Mon projet de société 2 Un vrai emploi, un vrai salaire (Olivier Besancenot)

dimanche 4 février 2007.
 

La baisse du chômage dont se prévaut le gouvernement est un tour de passe-passe statistique puisque les chiffres officiels du chômage diminuent alors que le nombre de salariés disposant d’un emploi n’augmente pas. Le chômage reste un chômage de masse qui touche encore près de 3 millions de personnes.

Droit à un emploi stable

Même si le CDI stable (hors CNE !) reste encore largement prédominant, tous les processus à l’œuvre concourent à renforcer la précarité et le maintien d’un chômage de haut niveau. Les emplois sont clairement devenus des variables d’ajustement pour les profits et aucun gouvernement récent ne s’est réellement opposé au droit régalien de l’employeur de licenciement.

L’intérim concernait 250 000 travailleurs en 1990, 650 000 aujourd’hui. On estime le nombre de chômeurs et de précaires entre 8 et 12 millions. Les luttes des dernières années et les réflexions des syndicats ont mis au cœur l’exigence du droit à l’emploi, la remise en cause du droit de licenciement, particulièrement scandaleux lorsqu’il concerne des entreprises largement profitables qui recourent à des licenciements pour convenance boursière.

Nous pensons qu’il faut clairement inverser la logique, en ne posant pas l’emploi comme une possibilité économique, mais comme un droit social. Cela impose de mettre la précarité hors la loi, mettre hors la loi tous ces emplois qui ne permettent pas de vivre de son salaire.

Le CDI stable et à temps plein comme unique contrat de travail. Le temps partiel ne peut être choisi que s’il n’est pas imposé à l’embauche et si le retour à temps plein peut être un choix automatique du salarié ( de la salariée, dans l’essentiel des cas). Re-qualification systématique des contrats précaires et des temps partiels

Interdire tous les licenciements

Tout licenciement abusif doit être déclaré nul de plein droit et se traduire par la réintégration immédiate du salarié concerné. Evidemment, le contrat CNE doit être abrogé.

Plus fondamentalement, il faut remettre en cause la logique même du licenciement, qui ramène, dans la pure logique libérale, le salarié à une variable d’ajustement.

C’est une incursion franche dans la propriété capitaliste à laquelle il faut procéder en mettant hors la loi le licenciement, en instituant la pérennité du contrat de travail, au-delà des changements de poste ou de qualification ; contrat de travail de la responsabilité totale de l’employeur, de la branche professionnelle ou du patronat local, au-delà des aléas de telle ou telle activité. A l’instar de ce qui concerne les personnels titulaires de la Fonction publique, le salarié doit avoir la garantie du maintien de son contrat de travail, de son salaire et de son évolution de carrière. Evolution technologique, formation, reconversion doivent se faire dans une stricte continuité de ce contrat de travail.

De tels choix ne peuvent être qu’imposés au patronat. Toute idée de seulement prolonger l’étude de solutions alternatives à des licenciements ne concerne que les licenciements collectifs faisant l’objet d’un « Plan de sauvegarde de l’emploi » (PSE :moins de 5% de l’ensemble des licenciements) et laisse finalement le patron seul juge et décideur.

C’est donc bien l’interdiction de tous les licenciements que nous revendiquons, la mise hors la loi du licenciement en imposant le maintien du contrat de travail.

Pour financer d’éventuelles défaillances à ces règles, un fonds de sécurité sociale professionnelle pourra être mis sur pied, financé par des cotisations patronales assises sur les salaires, et géré (comme devrait l’être l’ensemble de la Sécurité sociale) par des représentants des salariés.

En finir avec la pauvreté

Avec le chômage de masse s’est développée une pauvreté de masse. 7 millions de personnes vivent sous le seuil de pauvreté (selon les critères européens) soit un revenu inférieur à 890 euros par mois et par personne. 60 % d’entre elles sont des salariés.

1,2 million de personnes n’ont que le RMI pour vivre : 425 euros par mois. Le nombre de travailleurs pauvres ne cesse de croître. Le nombre d’emplois à bas salaires (moins de 980 euros par mois) aussi, 41 % en 1992, 50 % en 2001 .

De même l’emploi à temps partiel, 13, 1% en 1992, 16,5 % en 2003, avec le plus souvent des salaires bien inférieurs au Smic. La crise du logement frappe au premier plan les plus défavorisés. 29 % des SDF travaillent.

Reconnaissance que quiconque ne peut vivre en dessous du seuil du SMIC. Il n’y a pas pour nous de « minima sociaux » acceptables sous forme de charité, cantonnant une partie de la population active dans une situation d’assistés. L’absence d’emploi est la responsabilité pleine et entière du patronat.

Maintien, en cas d’absence d’emploi, d’une rémunération égale au salaire antérieur. Cela doit être la règle, ce qui implique que personne n’ait une rémunération inférieure au SMIC.

Augmenter les salaires

Mais au-delà, pour quelle raison accepterions-nous que le montant des salaires soit toujours calculé au plus juste alors que les profits explosent et que des dizaines de milliards d’euros valsent chaque jour dans les échanges d’action, dans des monopolys financiers d’achat et de revente d’entreprises, d’OPA qui sont toujours inamicales pour les salariés ? De 1980 à 1995, les patrons ont réussi à transférer 10 points de PIB ( autour de 160 milliards d’euros chaque année) de la poche des salariés à celles des patrons et des actionnaires. Evolution silencieuse, mais redoutable car elle s’est traduite par des profits colossaux pour quelques-uns et par une détresse quotidienne pour des millions d’entre nous.

Le SMIC doit être relevé à 1 500 euros net mensuels, soumis à l’ensemble des cotisations sociales sur les salaires.

Les salaires, dont le pouvoir d’achat a été érodé depuis de longues années, doivent être réévalués de 300 euros nets.

Ces deux mesures sont minimales pour que chacun puisse vivre décemment.

Certains experts et politiciens qui ne craignent pas les fins de mois difficiles diront que de telles mesures seraient mortelles pour la compétitivité des entreprises et accroîtraient le chômage. A cela nous répondrons que récupérer les sommes réservées aujourd’hui aux dividendes et à la spéculation n’a aucun effet sur la compétitivité...Par ailleurs, l’essentiel de nos échanges ont lieu au sein de l’Union européenne ou avec les USA, les différences très importantes de niveau de rémunération entre les différents pays de l’Union ou avec les USA n’a pas jusqu’à ce jour provoqué la mise au chômage des millions de Danois ou de Néerlandais, pourtant largement mieux rémunérés que les salariés français. Dans tous les cas, bien sûr, nous nous prononçons pour un SMIC européen correspondant dans chaque pays à un pouvoir d’achat similaire à celui de 1500 euros net en France...

Les inégalités de genre sont extrêmement profondes. Cette oppression des femmes (46 % de la population active) a pour conséquence de diviser les salariés et de parcelliser la classe ouvrière. C’est une arme du patronat pour dégrader la condition salariale dans son ensemble.

Pour parvenir à l’égalité salariale, il faut une réévaluation obligatoire des salaires et des carrières des femmes salariées pour les mettre au niveau de salariés hommes du même niveau de qualification, ce qui impose de reconnaître les qualifications des métiers « féminins » ( notamment santé et éducation).


Signatures: 0
Répondre à cet article

Forum

Date Nom Message