L’économie de la mer, horizon politique

mercredi 5 février 2014.
 

Une fois de plus je vais commencer par situer l’enjeu de l’économie de la mer en décrivant rapidement la situation. La vie sur terre est totalement dépendante de la mer. Les océans représentent 70% de la surface de la planète. Plus des deux-tiers de la population mondiale vit à moins de 100 kilomètres d’une côte. La mer est obligatoirement la nouvelle frontière de l’humanité. La raison en est simple. L’expansion humaine a fini d’occuper l’essentiel de la surface disponible sur la terre ferme. Avec 7 milliards d’individus, l’humanité va se tourner encore davantage vers la mer pour y trouver les ressources qui lui manque à terre : alimentation, eau potable, énergie… N’en parlons pas au futur. La mer est d’ores et déjà la nouvelle frontière de l’humanité. Le mouvement est engagé. Comme d’habitude, cela se passe sous l’égide du capitalisme sauvage, sans plan ni précaution. Mais nous sommes bel et bien en train de vivre un bouleversement sans précédent dans le rapport de l’humanité à la mer, dans tous les domaines. Prenons un de ces exemples spectaculaires qui abondent sur ce sujet. Cette année, pour la première fois de l’Histoire, les quantités de poissons produits par l’aquaculture égalent désormais les quantités de poissons pêchés ! Le temps de la "cueillette" en mer est en train d’être dépassé. Exactement comme la chasse a été remplacée par l’élevage il y a près de 10 000 ans. Autre inversion historique : celles des routes de convoi des marchandises. Aujourd’hui, environ 90% du commerce mondial transite par les mers.

Mais on connaît le revers glauque de ces nouveautés. La pisciculture marine est souvent une abomination pire que celle des élevages de porcins. Quant au trafic Assises écosocialistes pour la mer - Introductionmaritime, on sait de quel prix se paient les dégazages sauvages, les naufrages volontaires des vieilles carcasses flottantes et les marées polluantes. Pour finir : les eaux de haute mer n’appartenant à personne, personne n’en est donc responsable ! Le productivisme peut donc frapper sans complexe. Nous mesurons déjà les dégâts. Il y a par exemple ce septième continent, fait de déchets plastiques flottants empilés sur plus de vingt mètres parfois. Il y aussi cette immense zone morte au large du Golfe du Mexique. Elle fait 22 000 km2, la taille d’un Etat des Etats-Unis d’Amérique ! La vie marine y a totalement disparu faute d’oxygène, à cause des pollutions d’origine agricoles qui viennent se déverser dans le golfe. Il y a les marées noires qui se multiplieront si nous laissons exploiter les hydrocarbures qui se trouvent au fond des mers. Comme par exemple ce projet de forage à 3000 mètres de fond, en face du cap Horn !

La mer aiguise de féroces appétits : c’est le premier réservoir des ressources rares. Elle contient 90% des réserves d’hydrocarbures de la planète et 84% des réserves soupçonnées de minerais et de métaux. Allons-nous laisser les firmes transnationales exploiter ces ressources comme elles l’entendent ? La mer est la première réserve de biodiversité. Aujourd’hui, nous connaissons à peine 15% de la faune et de la flore marine. Allons-nous laisser détruire cette merveille alors même qu’elle contient tant de réponses concrètes aux énigmes et aux limites actuelles de la connaissance en biologie ? Ce qui se passera en mer déterminera ce que sera la civilisation humaine à terre.

D’autant que les enjeux géopolitiques sont déjà à présent l’origine de tensions clairement discernables. La lutte pour l’appropriation de l’espace maritime est source de tensions entre les nations et à l’intérieur des nations. Dans chaque pays, ce sont les conflits d’usage entre pêcheurs et plaisanciers, entre implantation d’éoliennes ou d’hydroliennes et zones de pêche, entre littoraux urbanisés pour Assises écosocialistes pour la mer - Première table ronde.les installations portuaires ou pour les complexes touristiques et ainsi de suite. Mais entre les nations, il en va de même. Là aussi, les tensions deviennent papables. C’est la lutte pour l’appropriation des ressources rares. Des îlots au sous-sol maritime prometteur, hier ignorés, deviennent désormais des enjeux pour lesquels se déploient avions et navires de guerre entre Russes et Japonais et entre ceux-ci encore et les Chinois. Le réchauffement climatique et la fonte des glaces de l’Arctique renforcent ce phénomène. Les zones libérées des glaces ne sont pas toutes cartographiées. Où passe la frontière ? Par exemple, où s’achèvent les eaux territoriales de la Russie et où commencent celles du Canada ? Et à qui appartiennent le sol et le sous-sol marin ? On constate les tensions que génèrent aussi l’accès aux nouvelles routes maritimes rendues praticables par la fonte des glaces. S’il est possible de passer par le Pôle Nord pour relier l’Océan Pacifique et l’Océan Atlantique, les axes stratégiques changent. Et que devient le canal de Suez ? Et celui de Panama ? Les conséquences de la réponse viennent en cascade. Elles sont parfois inattendues. Exemple : aujourd’hui, le passage par Suez ou Panama limite la taille des navires. Or, les routes du nord annulent cette limite. Il y aura donc une course pour construire des navires toujours plus grands et donc des ports toujours plus grands pour les accueillir. Non, vraiment l’avenir de la mer n’est pas un long fleuve tranquille, n’est-ce pas ?

