Journée du 8 mars : trois chiffres et deux femmes (Gérard Filoche)

mardi 13 mars 2007.
 

Intervention de Gérard Filoche à Toulouse, le 8 mars, à l’invitation de la fédération du Parti socialiste (devant 230 personnes)

Bonsoir, je remercie la fédération du Parti socialiste de son invitation ce soir, ainsi que toutes les camarades, militants et personnalités qui ont préparé la tenue de cette réunion publique ce 8 mars en l’occasion de la journée des femmes...

Je voudrais commenter trois chiffres et vous évoquer deux femmes.

Trois chiffres :

- le premier est 85 % : 85 % de femmes parmi les 3,7 millions de temps partiels qui constituent la majorité des 7 millions de travailleurs, travailleuses pauvres de notre pays. Ce n’est pas le résultat d’une quelconque fatalité économique, mais d’une volonté politique, d’une action des gouvernements : alors que les femmes, en France sont rentrées à temps plein sur le marché du travail dans les années 70 et 80, ce sont des décisions politiques qui ont, dans les années 90, poussé au temps partiel féminin, ce sont les exonérations de cotisations sociales de 50 % puis de 30 % qui ont fait passer de 1992 à 1995, le temps de partiel de 11 % du salariat à 17 % du salariat. C’est l’absence de lois encadrant ce temps partiel, permettant tous les abus (des coupures quotidiennes, des flexibilités inhumaines, des modulations d’horaires, une absence de contrôles et de sanctions) qui ont frappé les femmes à 80 % non qualifiées qui ont ainsi été poussées et parquées dans le temps partiel, à 60 % de façon subie. Ce qui a été fait par de mauvaise lois peut et doit être corrigé par de bonnes lois.
- Le second : 25% d’écart de salaires entre hommes et femmes a égalité de qualification et de poste professionnel. Nous avons pourtant depuis les lois Roudy un superbe et théorique arsenal juridique pour l’égalité « à travail égal, salaire égal ». Mais il n’y a pas de contrôle et pas de sanction : faisons que l’inspection du travail voit ses moyens doublés, et soit habilitée, lorsqu’elle constate de telles inégalités odieuses entre salaires hommes et femmes, à saisir les juges, en référé, pour que ceux-ci imposent de lourdes astreintes aux employeurs concernés jusqu’à ce qu’ils rétablissent les principes d’égalité professionnelle entre salaires entre sexes. En moins de deux ans, une sérieuse politique de contrôle, de sanction pénale établira enfin ce que nous n’avons pu imposer par la seule persuasion depuis 25 ans !
- Le troisième : 7 % de femmes dans les cadres supérieurs. C’est un chiffre abominable qui résume tout et démontre la « sélection » des femmes sur le marché du travail. Tout est fait pour qu’elles ne progressent pas et soient écartées du fait que ce sont elles qui accouchent et élèvent leurs enfants. Nous avons maintenant à l’inspection du travail de plus en plus de cas où les femmes de retour de congé maternité sont maltraitées, écartées et se voient barrées la route de toute promotion, en sanction de leur absence pour grossesse. Il faut constituer un nouveau délit aggravé, facilement constatable et durement réprimé envers les employeurs qui discriminent les femmes pour leur maternité, ne les remettent pas dans leur poste et fonction antérieure, ne leur facilite pas, de ce fait, les promotions qu’elles méritent.

Je voudrais vous évoquer deux femmes :

- la première est Mme Laurence Parisot. Cette femme, 273° fortune de France, patronne du Medef explique que « la liberté de penser s’arrête là où commence le Code du travail ». Ce qui signifie que pour défendre une liberté essentielle, vitale, « la liberté de penser » il faut combattre le droit du travail. Cette femme est contre les 35 h et contre toute durée légale du travail, elle est contre le droit du licenciement et pour un « droit à la séparabilité », elle est contre l’emploi « opposable » et pour « l’employabilité », elle est contre le Cdi et pour le Cne sur toute la vie, elle est contre le Smic et pour un minima annualisé, avec abattements de zone, et dépendant d’une « commission des sages », elle est pour favoriser les contrats de gré à gré » au détriment des conventions collectives, elle pour les contrats (dépendants de la signature du Medef) et contre les lois (dépendantes du vote des députés élus au suffrage universel), elle est contre la « subordination » incluse dans le contrat de travail, et pour appeler les salariés des « collaborateurs », elle explique que « l’amour, la vie, la santé sont précaires, pourquoi le travail ne le serait il pas ? » ce qui est une apologie, perverse, de la barbarie. Elle est hostile à tout droit pénal du travail et refuse même dans les cas limites de parler de « patrons voyous »... cette femme-là ne défend pas la cause des femmes, encore moins celle des femmes salariées, c’est certain...
- la seconde femme que je voudrais évoquer, c’est Sylvie Trémouille. Une jeune contrôleuse du travail de Dordogne, mère d’un jeune enfant, dynamique, et sympthique , qui avait l’amour de ses missions, de son rôle de protection des salariés spoliés, des saisonniers surexploités. Elle croyait au Code du travail, elle était bien placée pour savoir combien il était violé, combien de souffrances et de misère cela produisait. Elle constatait les bas salaires, les heures supplémentaires impayées, l’obligation du travail dissimulé imposé à de pauvres immigrés sans défense dans nos campagnes... et elle avait pour mission de service publique d’essayer avec de pauvres moyens de rétablir un peu de justice, un peu d’état de droit, et de sanctionner les fraudeurs, les exploiteurs. Vous le savez, un jour de soleil, le 2 septembre 2004, elle a été abattue, froidement, avec son collègue Daniel Buffiére, dans un riche champ de Saussignac : l’homme qui exploitait des saisonniers avait déjà été condamné, informé, alors, pour empêcher le nouveau contrôle il lui a tiré dans le dos, à dix mètres, avec des balles à tuer les sangliers, elle a agonisé longtemps dans ces champs avant que les secours n’arrivent.

Entre ces deux femmes, il n’y a pas photo, la première n’a pas de compassion pour l’autre. Ce n’est pas le même monde, pas la même société, entre Laurence Parisot et Sylvie Tremouille, il n’y a pas de « centre » !

Et quand nous allons voter, je le dis à ceux qui hésiteraient encore à tout faire pour battre l’ami, l’allié, le soutien de Mme Parisot, M. Sarkozy, ne vous égarez pas, allez à l’essentiel, car, sinon : cinq minutes d’orgueil, cinq ans de malheur !


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