Dimanche 25 mai, ça va le faire...

dimanche 25 mai 2014.
 

La campagne est close dans quelques heures. J’ai fini la mienne sur le plateau de TF1 vendredi à vingt heures. Dans la journée, j’ai rédigé ces quelques lignes pour ramasser et résumer des arguments présentés déjà dans nombre de mes meetings et ceux de mes camarades partout dans le pays. Ce matin, je suis passé au siège du parti. J’y ai croisé quelques femmes et hommes de l’ombre, ceux de la campagne centrale du Parti de Gauche. Bastien Lachaud l’homme des matériels et tracts, Marie-Pierre Oprandi la trésorière nationale grâce à qui notre maison vit toujours au niveau de ses moyens et protège férocement notre indépendance financière. Et François Delapierre coordinateur général de nos campagnes. Chacun de nous a pu courir, et mille initiatives ont pu fleurir grace a cette forme disciplinée de centralité de l’organisation qui est une vraie culture collective chez nous. Jamais notre si petit parti, à peine douze mille adhérents, n’aurait pu accomplir un effort de cet ordre en enchaînant deux campagnes de masse et de recoins sans cette dialectique du centre et des réseaux qui est notre caractéristique. Ni sans cette furia si typique, qui lance dans un même mouvement des milliers de personnes dans le même assaut sous les formes les plus diverses, du bataillon de poulets, trouvaille géniale de Danielle Simonnet, au parcours patient et obstiné de nos caravanes dans le pays. Dans ma circonscription du grand sud-ouest, Michel et Jean ont traversé deux mille villages et parcourus 7000 kilomètres. De son côté, Raoul-Marc Jennar a tenu des dizaines et des dizaines de réunion de toutes taille pour informer sur le Grand Marché Transatlantique. Je ne cite que ces exemples au prix de l’injustice pour tous ceux qu’il faudrait citer que pour illustrer une idée. Nous avons fait une bonne, très bonne campagne digne et efficace. Advienne que pourra : tout fut fait bien et de grand cœur.

Je ne parle pas que de technique. Je parle de politique. Nous sommes parvenus a faire entrer le thème du Grand Marché Transatlantique dans le débat. Certes insuffisamment mais déjà bien profondément. C’est notre plus beau succès. C’est ce qui est politiquement le plus décisif. Des millions de gens ont appris par nous que tel était l’enjeu concret de cette élection. Je pense qu’ils vont petit à petit le réaliser à échelle bien plus importante. La puissance déflagratrice de cette histoire sera inouïe.

Dans cette note, je commence par une dénonciation à propos de l’organisation matérielle des élections. Je ne la crois pas innocente. On voit assez comment elle sert l’abstention espérée. Puis je viens sur quelques arguments qui ont émaillé mon propos pendant six semaines : la comédie de l’élection du président de la Commission, le Grand Marché, mais aussi l’étrange plateau de France 2 pour l’émission des paroles et des actes. Et la désertion de François Hollande dans ce débat pourtant si brûlant pour l’avenir. Je sais bien qu’on ne tire pas sur un corbillard mais quand même ! Ce président est moins qu’évanescent sur l’essentiel et plus que pesant sur l’accessoire. Il n’emportera pas au paradis sa forfaiture sur le Grand Marché Transatlantique qu’il a approuvé sans en parler à personne, pas même son équipe politiquement rapprochée.

En tous cas, vous autres, vous savez a quoi vous en tenir. Dimanche ça va le faire, j’en suis certain. Faites attention aux annonces de 20 Heures. A la présidentielle, LePen était annoncée à 20%. Le lendemain matin elle était à 17. Comme son papa l’ami d’ébola au mieux de sa forme. Mais pas mieux.

De l’art d’amplifier l’abstention

Une élection, ses rites et ses formes, c’est tout un. Que serait une élection sans isoloir ? Ou sans bulletins de vote ? Ou sans liste électorale ? Ces exemples permettent de comprendre la gravité de notre protestation ce vendredi. Le Parti de Gauche et le Parti communiste ont dénoncé les très graves dysfonctionnements dans l’envoi aux électeurs des professions de foi et bulletins de vote avant le scrutin européen de dimanche.

« Nombre de dysfonctionnements majeurs dans la communication aux électrices et électeurs des professions de foi et des bulletins de vote sont constatés partout en France (…) Des centaines de milliers de citoyens n’ont toujours rien reçu à trois jours du scrutin ou ont reçu des enveloppes incomplètes. Ce qui met en danger la sincérité du scrutin et renvoie ce manquement, voire le mécontentement, sur les maires », déclare le communiqué du PCF.