La mer est un bien commun menacé. Partout, la privatisation de ce bien commun est à l’œuvre. Voyez les ports privatisés comme le port du Pirée à Athènes. Voyez la multiplication des plages privées, les coupures dans la continuité du sentier du littoral, pourtant censé appartenir au domaine public. Récemment, Jean-Marc Ayrault a annoncé que, dorénavant, les navires pourraient être protégés en mer par des mercenaires privés pour compenser le désengagement de la Marine nationale. Et l’Union européenne a acté la création de droits de pêche qui pourront être vendus et achetés s’ils ne sont pas utilisés. C’est le mécanisme des Concessions de pêche transférables. Voilà ici une rupture idéologique et philosophique dans le rapport à la pêche. Cela revient à reconnaître un droit de propriété à chaque pêcheur sur une partie de la ressource. D’où vient ce droit ? Quel est sa légitimité ? Et la suite ne vaut pas mieux. De tels droits transférables développent la financiarisation de la pêche au profit des grands groupes. C’est pire que tout. Comme l’a dit Isabelle Autissier : « ceux-là placent de l’argent dans le poisson comme ils en placeraient dans la chaussette. Et le jour où il n’y a plus de poissons ils retournent dans la chaussette. Le pécheur, lui n’a pas d’autre choix que de préserver la ressource ». Le capital financier est une maladie mortelle pour la biomasse marine ! Pour les riverains de la mer cela ne vaut guère mieux. Je l’ai déjà mentionné : la moitié de la population française vit à moins 100 km d’une côte. La hausse du niveau des mers concernera tout le monde. Combien d’installations faudra-t-il déménager ? Qui va organiser ça ? Le marché ? Songez à cet aéroport de Nice par exemple, construit partiellement sur une avancée en mer. Que se passera-t-il avec la montée de la mer et donc l’érosion toujours plus forte des côtes ? Il suffit d’observer Assises écosocialistes pour la meroù on en est déjà partout sur le littoral grignoté. La mer grignote le bâti que l’argent roi lui impose bêtement sans précaution ni réflexion.

Ce survol ne serait pas complet si je ne mentionnais le lien des questions marines et maritimes aux questions de souveraineté. La connaissance et la défense du territoire national maritime sont des enjeux majeurs. Nous devons pouvoir protéger les navires français des pirateries avec notre Marine nationale. Nous devons pouvoir lutter contre la pêche illégale avec nos propres moyens de surveillance. La détection et la lutte contre les dégazages sauvages nécessite des moyens pour l’action de l’Etat en mer et pour les douanes. Et puis, notons encore ceci : notre souveraineté en matière d’approvisionnement pétrolier par la mer implique une forme de protectionnisme. Je note ce point pour que l’on comprenne l’enchainement de décisions qui conduisent de la souveraineté en mer à l’industrie. Pour garantir la souveraineté de notre approvisionnement, nous devrons utiliser l’arsenal législatif existant. Nous étendrons la loi de 1992, qui fixe un quota minimum d’importation de pétrole brut sous pavillon français. Cette loi doit s’appliquer aux produits raffinés et le quota déjà fixé doit être relevé. Cela suppose que nous soyons capables de construire, réparer, démonter et recycler nous-mêmes les navires affectés à cette tâche. Le tout, cela va de soi, dans des conditions sociales et écologiques de haut niveau dont nous seuls sommes capables.

Il faut aussi envisager notre rapport à la mer sous l’angle de nos responsabilités particulières. Grâce à nos outremers, nous disposons du deuxième territoire maritime du monde. C’est le plus étendu au monde, à peine inférieur à celui des Etats-Unis ! Le territoire maritime français représente plus de 16 fois le territoire terrestre. Combien de Français savent que ce territoire national s’est accru de 10 % sans une guerre, dans les années deux mille, parce que la France a pu remettre à temps à l’ONU les preuves scientifiques qui étaient exigées pour prouver la continuité physique des nouveaux territoires maritimes disponibles avec ceux déjà attribués à notre pays ! Quelles richesses sont ici contenues ? Nul ne le sait avec précision. Nous pouvons juste dire qu’elles sont considérables. Mais une au moins est connue et banale comme un courant d’air ou de mer. En matière d’énergies marines renouvelables, notre territoire dispose d’un énorme Assises écosocialistes pour la mer - Younous Omarjeepotentiel, le deuxième en Europe après le Royaume-Uni. Si nous voulons sortir des énergies carbonés et du nucléaire, nous aurons besoin des énergies de la mer. Ça tombe bien : c’est une batterie éternelle qui contient, au niveau mondial, une réserve énergétique quatre-vingt fois supérieur aux besoins actuellement recensés.

