Elections départementales. La stratégie incendiaire de Manuel Valls subit un revers

dimanche 12 avril 2015.
 

La droite unie arrivait largement en tête hier, suivie en deuxième par l’extrême droite dont l’agitation comme épouvantail en fin de campagne par le premier ministre n’a pas suffi au PS, largement battu, sur fond d’abstention populaire. Le Front de gauche et ses alliés se maintiennent.

Pas de victoire par KO hier soir, l’élection se jouant en deux tours. Les toutes premières tendances disponibles à 2 0 h e u r e s dessinaient un paysage en clair-obscur, que la répartition des étiquettes décidées par le ministère de l’Intérieur a contribué à embrouiller. Il faudra, pour discerner notamment si une lueur d’espoir s’est allumée du côté du Front de gauche et de ses partenaires écologistes et de Nouvelle Donne, voire socialistes dans certains cantons, attendre le recollement par ces formations des résultats artificiellement séparés hier par les services de la Place Beauvau, certains de ces candidats étant qualifiés de « divers gauche », d’autres étant comptabilisés au profit du PS par le truchement d’une bannière « union de la gauche » que le ministère lui a accolée exclusivement. Ces réserves étant posées, un chiffre retient d’emblée l’attention : l’abstention, flirtant avec les records, située entre 48,5 et 49,5 %, selon les instituts de sondage. À type de scrutin semblable, seul le premier tour des cantonales de 2011 avait enregistré une participation plus faible (44,32 %), celui de 2008 se situant nettement au-dessus (64,88 % de votants), ayant bénéficié de la tenue concomitante cette année- là des élections municipales. Mais la comparaison avec 2015 a ses limites, car il s’agissait de deux séries de cantons différents, les départements étant renouvelés cette année dans leur ensemble pour la première fois en une seule élection.

Faute de scrutin réellement comparable, on se contentera donc de noter que l’abstention d’hier s’inscrit dans la fourchette haute toutes élections confondues, à mi-chemin entre le premier tour des municipales de 2014 (36,45 %) et le taux affiché aux européennes en mai suivant (57,57 %). Le FN effectue une percée avec 23 à 28 % des suffrages Relativement à cette faible mobilisation, le FN, seul parti à voir ses candidats correctement étiquetés et donc comptabilisés, n’étant en alliance avec aucune autre formation, effectue une percée, avec 23 à 28 % des voix, selon les toutes premières estimations, toutefois inférieures aux projections des derniers sondages qui le créditaient, à quelques jours du scrutin, de 29 à 30 % des intentions de vote. En 2011, il avait ainsi obtenu 15,06 % des voix et seulement deux conseillers élus.

Cette fois, la donne était sensiblement différente, le parti de Marine Le Pen ayant investi un maximum de candidats (le FN présentait des binômes dans 93 % des cantons). Il a surtout bénéficié d’une exposition médiatique jamais vue dans la suite de son arrivée en tête des élections européennes avec 24,85 % des voix, le 25 mai 2014. Un score qu’il est en passe de rééditer, en dépit – ou sans doute en partie à cause – de la stratégie de Manuel Valls qui a choisi de tout miser sur la « peur » du Front national parmi l’électorat de gauche pour tenter de susciter un réflexe de « vote utile » en faveur du PS. Or, avec 20 à 27 % attribués au PS, selon les premières estimations hier soir, qu’elles incluent ou non le score de ses alliés radicaux, écologistes, communistes dans certains cantons ou encore les candidats dits « divers gauche », le principal parti gouvernemental est loin de réussir son pari, arrivant derrière le FN et la droite, même si cela n’est pas immédiatement visible grâce au brouillage organisé par le ministère de l’Intérieur. Le premier ministre, Manuel Valls, a aussitôt saisi l’occasion hier pour saluer le score des formations républicaines dans leur ensemble face au FN, appelant à la mobilisation pour le second tour.

Mais avec un score qui s’annonce dans tous les cas inférieur au total PS et PRG de 2008 (respectivement 26,74 % et 1,37 %) et de 2011 (24,94 % au PS et 1,48 % au PRG), surtout très inférieur à l’addition des résultats PS-PRG et des candidats divers gauche de 2008 (34,84 %) et de 2011 (31,83 %), celui-ci s’annonce d’ores et déjà comme l’un des plus mauvais enregistrés par le PS, proche du plus bas historique des cantonales de 1992 (19,01 % pour le seul PS à l’époque, 23,95 % avec ses alliés radicaux et divers gauche). Un résultat médiocre dont profite, en partie seulement, la droite UMP et UDI, pourtant unie dans 80 % des cantons. Si celle-ci arrive assez nettement en tête du scrutin attribuaient 28,5 à 37 % à l’UMP, selon qu’on lui additionne ou non les résultats des candidats étiquetés « divers droite ». Un résultat finalement décevant si on le rapproche de celui obtenu par la droite en 2011 (31,75 %), un mauvais millésime, et surtout du score de 2008 (40,72 %) qui s’était pourtant soldé par une défaite pour la droite, avec un différentiel de sept départements emportés par la gauche au second tour.

Il était en revanche difficile de dire au regard des premières estimations dans quelle mesure le Front de gauche avait réussi ou non à capter une partie de l’électorat de gauche déçu par le gouvernement. Avec 5,8 à 9,8 % des voix reconnues au Front de gauche et 1,3 % à Europe Écologie-les Verts, mais aussi 6,5 à 7 % aux candidats dits « divers gauche » parmi lesquels se trouvent en fait comptabilisés les scores de 319 binômes comprenant au moins un candidat d’une formation du Front de gauche, dont 192 binômes Front de gauche-EELV, il ne semblait pas démesurément optimiste pour le Front de gauche d’espérer égaler, voire de dépasser son score de 2011 (8,92 %) et celui du PCF de 2008 (8,84 %), une fois tous les résultats recomptés correctement. Réponse ce lundi matin.


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