Toujours plus pour ceux qui ont déjà tout, jusqu’à quand ?

mardi 27 janvier 2015.
 

A la veille du Forum économique mondial de Davos, Oxfam a une nouvelle fois dénoncé dans un nouveau rapport l’augmentation vertigineuse des inégalités dans le monde. Si la tendance observée ces dernières années se poursuit, nous avons calculé que le patrimoine cumulé des 1 % les plus riches du monde dépassera en 2016 celui des autres 99 % de la population.

Des chiffres qui donnent le vertige… largement repris dans les médias

- > Les 80 personnes les plus riches possèdent aujourd’hui autant que 3,5 milliards de personnes – soit la moitié de la planète –, alors qu’en 2010 il fallait cumuler la fortune des 388 personnes les plus riches pour atteindre cette proportion !

- > Le patrimoine des 80 personnes les plus riches du monde a doublé entre 2009 et 2014 !

- > La part du patrimoine mondial détenu par les 1 % les plus riches est passée de 44 % en 2009 à 48 % en 2014, et devrait dépasser les 50 % en 2016.

- > En France, les inégalités de revenus ne cessent de s’accroitre : entre 2004 et 2011, les 10% les plus riches ont vu leurs revenus augmenter de 16,4% (de 49 530 à 57 645€) alors que le revenu des 10% les plus pauvres n’a augmenté que de 0,9%.

- > La plus forte hausse des revenus d’un seul milliardaire du secteur pharmaceutique entre 2013 et 2014 (4 milliards en un an !) suffirait à payer 3 fois le financement de la crise Ebola, encore largement sous-financée aujourd’hui.

Passer du constat à l’action

Il faut dire que les plus riches déploient beaucoup d’efforts à conserver leurs privilèges : en 2013, les entreprises des secteurs financier et pharmaceutique ont dépensé 550 millions de dollars pour faire du lobbying sur les décideurs américains et européens et protéger ainsi leurs investisseurs et propriétaires, gonflant les fortunes personnelles…

Au-delà de ce constat accablant, partagé aujourd’hui largement, jusqu’au FMI, Oxfam rappelle que l’explosion des inégalités entrave la lutte contre la pauvreté dans le monde, alors qu’une personne sur neuf ne mange pas à sa faim et que plus d’un milliard de personnes vivent avec moins de 1,25 dollar par jour. Au cours des douze derniers mois, les dirigeant-e-s du monde ont, à l’instar du président Obama et de Christine Lagarde, de plus en plus évoqué le besoin de réduire les inégalités extrêmes. Mais il est temps pour eux de joindre le geste à la parole car les inégalités ne sont pas une fatalité. Les solutions sont connues, il manque la volonté politique de les mettre en œuvre.

La lutte contre l’évasion fiscale, incontournable pour freiner ce phénomène

Apple et Amazon sont deux des multinationales qui ont défrayé la chronique pour ne pas avoir payé leur juste part d’impôt. Mais elles ne sont qu’une partie émergée de l’iceberg.

Depuis des années, l’évasion fiscale siphonne des milliards des budgets nationaux à travers le monde, contribuant à creuser le fossé entre riches et pauvres. Elle prive nos pays des fonds nécessaires pour construire des routes, des écoles et des hôpitaux. Elle nuit encore plus cruellement aux populations des pays pauvres. En 2011, le Liberia, la Sierra Leone et la Guinée – les trois pays les plus gravement touchés par le virus Ebola – ont perdu 287,6 millions de dollars du fait de l’évasion fiscale des entreprises, alors que leurs dépenses de santé n’ont pas dépassé 237 millions . Ces fonds auraient pu sauver des vies dans la lutte contre Ebola. À un horizon plus lointain, ils auraient également pu donner aux populations une vraie chance de sortir de la pauvreté.

Poussons les gouvernements à agir !

Il est encore possible d’influencer la réforme du système fiscal international au cours des prochains mois. Oxfam craint que la force de lobbying de ces secteurs ne soit un obstacle majeur à une telle réforme. Nous avons besoin de votre aide pour veiller à ce qu’elle serve les populations pauvres à travers le monde. Agissez maintenant pour demander à nos dirigeant-e-s d’instaurer la justice fiscale.