Le ministère de l’Intérieur a reconnu que les professions de foi des candidats aux élections européennes n’étaient pas encore toutes arrivées dans les boîtes aux lettres. Pourquoi ? Des « contraintes d’organisation » affecteraient un des prestataires. Quel charabia !

Certes, une part de ces dysfonctionnements tient aux conséquences des réductions stupides des dépenses publiques. Elles mettent l’Etat, pour la première fois depuis la Libération du pays, en incapacité de remplir ses missions régaliennes les plus élémentaires. Mais tout ne vient pas des politiques d’austérité. Je rappelle que Manuel Valls, lorsqu’il était ministre de l’Intérieur, voulait déjà cesser l’envoi par courrier des circulaires et bulletins de vote. Il se serait bien contenté d’une mise en ligne sur internet. D’après lui, et avant que le même argument resserve pour justifier la nouvelle réforme territoriale de Hollande, la démocratie et son expression ont un coût. « En fait, ce gouvernement craint la participation démocratique et la condamnation de sa politique d’austérité en France et de la soumission de François Hollande au traité budgétaire négocié par Nicolas Sarkozy et Angela Merkel », écrit le PCF !

Pour le Parti de Gauche, « ces erreurs sont dues aux entreprises privées choisies à l’issue d’un appel d’offres européen promu par les tenants de la concurrence libre et non faussée. La préparation des élections européennes est à elle seule un plaidoyer contre les diktats européens. La privatisation du processus électoral remet en cause le bon déroulement du scrutin et met en péril la démocratie elle-même ».

« Pourquoi les services de l’Etat n’assurent plus eux-mêmes l’acheminement du matériel électoral ? Seraient-ils moins compétitifs ? Ils étaient pourtant plus compétents », avons-nous rappelé ! Et nous avons lancé un appel « pour rétablir la régularité de ce scrutin ». Le PCF demande des mesures d’urgence pour y parvenir. Le PG demande à « tous les citoyens » de « faire remonter toutes les informations » sur les dysfonctionnements qu’ils constateront.

Schulz, l’attrape-nigauds du PS

C’est la bouée de sauvetage à laquelle s’accroche le PS. Le PS répète matin, midi et soir que les élections européennes vont désigner le prochain Président de la Commission européenne et qu’il faudrait choisir entre un candidat de droite, le Luxembourgeois Jean-Claude Juncker et un candidat social-démocrate, l’Allemand Martin Schulz. C’est un mensonge juridique : les traités européens n’obligent à rien de semblable ! C’est le conseil des chefs d’Etats et de gouvernements (et lui seul) qui choisit de proposer un nom (et un seul) qui est ensuite soumis au vote du parlement européen ! Et ce nom n’est même pas obligatoirement un de ceux des candidats déclarés ! Quant au prétendu « choix » politique entre Juncker et Martin Schulz, c’est un attrape-nigaud politique. Il n’y a pas de différence entre eux. Et ce sont eux-mêmes qui le disent. D’ailleurs, le PS et la droite ont décidé de proposer ensemble un nom (et un seul) au vote du Parlement après les élections ! Toute la campagne des socialistes est donc fondée sur un mensonge et sur une escroquerie.

Un mensonge répété plusieurs fois ne devient pas une vérité. François Hollande et Manuel Valls peuvent donc dire partout que le vote de dimanche décidera du nom du prochain président de la Commission : c’est faux. Pourtant François Hollande a écrit dans sa tribune du 9 mai dans Le Monde : « pour la première fois, les électeurs, par leur vote, désigneront le futur président de la Commission européenne ». Un pur bobard. Démonstration. Le traité de Lisbonne est très clair. La procédure est prévue à l’article 17, alinéa 7. Que dit-il ? Exactement ceci, « en tenant compte des élections au Parlement européen, et après avoir procédé aux consultations appropriées, le Conseil européen, statuant à la majorité qualifiée, propose au Parlement européen un candidat à la fonction de président de la Commission. Ce candidat est élu par le Parlement européen à la majorité des membres qui le composent. Si ce candidat ne recueille pas la majorité, le Conseil européen, statuant à la majorité qualifiée, propose, dans un délai d’un mois, un nouveau candidat, qui est élu par le Parlement européen selon la même procédure ».