Face à ces enjeux, le moins qu’on puisse dire c’est que François Hollande n’est pas à la hauteur. Dans le meilleur des cas, il ne fait rien. Aveuglé par des abstractions idéologiques comme la "compétitivité" et la politique de l’offre, il ignore totalement les enjeux marins et maritimes. Il n’est pas le seul ! Il n’y avait pas une ligne sur la mer dans le rapport de Louis Gallois sur la compétitivité. Il n’y avait pas non plus une ligne dans le "pacte de compétitivité" que le gouvernement a présenté dans la foulée ! Quant à Montebourg, il n’y a presque rien sur la mer dans les 34 "plans filières" qu’il a présentés. On y trouvait à peine dix mots sur les énergies marines, noyés dans l’ensemble du plan sur les énergies renouvelables. Et un seul des 34 plans concerne spécifiquement la mer : il s’agit de la filière de construction des "navires écologiques". Mais même dans cette filière, le gouvernement n’agit pas. Ainsi, l’actionnaire majoritaire des chantiers navals de St Nazaire, le coréen STX a annoncé sa volonté de se retirer de ces chantiers. Ce sont les plus grands chantiers navals du pays. L’Etat détient 34% du capital. STX en détient 66%. Le départ de STX pourrait être l’occasion de retrouver une participation majoritaire dans ce groupe. Ce serait un atout précieux pour engager la bifurcation de la filière, pour construire mieux et déconstruire proprement les navires. Mais personne n’en parle au gouvernement. Comme d’habitude, ce sera l’improvisation et l’incohérence d’une équipe qui refuse de nationaliser Florange mais entre au capital de PSA.

Mais peut-être vaut-il mieux qu’il se tienne à distance. Car chaque fois que Hollande s’occupe de la mer, c’est pour faire une bêtise. En juin 2012, il a limogé Nicole Bricq du ministère de l’écologie parce qu’elle freinait les autorisations de forages pétroliers au large de la Guyane. Depuis, l’annonce principale du gouvernement aura été d’autoriser les gardes privés à bord des navires. Pendant ce temps, le gouvernement a réduit le budget de l’Etat consacré à la mer de 5% en 2013 et de 2% supplémentaires en 2014.

Le patronat de la mer aussi s’inquiète. Et pour cause. L’économie de la mer compte à cette heure 315 000 emplois et pèse plus de 50 milliards d’euros dans la richesse du pays. Sans compter le tourisme lié à la mer. Plusieurs chefs d’entreprises demandent à ce que l’Etat s’investisse davantage. C’est le cas de Patrick Boissier, le président directeur-général de DCNS. DCNS est un fleuron français dans le maritime militaire, mais aussi civil. C’est une des entreprises les plus en avance sur les énergies marines renouvelables. Son PDG s’est récemment plaint de la politique du gouvernement. Selon « Le Marin » du 5 décembre dernier, il a déclaré : "on n’a absolument pas les moyens de notre ambition de développement du maritime". Le président du cluster maritime français Francis Vallat a aussi émis des critiques. Il a fait part de "l’inquiétude générale sur les moyens de Défense et de l’action de l’Etat en mer". Il a critiqué sans détour un "État est encore trop hésitant" sur les énergies marines renouvelables lors des Assises de Assises écosocialistes pour la mer - Deuxième table rondel’économie maritime et du littoral organisées le 3 décembre dernier à Montpellier.

Pour nous, la mer est un domaine concret de l’écosocialisme. La manière dont nous entrerons en mer changera aussi nos manières d’être à terre. La mer n’est donc pas l’espace réservé à une pratique écologique tandis que tout continuerait comme avant ailleurs. Tout le contraire ! L’économie de la mer est le moyen d’étendre le modèle de l’économie écologique à tout le système productif, par contamination sélective, en quelque sorte, comme je l’ai décrit au début de mon propos. Par exemple, nous voulons développer l’aquaculture. Mais en tirant les leçons des folies de l’agriculture productiviste à terre pour ne pas les reproduire en mer. En retour, la tension productive à terre se relâchera d’autant que la mer cessera d’être un simple appoint agricole. La mer est un champ immense pour la planification écologique qui seule met en rapport entre eux les compartiments de la production. Prenons des exemples. Si nous voulons sortir des énergies carbonées et du nucléaire, il nous faudra produire de l’électricité autrement. Nous aurons besoin des hydroliennes, des éoliennes off-shore, de l’énergie mécanique des mers, de l’exploitation des différences de température entre le fond et la surface des mers… D’autant que les pêcheurs eux-mêmes ont des idées pour utiliser les installations comme les éoliennes en mer. Au large de la Bretagne, ils s’apprêtent à utiliser les pieds des éoliennes pour élever des coquillages. On peut aussi imaginer que les armatures des éoliennes pourraient servir de supports pour clôturer un espace d’élevage de poissons en pleine mer.