B) Les 1 % des plus riches possèdent plus 
que 99 % de la population mondiale

Dans une étude publiée hier, l’ONG Oxfam pointe du doigt l’augmentation des inégalités entre les très riches et le reste de la population mondiale. L’organisation souhaite alerter en amont du Forum économique mondial de Davos (Suisse), 
qui se déroulera de mercredi à samedi et réunira plus de 300 dirigeants politiques de premier plan, dont la chancelière allemande Angela Merkel, le président François Hollande, le chef du gouvernement italien Matteo Renzi, le premier ministre chinois Li Keqiang ou encore le secrétaire d’État américain John Kerry.

L’ONG Oxfam appelle les États à adopter un plan contre les inégalités

L’étude révèle que, si la concentration des richesses se réduisait depuis le début des années 2000 et que la crise avait accentué cette tendance, elle repart fortement à la hausse depuis 2010. Dans ce document, intitulé «  Insatiable richesse  : toujours plus pour ceux qui ont déjà tout  », et s’appuyant sur les données publiées par la banque Credit suisse et le magazine Forbes, Oxfam signale que «  la part du patrimoine mondial détenue par les 1 % les plus riches était passée de 44 % en 2009 à 48 % en 2014, et dépasserait les 50 % en 2016  ». Ce qui signifie que les 1 % les plus favorisés de la planète posséderont, l’an prochain, un patrimoine supérieur à celui des 99 % restants.

Oxfam s’était déjà distinguée, l’an dernier, au Forum de Davos en publiant un rapport alarmant sur les inégalités. À l’époque, l’ONG révélait que «  les 85 personnes les plus riches possédaient autant que la moitié la plus pauvre de la population mondiale  ». Aujourd’hui, elles seraient 80 à posséder autant que 3,5 milliards de personnes, contre 388 en 2010. La fortune de ces quelques individus s’élève à 1 300 milliards de dollars et devrait même passer à 1 900 milliards l’an prochain, soit une progression de 50 % en quatre ans, d’après l’ONG. L’étude se concentre également sur quelques personnalités afin de mieux illustrer ses propos. Par exemple, entre mars 2013 et mars 2014, la richesse de Warren Buffett a augmenté de 9 % (soit presque 5 milliards de dollars), celle des hommes d’affaires Michael Bloomberg, de 22 % (soit 6 milliards de dollars), et Carl Icahn, de 23 % (4,5 milliards de dollars), et celle du financier George Soros, de 20 % (3,8 milliards de dollars).

De plus, si cette concentration est spectaculaire au niveau des 1 % les plus riches, de fortes inégalités s’observent également au sein des 99 % restants. En 2014, les 52 % du patrimoine mondial qui échappent aux 1 % les plus favorisés atterrissent presque exclusivement entre les mains de 19 % de la population. Le résultat est qu’au final, 80 % de la population doivent se contenter de 5,5 % des richesses, d’après le rapport. «  L’ampleur des inégalités mondiales est tout simplement vertigineuse et, malgré les questions brûlantes qui font l’actualité, le fossé entre les grandes fortunes et le reste de la population se creuse rapidement  », explique la directrice d’Oxfam, Winnie Byanyima. Cette dernière poursuit  : «  Le statu quo a un coût. Si les affaires continuent comme si de rien n’était pour les élites, notre incapacité à réduire les inégalités pourrait retarder la lutte contre la pauvreté de plusieurs dizaines d’années. Les populations pauvres souffrent doublement de la montée des inégalités  : non seulement leur part proportionnelle du gâteau économique se réduit, mais comme les inégalités extrêmes nuisent à la croissance, le gâteau lui-même devient plus petit.  »

Outre l’alerte, l’ONG veut aussi apporter des solutions et appelle les États à adopter un plan. Celui-ci s’articule en sept points  : frein à l’évasion fiscale des grandes fortunes des grandes entreprises  ; investissement en faveur de la gratuité et l’universalité de services publics comme la santé et l’éducation  ; répartition équitable de la charge fiscale en l’allégeant du côté du travail et de la consommation, tout en taxant davantage le capital et les richesses  ; institution d’un salaire minimum et action pour le paiement d’un salaire décent pour l’ensemble des travailleuses et travailleurs  ; mise en place d’une législation en faveur de l’égalité salariale et promotion des politiques économiques assurant le traitement équitable des femmes  ; adoption d’un objectif commun de lutte contre les inégalités à l’échelle internationale  ; mise en place d’une protection sociale suffisante pour les plus pauvres, passant notamment par la garantie d’un revenu minimum.

Kevin Boucaud, L’Humanité


Signatures: 0
Répondre à cet article

Forum

Date Nom Message