme la Constituante et la non rééligibilité des sortants. Retirer leur mandat à ceux qui l’exercent pour se donner la possibilité d’une page neuve ne doit pas être seulement un moyen réservé aux périodes d’exception comme celle que nous vivons. Ce doit être une option permanente pour le peuple souverain. C’est ce qu’ont introduit dans leur Constitution les vénézuéliens. Il existe la possibilité d’un référendum révocatoire sous condition de la collecte d’un certain nombre de signatures d’électeurs. Cette procédure a d’ailleurs été utilisée contre Hugo Chavez lui-même ! Mais le même pouvoir est reconnu au niveau municipal et même législatif ! L’usage du balai doit être un recours permanent de l’intervention populaire. Le référendum révocatoire permet d’articuler l’initiative politique du grand nombre et la stabilité institutionnelle dons a besoin toute société.

Mais bien sûr, l’idée de coup de balai a aussi une signification politique immédiate. Pour nous, elle concrétise l’idée « qu’ils s’en aillent tous ». C’est un acte d’éducation populaire destiné à valoriser l’idée qu’on peut se passer des puissants du jour. Que nous sommes aptes partout où nous sommes à faire bien mieux qu’eux. Et surtout c’est une préparation en profondeur de l’idée qu’il faudra tous s’en mêler pour conduire la rénovation sociale et républicaine à son terme. C’est pour cette raison que depuis les premiers moments, le Front de Gauche porte l’idée d’une Constituante pour aller vers la Sixième République et l’a inscrite dans son programme « L’Humain d’abord ». Dans la version initiale cette Constituante était même le premier point du programme. Il passa en six parce que des rédacteurs expliquèrent que « c’est le social qui motive nos électeurs ». Personnellement je n’ai jamais pensé cela. Je crois que le social est en ligne directe avec le plus pur de la politique qu’est la règle du jeu démocratique dans un pays de vieille tradition parlementaire et de libertés communales comme le nôtre. Les faits se sont chargés de donner les preuves dont certains manquaient pour y croire. J’admets d’autant plus volontiers qu’ils aient douté qu’on connaît bien la vieille tradition d’indifférence aux institutions qui habite depuis longtemps notre gauche. Mais le fait est que non seulement la Constituante et la Sixième République furent au cœur du programme mais que c’est sur ce mot d’ordre qu’ont été convoqué les trois plus grands rassemblements de la campagne présidentielle, à la Bastille, au Capitole et au Prado !

C’est de cette Constituante dont il faut parler de nouveau haut et fort. Car ce n’est pas une lubie idéologique que cette idée. C’est une réponse concrète à une question concrète. C’est elle, d’ailleurs la réponse complète au large problème posé. Car du simple fait qu’il s’approprie la définition de la règle commune le peuple redevient acteur et propriétaire de la société. Le faisant il se refonde lui-même. Il s’unifie en se définissant. La seule carte d’identité rend constituant. La Constitution ne se contente donc pas de s’imposer à tous elle appartient à tous. Evidemment, il faut pour cela qu’il y ait une Constituante ! Et il faut qu’elle soit préparée par une implication populaire de grande envergure. Les équatoriens fixèrent un lieu et un délai de plusieurs mois pour préparer ce qu’ils auraient pu régler à l’ancienne entre juristes en une semaine. Vers ce lieu convergèrent des délégations populaires de tout le pays. Au Venezuela on fixa aussi un délai et les articles proposés furent mis en débat dans tout le pays, expliqués et critiqués quartier par quartier, imprimés sur tous les supports de communication les plus quotidiens comme l’emballage des paquets de pâtes alimentaires…

Un tel objectif ne se sollicite pas. Il s’arrache. C’est l’action populaire qui imposera la Constituante. Personne ne peut croire que « l’officialisme » va convoquer ses juges ! En tous cas pas de bon gré. Evidemment ce sont les circonstances qui commandent l’avancée des idées. Ce moment de décomposition putride est propice à une prise de conscience. Je fais le pari qu’elle dépasse largement les seuls rangs de notre Front de Gauche. C’est pourquoi cette idée doit se transformer en force matérielle large, sans accaparement du thème. L’objectif n’est pas de réussir un coup de communication mais un coup de mobilisation. Si nous sommes forts l’initiative fera peut-être le déclencheur dont nous avons besoin pour remettre le pays en marche. On pourra répliquer l’initiative avec plus de facilité. C’est la stratégie qui prévalut pour organiser le trio Bastille-Capitole-Prado. Bien sûr il faut le réussir. Il n’y a pas de date parfaite. Il n’y a pas de lieux parfaits. Il faut donc aller de l’avant avec audace en se donnant les meilleurs points d’appui. Une fois regardé le calendrier de près c’est la date du 5 mai qui semble la meilleure. Plus tard on butte sur un grand pont. Plus tôt le délai n’est pas suffisant.

Le 5 mai est l’anniversaire du deuxième tour de l’élection présidentielle. Le 5 mai est l’anniversaire de l’ouverture des Etats généraux de 1789 qui rendirent le peuple souverain en France. Enfin, juste pour l’humour, apprenez que le 5 mai est la journée mondiale de l’hygiène des mains. En France cette journée mondiale est appelée journée « mains propres ». Ça ne s’invente pas. Le 5 mai me paraît un jour propice. Le 5 mai nous pourrions donc rendre coup pour coup et manifester pour la VIème République, nationalement cela va de soi. Cela va de soi parce que l’expérience nous montre que les manifestations décentralisées ne produisent pas le même effet d’entraînement et ne sont pas comptabilisées de la même façon.


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