Mais sortir du pétrole suppose aussi de trouver des alternatives pour remplacer le pétrole comme base de production de tous les produits solides qui en sont dérivés, et en particulier du plastique. Le plastique fait à partir d’Algues est une des pistes alternatives. En Bretagne, on fabrique déjà des coques de téléphone, des porte-cartes et même des jouets de plages avec du plastique d’algues !

Une fois bien compris le potentiel qui est à notre portée, il faut raisonner. L’économie de l’offre, dans le contexte déprimé de l’économie européenne, c’est l’anémie généralisée durablement pour notre pays. En toute hypothèse, c’est stupide : laisser au marché le soin de découvrir les produits demandés, c’est s’interdire de peser sur le choix des activités à développer et, du coup, se rendre également incapable de Assises écosocialistes pour la mer - Christine Sandelfaire régresser d’autres activités que l’on veut voir décroître parce qu’elles sont écologiquement insoutenables. Cela signifie que la relance non plus ne doit pas être aveugle. C’est pourquoi elle doit partir d’un volant d’entraînement par des activités choisies qui, à leur tour, opèrent une sélection de demandes et de consommations. Notre scénario de relance est donc sélectif. L’entrée en mer consiste à organiser les filières en lien avec la maîtrise de la présence humaine en mer. La filière mer couvre un champ très large d’activités : recherche, construction et déconstruction navale, algo-culture, pisciculture, biotechnologie, énergie, tourisme bleu, et ainsi de suite. L’impact de la relance traverse tous les secteurs et toutes les régions. Exemple simple : à supposer qu’on puisse en installer beaucoup, les hydroliennes consomment des aciers fins et caractéristiques qui se fabriquent à Florange. L’effet d’entraînement traverse tous les métiers. Car l’investissement et les paies distribuées finissent par atteindre tous les compartiments d’activité ! Notamment ceux dans les services. Et spécialement parmi celle qui sont les premières sacrifiées quand le pouvoir d’achat est atteint ! Ainsi des coiffeurs. C’est au coiffeur qu’on renonce d’abord dès que les moyens viennent à manquer. Le coiffeur est à l’économie ce que les écrevisses sont aux rivières. Quand ils vont bien, c’est que l’écosystème économique n’abandonne pas trop de monde en chemin. Bref : un volant d’entraînement, c’est un engrenage vertueux.

Un tel appel d’air serait-il soutenable par notre population active ? Oui, en nombre, puisque la moitié de la population française vit à moins de cent kilomètres de la mer. Non, pour ce qui concerne les qualifications professionnelles disponibles. J’ai connu, comme ministre de l’Enseignement professionnel, la situation de la région de Saint Nazaire en 2001, quand il y avait plus de 2% de croissance, sous Jospin. La pénurie de main d’œuvre qualifiée était paralysante. Ici, je n’évoque que la situation du chantier naval. Car ce type deAssises écosocialistes pour la mer - Conclusion de Jean-Luc Mélenchon chantier met en mouvement des dizaines de métiers dont on n’imagine pas à première vue qu’ils sont concernés. Il faut le savoir : pour faire un bateau il y a beaucoup de menuiserie par exemple. En fait, tous les métiers du second œuvre du bâtiment sont sollicités en plus de toutes les taches strictement liées à la métallerie. Un chantier naval, en période de plein emploi régional et donc de pénurie de main d’œuvre, fonctionne comme un aspirateur à main d’œuvre qualifiée. Non seulement il en manque sur le chantier, et cela se paie d’une intensification des cadences, mais il en manque aussi partout ailleurs chez les artisans et les entreprises du coin. Même situation dans les métiers qualifiés liés au tourisme, depuis les métiers de la climatique en passant par tous ceux de l’hôtellerie ou de la restauration, qui ne consistent pas seulement à faire la cuisine la plonge et le ménage, toutes taches également moins simples, elles aussi, qu’il y parait au consommateur final. « L’entrée en mer » impliquera donc un terrible coup de collier éducatif pour préparer la main d’œuvre qualifiée nécessaire, de l’ingénieur à l’ouvrier hautement qualifié. Cela veut dire qu’une réorganisation substantielle de l’appareil de formation sera nécessaire pour mettre en place ou redynamiser les branches d’enseignement professionnel concernées. Et cela devra impliquer tous les modes d’enseignement et tous les types d’accès aux qualifications.


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