Front national : un congrès (inter)national… Une alliance avec le pouvoir russe

lundi 8 décembre 2014.
 

Le week-end dernier à Lyon, le congrès du FN ne révélait pas de véritables enjeux en termes de direction. La présidente était l’unique candidate à sa réélection... et a été en toute logique « élue avec 100 % des voix ». Les orientations ne faisaient l’enjeu d’aucun débat contradictoire : au FN, les choix idéologiques s’effectuent à travers les choix de personnes, mais ne sont jamais discutés ouvertement.

Dans ce contexte, les repères internationaux constituaient un enjeu relativement important de ce congrès. En amont, un débat sur la stratégie internationale avait durement opposé, depuis le mois d’août, Aymeric Chauprade – chef de file des députés FN au Parlement européen – et l’antisémite professionnel Alain Soral. Les positions de ce dernier, se voulant « résistant au Nouvel ordre mondial » et à « l’Empire américano-sioniste », sont plus ou moins partagées par certains cadres du FN, même si Soral est en dehors du parti depuis 2009. Chauprade avait, lui, prôné de s’allier au pouvoir russe et à la droite israélienne « contre l’islamisme » présenté comme l’ennemi principal. Chauprade sort marginalisé de ce congrès : alors qu’une vice-présidence avait été évoquée pour lui, il n’entre finalement dans aucune instance dirigeante.

Une partie de la direction du FN était récemment montée au créneau pour demander le vote favorable du FN à l’Assemblée nationale concernant la reconnaissance symbolique d’un État palestinien. Au sein du FN, cette question est évidemment reliée à une autre, cachée, qui consiste à savoir quelle place est donnée à l’anti­sémitisme par rapport au racisme anti-arabe. Marion Maréchal-Le Pen avait initialement plaidé pour un vote favorable, même si elle a finalement choisi de s’abstenir.

Concernant l’alliance avec le pouvoir russe, les choses sont en revanche très claires... Neuf millions d’euros de crédit accordé au FN par une banque russe, il s’agit de tout sauf d’une question apolitique. Si les informations de Mediapart sont exactes, Marine Le Pen avait rencontré Vladimir Poutine lui-même, en février 2014, avant que ce crédit ne soit accordé au parti. Les liens avec le pouvoir russe ont été affichés au grand jour, à l’occasion de ce congrès, puisqu’un vice-président de la Douma, Andreï Issaïev, et le chef adjoint de la Commission des affaires internationales du Sénat russe, Andreï Klimov, étaient présents...

Les deux faces d’une même pièce

L’élection au Comité central du FN, instance d’une centaine de membres sans véritable pouvoir de décision, a toujours servi de baromètre pour mesurer la popularité de tel ou tel dirigeant. Marion Maréchal-Le Pen a fait un gros score et a raflé la première place, avec 80 % des voix. Présenté comme son grand rival parce qu’incarnant un positionnement stratégique différent, Florian Philippot a dû se contenter de la quatrième place avec 69 % des suffrages. Ceci n’est cependant pas une déroute, que certainEs avaient espérée ou redoutée. Les deux figures du parti vont ainsi pouvoir continuer leur route...

Vu par beaucoup comme un « technocrate », Philippot, 33 ans et au FN depuis seulement trois ans, passe pour un conseiller ayant l’oreille de la présidente, ce qui lui a assuré une fulgurante carrière de vice-président du parti. Il représente une ligne qui mise avant tout sur les sujets économiques et sociaux, sur lesquels le FN doit se substituer à la gauche, pour marginaliser celle-ci et monopoliser l’opposition au libéralisme. Marion Maréchal-Le Pen fait partie de celles et de ceux qui pensent que « ça commence à faire beaucoup » en termes de discours social (voire « socialisant » à leurs yeux), et qu’il ne faut pas négliger les intérêts du petit patronat, ainsi que le combat autour des « valeurs », notamment celles opposées au mariage homosexuel.

http://www.npa2009.org/

Bertold du Ryon

A) En congrès à Lyon, le FN postule au pouvoir...Danger ! (par Ensemble)

https://www.ensemble-fdg.org/conten...

Le FN se veut au centre d’une recomposition / rassemblement de toute l’extrême-droite et de la droite extrême et vise un électorat encore plus large, déboussolé par les repères brouillés entre la « gauche » et la « droite ».

