Les écosystèmes doivent constituer un bien commun de l’humanité

samedi 26 novembre 2016.
 

La préservation de la biodiversité est un enjeu déterminant. L’idée progresse que l’être humain et la nature forment un tout. Encore faut-il s’entendre pour mettre en œuvre les solutions qui permettent de ne pas détruire et la biodiversité et l’homme  ! C’est la question politique essentielle.

La préservation de la biodiversité un enjeu humain planétaire. En 1913, à Berne, est créée une commission internationale pour la protection de la nature. Le sommet de Rio (1992) met la biodiversité et le climat au centre des enjeux. À Johannesburg (2002), l’objectif est fixé de réduire de façon significative la perte de biodiversité. La réunion internationale de 2005 dite « évaluation des écosystèmes pour le millénaire » introduit la notion de services écosystémiques. À Nagoya (2010), on constate que la biodiversité poursuit sa constante régression. Depuis 2012, la « plate-forme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques », avec un groupe d’experts sur le modèle du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec), conseille les gouvernements.

Les dégâts sont déjà trop lourds  ! Une certitude s’impose : le rythme d’extinction d’espèces est bien supérieur à celui des « temps géologiques ». C’est la conséquence de notre mode de développement. La conception capitaliste de la croissance provoque des destructions d’habitats, des surexploitations de ressources biologiques ou des modifications d’écosystèmes par le changement climatique dû à l’utilisation d’énergie carbonée. Il y aurait environ 2 100 espèces menacées d’extinction dans le monde. Ce n’est plus supportable  !

Pollutions de toutes sortes, déforestation, atteinte à la qualité de l’eau ou des sols, méfaits d’une agriculture productiviste, privatisation des OGM ou des semences, destruction des pollinisateurs… Dans tous les cas, la biodiversité est menacée.

En France, le « Grenelle de l’environnement » (2010) devait garantir la qualité des écosystèmes, réduire les pollutions et enrayer la perte de biodiversité. Six ans après, le bilan est pauvre. Il y aurait en France, avec l’outre-mer, environ 1 000 espèces menacées de disparition  ! Avec la loi « pour la reconquête de la biodiversité de la nature et des paysages » adoptée le 8 août dernier, après deux ans de débats, peut-on enfin espérer une évolution positive dans les faits  ? Ce texte comporte des aspects positifs malgré les énormes pressions des lobbies industriels et agricoles pour préserver leurs profits et leur système productiviste.

Cela dit, la France va enfin ratifier le protocole de Nagoya. La non-brevetabilité du vivant est inscrite comme l’interdiction en 2018 (trop tardive  !) des pesticides néonicotinoïdes. On est plus clair sur la compensation des dégâts causés par des aménagements (principe de non-régression). L’exploitation des ressources génétiques naturelles est encadrée. La mobilisation offensive des parlementaires communistes a contribué à ce bilan.

En revanche, les moyens de l’Agence française pour la biodiversité, qui doit être opérationnelle en janvier 2017, sont totalement insuffisants. L’identification des espèces et le travail des écologues ont besoin d’un important développement de la recherche et les scientifiques doivent disposer des moyens humains nécessaires, en particulier le Muséum national d’histoire naturelle. C’est loin d’être le cas.

La marchandisation est une menace pour la biodiversité. Les « penseurs » du libéralisme considèrent que seuls la privatisation et le marché peuvent préserver la biodiversité. Des entreprises souhaitent mettre la main sur des écosystèmes (on achète bien des îles  !) pour s’accaparer des espèces, des gènes, des forêts ou des captages d’eau.

Ces services écosystémiques devraient être évalués pour être vendus  ! Le capital ne perçoit la biodiversité qu’à travers la valeur monétaire de ces services de régulation, d’approvisionnement (nourriture, eau…), culturels (récréation, tourisme…). Mais la valeur des éléments naturels ne relève pas que de leur utilité  ! En fait, le système en place veut transformer les biens et les services en objets de valeur quantifiables et échangeables via des mécanismes de marché. Mais comment délimiter l’échange  ? Qui est propriétaire du bien  ? Comment substituer des services avec d’autres de valeur équivalente  ? Cette méthode est une grave impasse. Il faut au contraire combattre la privatisation des services, organiser l’accès aux ressources génétiques par un partage juste et équilibré des avantages y afférents, permettre la traçabilité des OGM, utiliser les savoirs traditionnels autochtones. Le mécanisme de « compensation » de perte de biodiversité lié à un aménagement est dangereux s’il est lié à des valeurs marchandes.

En effet, le principe des réserves d’actifs naturels, qui fait des banques des opérateurs de compensation avec l’évaluation d’unités de biodiversité préservées ou restaurées, crée de fait un marché qui est le signe de la financiarisation de la nature.

Les rapports homme-nature au centre du combat de classe pour la préservation de la biodiversité.

Les écosystèmes doivent constituer un bien commun de l’humanité. C’est un combat de classe qui est engagé car la nécessité de rapports harmonieux entre les hommes et la nature ne pourra s’établir sans la même harmonie des rapports des hommes entre eux. Il s’agit de ne pas « oublier » le monde naturel et nos biens communs, mais en même temps de sauvegarder le monde de l’être humain. Le 37e congrès du PCF s’est à nouveau beaucoup intéressé à cette question. Avec le « temps du commun », nous proposons de bâtir un mode de développement privilégiant l’humain et l’écosystème dépassant le productivisme et le consumérisme. Cela implique de préserver et de partager les ressources naturelles, et la biodiversité est primordiale à cet effet. Nous voulons contribuer à l’émergence de modes de production et de consommation qui répondent aux besoins humains sur la base d’indices opposés à ceux des critères de profits financiers. C’est le sens du Mois de la biodiversité que nous organisons en octobre.

Par Hervé Bramy, Alain Pagano et Luc Foulquier Commission écologie du PCF


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