Poser les jalons d’une nouvelle majorité de gauche et d’un autre gouvernement

mardi 30 avril 2013.
 

La brutale dégradation du climat politique est évidente. Les causes en sont plus difficiles à analyser.

D’abord un constat : sur le terrain des mobilisations de rue et de l’occupation du champ médiatique, les anti- « mariage pour tous » ont pris l’avantage.

Alors que l’UMP reste sonnée par sa défaite et minée par ses affrontements internes, qu’il est difficile aux partis de droite d’attaquer le gouvernement sur la plupart des choix économiques qu’elle partage, de puissantes forces sociales de droite sont passées à l’offensive. Elles ont dégagé un espace politique, affirmé leur capacité à occuper la rue, voire à faire le coup de poing…

L’opposition va contre une évolution de la société qui paraît inexorable, car allant dans le sens de l’égalité et de la liberté des individus quelles que soient leurs orientations. Il n’empêche qu’il s’agit là d’une réelle bataille politique, pour deux raisons. D’une part, le pouvoir socialiste, même s’il ne fait qu’enregistrer une évolution de la société, peut se revendiquer sur cette question de la seule réforme progressiste qu’il assume. D’autre part, les données de la situation conduisent à une exacerbation des passions politiques réactionnaires : la défense acharnée de la conception conservatrice de la famille, la haine de la gauche et de tout ce qui a lien avec elle. D’où la possibilité de dérapages et d’affrontements plus brutaux.

La bombe Cahuzac

C’est à ce moment politique délicat qu’a fini par exploser la bombe Cahuzac au nez du gouvernement. Un gouvernement dont l’ambition est d’imposer une cure d’austérité en prétendant qu’à la différence de la droite il le fera avec justice. Avec Cahuzac ministre du budget ? Brisées vertu et justice, ne reste que l’austérité ! Ce qu’on a nommé « crise morale » est un incendie qui consume la légitimité d’un gouvernement qui se revendique de la gauche. Le Président, quitte à irriter certains de ses proches, cherche à l’éteindre par une grande opération de « moralisation » de la vie politique. Mais difficile de convaincre, lorsqu’on fait à chaud et trop tard ce qu’il aurait fallu mener avant et à froid.

D’autant que de tels efforts reviennent à écarter plutôt qu’à poser la vraie question, qui n’est pas morale mais politique. S’il devait y avoir corruption, il faudrait dire qui a corrompu qui, et pour quel service rendu.

Lorsque le pouvoir est de droite, il n’est pas trop difficile de répondre, l’opacité nécessaire ne cachant pas de vrais mystères : la droite n’a-t-elle pas pour fonction de défendre les intérêts des privilégiés ? Mais la gauche ? A ceux que choque le souci de « transparence » affirmé par François Hollande, en ce qu’il brouillerait la frontière entre le public et le privé, il convient de rappeler que la politique des grands groupes de l’industrie du médicament concerne la santé publique, la Sécurité sociale financée par les salariés. Toutes choses qui sont publiques et non privées (et en ce domaine il faut plus que jamais combattre l’envahissement du privé !)…

En fait, la dégradation du climat politique tient à ce que les affrontements politiques, au demeurant réels, voire non contrôlables, se déroulent de manière déviée par rapport à la question décisive : celle de la politique économique et sociale menée par le gouvernement. Une austérité qui conduit à la récession, à l’aggravation du chômage, à la régression sociale, est-elle celle dont la majorité de la population a besoin ? Si la réponse est non, et tel est d’évidence le cas, il s’agit pour le Front de Gauche de contribuer à l’unité des forces de son camp social et politique et de poser les jalons d’une nouvelle majorité de gauche et d’un autre gouvernement, ne reculant pas devant la confrontation avec le Medef, la finance, l’Europe libérale, pour mettre en œuvre une politique rompant résolument avec l’austérité.

Ce débat ne saurait rester confiné aux marges du Conseil national du Parti socialiste, et à François Bayrou qui exhorte François Hollande à ne pas céder aux pressions venues de la gauche du PS. Il doit se déployer dans la rue, travailler à la coordination des aspirations populaires et des secteurs de la gauche qui partagent cette perspective. Que le peuple de gauche s’exprime haut et fort, telle est l’exigence de l’heure. Si l’on veut stopper la dégradation du climat et contrecarrer les dérives démagogiques, il convient d’affirmer une forte ambition de changement social et démocratique.

Le 5 mai en est une première occasion avec la marche citoyenne contre l’austérité et la finance et pour la 6ème république.


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