Lyon n’a pas été choisie par hasard pour la tenue de ce congrès national du FN qui se veut celui du lancement de la « conquête du pouvoir en 2017 ».

En effet, s’il n’est pas puissant à Lyon intramuros, il dispose d’une implantation importante dans les villes périphériques et dans le reste du département. D’autre part, tous les groupes radicaux et violents y pullulent : ceux dissous (Jeunesses Nationalistes et Œuvre Française d’Alexandre Gabriac et Yvan Benedetti, ce qui ne les a pas empêché de présenter une liste aux Municipales à Vénissieux qui a fait plus de 10% !) comme les autres, tels les « Identitaires » dont le leader Damien Rieu vient d’être embauché comme « chargé de communication » par le maire FN de Beaucaire. Enfin, le FN s’intéresse aussi à la droite extrême qui s’est particulièrement mobilisée à Lyon dans les manifestations antimariage pour tous. Le FN se veut au centre d’une recomposition / rassemblement de toute l’extrême-droite et de la droite extrême et vise un électorat encore plus large, déboussolé par les repères brouillés entre la « gauche » et la « droite ». Il s’agit aussi d’envoyer un message de réconciliation entre Marine le Pen et Bruno Gollnisch.

Prenons la mesure de ce que nous impose l’actuel changement de situation. Les modalités anciennes de dénonciation du FN ont perdu de leur force, et les diverses formules de « front républicain » ne font plus recette. Le développement des crises qui travaillent la société française et l’Europe ont conduit à placer le FN au cœur de ces crises, s’en alimentant et les aggravant. On voit les partis largement majoritaires au Parlement européen, sociaux-démocrates et conservateurs, relayer les politiques ultralibérales. Les forces de la gauche radicale peinent à convaincre de la possibilité d’une refondation de l’Europe, sur la base d’une rupture avec les politiques d’austérité imposée par une mobilisation des peuples d’Europe.

Dans nombre de pays il ya donc une montée des forces nationalistes. Face à des menaces bien réelles et s’enflant de colères légitimes, prend force l’illusion de l’utilité, pour se protéger de la concurrence aux échelles mondiale et européenne, d’ériger de nouvelles frontières, sans qu’il soit besoin de préciser ni leur tracé exact, ni leur nature... L’obsession étant de tenir à l’écart tous ceux qui apparaissent comme susceptibles d’aggraver la situation, en nous obligeant à partager leur misère. La plus grande confusion règne quant à l’identité exacte de ces ombres menaçantes : selon les lieux et les moments, ils sont immigrés (clandestins) ou Rroms, migrants ou réfugiés, voire terroristes … Cette confusion est bien créée par les autorités européennes elles-mêmes dresseuses de barbelés et de no man’s lands criminogènes, par un gouvernement dit socialiste qui ambitionne de donner des preuves de son autorité en pourchassant des Rroms, par des grand médias qui déversent ignorance et désinformation. Toutes choses dont le FN se contente de récolter les fruits empoisonnés !

On a vu succéder à la droite UMP, discréditée par cinq années de sarkozysme, une gauche dominée par le Parti socialiste qui s’est disqualifiée au bout de deux ans de gouvernement. D’un côté, une droite qui cyniquement a repris à son compte nombre de thèmes du FN, de l’autre une gauche qui sans vergogne mène une politique de droite ! Pour sa part, il semble bien que Marine Le Pen joue la partition d’un bipartisme nouveau, qui verrait le FN contre tous les autres. C’est-à-dire une opposition entre système et anti-système, qui ouvrirait sa marche au pouvoir. Une menace à prendre d’autant plus au sérieux que, dans les conditions actuelles de crise, l’ennemi a tout loisir de s’avancer terriblement masqué.

Ce rendez-vous de mobilisation antifasciste à Lyon à l’appel de la Conex peut permettre de travailler à forger les moyens de ce combat vital contre « les fascismes de notre temps » en France et en Europe en commençant par refuser la « banalisation » du FN ici et maintenant. Le Collectif de Vigilance 69 contre l’extrême-droite - dont Ensemble ! est membre - ne pouvait pas rater ce rendez-vous.

A. Celric


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