C’est donc très clair : c’est le Conseil des chefs d’Etat et de gouvernement qui décidera. Le Parlement européen ne pourra qu’approuver ou rejeter la proposition. Hollande et Valls et le PS mentent. La seule nouveauté du traité de Lisbonne est l’ajout de la mention « en tenant compte des élections au parlement européen ». Mais « tenir compte » pour dire comment et à partir de quoi le choix du conseil des chefs d’Etat et de gouvernement fait sa proposition de nom de candidat. Ainsi, la chancelière allemande Angela Merkel a déjà indiqué sans ambages que les chefs d’Etats pouvaient choisir « qui ils voulaient ». Pour elle, choisir le futur président parmi les cinq candidats déclarés n’est que « facultatif ». Elle a juridiquement raison. Et politiquement aussi. Car « tenir compte » veut dire « choisir n’importe qui du moment qu’il est capable d’avoir une majorité » ! Le seul socialiste qui aura un pouvoir réel dans le choix du prochain président de la Commission européenne, c’est François Hollande, à la table du Conseil des chefs d’Etat. Hollande acceptera-t-il de proposer un président de la Commission européenne de droite ? Voilà la seule question qui est juridiquement fondée !

L’arnaque est évidemment politique. Le plus grand enfumeur a été Manuel Valls lors de son passage à TF1 le 11 mai dernier. Il a osé affirmé que « au fond, il y a un débat qui s’installe en Europe entre la gauche, représentée par Martin Schulz qui est le président actuel du Parlement européen, et la droite, qui est représentée par le conservateur Jean-Claude Juncker qui est l’ancien Premier ministre luxembourgeois. Et là il y a un choix décisif ». Il y a quasiment un mensonge par ligne ! D’abord il n’y a pas que deux candidats déclarés mais cinq. Outre Juncker et Schulz, il y a aussi notre candidat, notre camarade grec Alexis Tsipras. Il y a aussi le candidat des amis de Monsieur Bayrou, le libéral belge Guy Verhofstadt. Et il y a la candidate des Verts, l’allemand Ska Keller. Initialement désignée en binôme avec José Bové. Finalement les Verts européens ont décidé que c’est elle qu’ils mettraient en avant dans les débats télévisés européens, écartant José Bové, du fait de ses positions sans doute.

Surtout, il n’y a pas de choix politique entre Martin Schulz et Juncker. Ce n’est pas moi qui le dis. Ce sont Schulz et Juncker eux-mêmes ! Vous savez que j’ai lu les citations de ces deux messieurs dans tous mes meetings. Pas un PS ne s’est donné le mal de démentir. Je me répète donc. Voici ce que répond le social-démocrate Martin Schulz à propos de son « concurrent » Jean-Claude Juncker : « Je ne sais pas ce qui nous distingue ». C’était le 9 avril dernier, dans un débat télévisé sur la chaine France24. Et que dit Jean-Claude Juncker du candidat de François Hollande ? Il dit ceci : « Martin Schulz, le champion des socialistes, n’est pas un ennemi. C’est un concurrent. Je ne pense pas que la campagne consiste à dire du mal de l’adversaire et pointer des différences là où il n’y en a pas. Nous sommes sur la même ligne ». Il a déclaré cela au site internet Luxembourgeois L’essentiel, le 16 avril dernier. Tous ceux qui s’intéressent à l’élection le savent. Ça n’empêche pas les socialistes de faire semblant ! Une tromperie délibérée, froidement mise en scène, et rabâchée jusque sur le plateau de « Des paroles et des actes » !

Schulz et Juncker sont effectivement les deux faces d’une même médaille. Martin Schulz incarne jusqu’à la caricature l’alliance du Parti socialiste européen avec la droite. Il est membre du SPD allemand qui gouverne l’Allemagne avec Angela Merkel ! C’est même lui qui a écrit la partie européenne de l’accord de coalition. Ça n’a pas dû être trop difficile vu que le SPD avait toujours soutenu Angela Merkel au Parlement allemand sur les enjeux européens. Le SPD a voté pour le traité budgétaire Merkel-Sarkozy le 29 juin 2012. Le SPD a voté pour le Mécanisme européen de stabilité le même jour. Le SPD a approuvé les plans « d’aides » à la Grèce et à Chypre lorsque le Parlement allemand a été saisi. C’est-à-dire qu’il a approuvé les mesures d’austérité exigées du gouvernement grec en échange du « soutien » européen. L’Allemagne n’est pas une exception. Les sociaux-démocrates gouvernent avec la droite dans 16 pays européens sur 28 ! Cette Europe-là c’est celle que nous combattons chaque jour ! C’est la leur, celle de la coalition permanente et générale de la droite et de l’UMP

