Roanne, la rebelle aux 1000 cheminées

lundi 28 juillet 2014.
 

L’histoire de la ville de Roanne est celle d’une grande cité industrielle autour de 3 pôles d’activités, tous mis à mal par le capitalisme financier et des mesures de délocalisations.

De 1970 à aujourd’hui, le textile et les Ateliers Roannais de Construction Textile (ARCT-Crouzet) sont passés de 30.000 à 2.500 emplois

La métallurgie est passée de 25.000 à 2.000 emplois.

L’Arsenal (chars, obus et métallurgie militaire) est passé de 3.500 à 700 emplois.

La population de Roanne, victime de plusieurs restructurations sociales, est passée de 60.000 à 35.000 habitants, dont 30% sous le seuil de pauvreté, et plus d’1/3 de la population au chômage.

Le GIAT, Groupement Industriel des Armements Terrestres, regroupait à l’origine les manufactures d’armes et arsenaux (3.500 salariés).

En 2006, il devient Nexter, en bradant de nombreux sites.

C’est le point d’orgue d’une stratégie de privatisation rampante, bien que l’état en reste actionnaire à 100% sous une holding GIAT Industries.

Il est à noter que Nexter a toujours été bénéficiaire.

Le 1er juillet 2014, le PDG annonce la privatisation de Nexter, l’état ne devant conserver que 50%, sous le nom de KANT, fusionnant avec le groupe allemand Krauss Maffei Wegmann, dont le siège situé aux Pays-Bas est fiscalement avantageux.

Les deux sociétés ont des activités et des matériels assez proches, ce qui laisse entrevoir une nouvelle casse des emplois.

Or Nexter Roanne possède un savoir-faire et une unité de production très performante, sans parler des perspectives d’avenir qui méritent que l’on s’y attarde.

Il faut rappeler que ce projet de fusion arrive au moment où l’armée subit un plan social terrible depuis 2008 (80.000 soldats et personnels à terme). La « Grande Muette » a fait savoir par ses généraux qu’elle en avait marre de subir sans rien dire. Avec un budget de la défense réduit de moitié en 30 ans et un effort militaire concentré entre 30 et 40% sur l’armement nucléaire, l’idée de créer un grand marché de l’armement poursuit son chemin. Un seul mot d’ordre règne pour accompagner les coupes budgétaires de l’armée, la « mutualisation » des moyens.

L’état a toutefois peur de faire supporter cet effort considérable au seul corps militaire faisant surgir le spectre d’un syndicalisme dans l’armée.

Alors, il reste cette solution de dissoudre des unités civiles en les contraignant à s’intégrer dans des groupes financiers. C’est une manière pour le gouvernement d’apaiser les esprits d’un coté et de maintenir des objectifs libéraux remettant en cause notre souveraineté nationale.

Pourtant, Nexter Roanne à ce jour possède les moyens d’assurer le maintien de ses emplois, mais également d’en créer. Ses missions essentielles pour répondre aux besoins de l’armée de terre sont la fabrication de chars VBCI (transport de troupes) et la maintenance des chars Leclerc.

D’ici 2 à 3 ans, le renouvellement important de blindés arrivés à terme de vie envisagé dans le programme « Scorpion » inscrit dans le livre blanc de la défense, permettra non seulement de préserver l’emploi existant mais nécessitera la formation qualifiante de nombreux jeunes.

Par contre, si la privatisation de Nexter et le désengagement de l’état devaient être prononcés avant la fin de l’année, cette opération n’aurait qu’un objectif à court terme, exciter l’appétit des requins de la finance. En effet, en donnant naissance à un groupe européen chargé de mutualiser les efforts de production de différents pays dont la France, un marché s’ouvrirait avec les américains dans le cadre d’un « marché transatlantique ». C’est tout simplement cela dont il s’agit.

Les camarades du site de Roanne, dès à présent, travaillent à une alternative à cette privatisation rampante.

Un important projet est d’ores et déjà réalisable immédiatement : Un « Pôle de Déconstruction » de matériels lourds (trains, camions, engins,…) permettrait de relancer l’activité du canal, ce qui outre une activité porteuse de centaines d’emplois représenterait un double impact écologique positif :

- La réutilisation et l’acheminement de lourds métaux au lieu de les laisser à l’abandon.

- Le retour de péniches sur le canal, qui présente cet avantage de protéger naturellement les rives, comme de nombreuses études l’ont prouvé.

Le Parti de Gauche soutient pleinement le combat des militants de la CGT Nexter et ces projets porteurs d’avenir social et d’indépendance nationale.

La création d’un pôle public de la défense est la réponse d’intérêt général à la loi du profit en œuvre depuis des décennies. Il devra inclure un budget de diversification dans une perspective de démilitarisation.

Au-delà de la médiatique lutte des « 5 de Roanne » (46 mois de lutte contre une intimidation policière et juridique), les têtes dures sont bien décidées à empêcher la privatisation de Nexter, assurer l’indépendance de la production de nos matériels militaires, et construire la transition écosocialiste.

Philippe Juraver et Jean-Paul Renoux


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