Schulz incarne de plus personnellement cette alliance avec la droite. Il a été élu président du Parlement européen avec les voix de la droite en vertu d’un accord de partage des places entre le PS et la droite. A mi-mandat, la droite a laissé la présidence à Schulz. Le PS et la droite co-gérent l’Union européenne depuis des années. Depuis 2004, le Parti socialiste européen est l’allié permanent, docile, de Jose Manuel Barroso. Sans le PSE, il n’y aurait jamais eu de présidence Barroso : en 2004, Barroso est devenu président de la Commission grâce à un accord entre la droite et le Parti Socialiste Européen. Le PSE comptait 6 commissaires dans la 1ère commission Barroso, entre 2004 et 2009. En 2009, la reconduction de Barroso à la tête de la Commission a été soutenue par 7 gouvernements du Parti socialiste européen. La quasi-totalité des députés européens du PSE a voté « pour » l’investiture de Barroso pour un 2e mandat le 9 février 2010 avec la droite. D’ailleurs, la Commission sortante compte 7 commissaires socialistes ou sociaux-démocrates dont 3 Vice-présidents de la Commission. Savez-vous par exemple que la baronne Ashton qui s’affiche avec les néo-nazis ukrainiens est membre du Parti Socialiste Européen ? Elle est la première vice-présidente de la Commission, Haut représentante pour les Affaires Etrangères. Savez-vous que le commissaire européen à la Concurrence, qui pourchasse les aides publiques aux entreprises, est membre du Parti Socialiste Européen ? Il s’agit de l’Espagnol Joaquin Almunia. Savez-vous que le PASOK grec a aussi une commissaire en la personne de Maria Damanaki ? Savez-vous que Lazlo Andor, le commissaire à l’emploi, responsable du record historique de chômeurs, est membre du PSE ?

Le PS et la droite ont déjà prévu de se mettre d’accord sitôt les élections passées pour continuer cette cogestion. Le PSE et la droite auront un candidat commun pour présider la commission européenne. J’ai dénoncé cette combinaison politicienne dès le 7 avril dernier. De quoi s’agit-il ? Les groupes du PS, des conservateurs et des libéraux au Parlement européen l’ont dit explicitement dans une déclaration commune du 3 avril. Ils annoncent clairement : « nous soumettrons conjointement une proposition au Conseil européen » des chefs d’Etats et de gouvernement. Le « choix décisif » dont parle Valls a fait pschitt : il n’y aura qu’un candidat à la fin. Au lieu de chercher des différences qui n’existent pas entre la droite et le PS en Europe, demandez-vous plutôt pourquoi le PS n’a pas proposé au groupe des Verts et à notre groupe de la Gauche Unie Européenne de faire une « proposition conjointe » ? Pourquoi un tel sectarisme à notre égard ? Où sont passés les donneurs de leçon « d’unitééééé » dont le PS regorge pour faire taire tout le monde et camoufler ses turpitudes ?

La réalité est claire. Pour faire une « proposition conjointe », il faudrait un programme commun. Ce programme commun existe entre la droite et le PS en Europe. Il se résume en quelques mots. Ils sont d’accord pour le Grand Marché Transatlantique avec les Etats-Unis. Ils sont d’accord pour appliquer les politiques d’austérité qu’ils mènent à tour de rôle depuis 2011 en Espagne, Portugal, Italie. D’ailleurs, ils les mènent ensemble comme en Grèce, Italie ou Irlande. Ils sont aussi d’accord pour laisser continuer le dumping social comme l’a prouvé leur vote commun pour la poursuite du système des travailleurs détachés en avril. Autre exemple : le PS et la droite sont d’accord pour poursuivre la libéralisation des services publics comme l’a montré leur vote commun pour le 4e paquet ferroviaire en février dernier. Votez pour le PS et pour Schulz, c’est voter pour ce programme commun de la droite et du PS en Europe dont chacun a le résultat sous les yeux. Pour que cette co-gestion cesse, aidez-nous ! Socialistes de base, rompez les rangs ! N’aidez pas à cette mauvaise action de tromperie !


Signatures: 0
Répondre à cet article

Forum

Date Nom Message