Loi sur le renseignement 2 : vers une société de contrôle social total ?

dimanche 30 avril 2017.
 

La loi sur le renseignement adoptée le 5 mai 2015 constitue une menace pour les libertés mais aussi pour la légitimité de l’action des services de renseignement.

En effet, la précipitation dans l’élaboration du projet de loi puis le divorce entre la représentation parlementaire et la quasi totalité des associations et syndicats du domaine numérique et judiciaire posent question sur la profondeur de la réflexion de ceux et celles qui ont voté cette loi.

Le droit ne se bâtit pas sur l’émotion, tant bien même soit-elle populaire, mais sur la raison.

En cliquant sur les numéros indiqués entre parenthèses, on accède à la source documentaire et on complète éventuellement son information. Il est conseillé de cliquer sur ces liens même si l’on ne prend pas le temps de lire complètement leur contenu.

Introduction.

Rappelons que le Parti de Gauche s’est fermement opposé au projet de loi sur le renseignement.

Menaces contre les libertés . (08/04/2015) (1)

Édition d’un tract par le PG (16/04/2015) Tous sur écoute ? (2)

Manifestation contre la loi renseignement (05/0 4/2015) (3)

Nous avons rendu compte de l’opposition quasi unanime des associations de défense des droits de l’Homme, des associations spécialisées dans l’économie numérique et et des organisations professionnelles de magistrats dans l’article intitulé : Loi Hollande Valls sur le renseignement : une opposition massive des associations et organisations professionnelles pour défendre nos libertés. (4)

Une manifestation avait lieu le 4 mai contre ce projet de loi jugé ecomme liberticide.. Une pétition réunissant plus de 100 000 signatures avait été rédigé à destination des députés . Une autre pétition " Ni espions, ni pigeons" avait été signé par un certain nombre de fournisseurs d’accès. Vidéo de la manifestation sur agora Vox ici (3’)

I – Le contexte historique dans lequel cette loi a pris racine.

1 – Une évolution des services de renseignement.

La loi sur le renseignement votée par l’Assemblée nationale le 5 mai 2015 avec une large majorité (77,4 % des voix) est le résultat d’un processus de maturation démarré depuis 2008 et d’un contexte national et international dont nous allons mentionner quelques traits principaux.

Wikipédia établit une chronologie des mesures concernant le renseignement depuis 2007 en France (5)

En mai 2011 , on apprenait que la France était championne d’Europe de la surveillance des télécommunications, avec 514 813 demandes d’accès en 2009 aux données de trafic conservées par les opérateurs de téléphonie fixe ou mobile et les fournisseurs d’accès à l’internet, contre 503 437 en 2008. (6a)

Rappelons par ailleurs qu’en 2011, les acteurs du Web français avaient fait un recours auprès du conseil d’État concernant le décret obligeant les hébergeurs Internet à conserver les données personnelles de leurs clients pendant un an. Voir article de Numerama (6b)

Le rapport sur le renseignement rédigé par Jean-Jacques URVOAS ,de la délégation parlementaire sur le renseignement rend compte de l’évolution des services de renseignements et des problématiques à traiter depuis 2009. Rapport disponible ici (6c) Rappelons que ce rapport est à l’origine du projet de loi sur le renseignement voté le 5mai 2015. Il est donc erroné de croire que ce projet de loi a été conçu brutalement après les attentats de janvier 2015. C’est plutôt la situation post– émotionnelle au 11 janvier 2015 qui a permis et a justifié son adoption en procédure d’urgence.

Dans notre article "Les réformes Taubira de la Justice et bilan législatif 2012 – 2014", nous avons examiné dans le paragraphe 2.6 lee nouvelles dispositions juridiques pour les systèmes de surveillance. (7)

Situation actuelle des services de renseignement

Il existe six services de renseignement français (Direction générale de la sécurité extérieure -DGSE-,Direction du renseignement militaire -DRM-, Direction de la protection et de la sécurité de la défense -DPSD-, Cellule de traitement du renseignement et action contre les circuits financiers clandestin -TRACFIN -, Direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières - DNDRED-, et, depuis 2014, la Direction centrale du renseignement intérieur -DCRI-), sont désormais constitués en « communauté du renseignement ».

Un coordonnateur national, conseiller du Président de la République, veille à la bonne coopération des services. Une « Académie du renseignement », rattachée au Premier Ministre, forme les personnels de ces services.

Des moyens importants sont dévolus à ces services, notamment en personnel (13 000 ETPT dans le budget 2014). Après les attentats de janvier 2015, des renforts, à hauteur de 500 postes, ont été annoncés. (Source : USM (8))

Le gouvernement prévoit la création de 2680 postes pour la lutte antiterroriste. (8’)

Mais la liste précédentes est loin d’être exhaustive si l’on tient compte des multiples organismes s’occupant de renseignement . Voir Wikipédia (9)

Par ailleurs, les services de renseignements peuvent avoir des partenaires. Par exemple,dans un article intitulé : Espionnage : comment Orange et les services secrets coopèrent,on peut lire : "…Selon le GCHQ, la DGSE et l’opérateur historique français travaillent ensemble pour améliorer les capacités nationales d’interception sur les réseaux de communication et collaborent pour casser les cryptages de données qui circulent dans les réseaux. France Télécom est un acteur important du système de surveillance en France. En savoir plus sur Le Monde du 20/03/2014 (10)

2 –Un climat social tendu.

La crise financière de 2008 constitue une secousse de grande ampleur frappant le système économique et financier capitaliste contemporain. Elle crée un sentiment d’insécurité dans les classes dirigeantes qui voient leur système et leur théologie libérale vaciller. Les conséquences économiques et politiques de cette crise s’accompagnent aussi d’un sentiment d’insécurité sociale au sein de la population active frappée par des politiques d’austérité et par un chômage en croissance.

On n’en finirait pas de dresser la liste des fermetures d’usines et d’entreprises couvrant les différents champs de l’espace économique depuis 2012. Ainsi seulement en 2012, 266 sites ont été fermés soit 42% de plus qu’en 2011. (11) . En 2014, 217 sites ont encore été fermés (12) Le constat est là, inéluctable : 1 253 usines ont fermé leurs portes en France depuis le premier janvier 2009 jusqu’en septembre 2013 et les 34 plans industriels d’Arnaud Montebourg n’y changent rien. Pour deux établissements fermés, un seul a ouvert pendant cette période. (13)

Évidemment, ces fermetures peuvent s’accompagner d’occupation des locaux, de sièges sociaux patronaux, etc.

Politique d’austérité, précarité croissante des emplois à tous les niveaux de qualification, etc. autant de facteurs provoquant des manifestations locales et une colère sociale rampante et s’amplifiant.

Celle-ci déborde largement la sphère de la production et de la distribution. Que ce soit à Notre-Dame-des-Landes, à Sivens, à Nantes, à Lyon ou à Toulouse, la contestation gronde. La manifestation des 25 et 26 octobre 2014 contre le barrage de Sivens où le jeune Rémi Fraisse fut tué par la police constitua un temps fort mais relativement circonscrit de ces protestations.

Selon un sondage de IFOP, réalisé en septembre 2014, deux Français sur trois s’attendent à une explosion sociale, (14)

Mais dans un article du 20/10/2014, le journal La Tribune faisait remarquer qu’une telle explosion sociale n’a rien d’automatique du fait de l’atomisation du mouvement social et du manque de perspectives dans un contexte de grande confusion politique. Voir l’article : climat social : Pourquoi ça n’explose pas encore ? (15)

Toujours est-il que la période actuelle" se caractérise par l’extension significative du crime, qui « cesse de coller étroitement aux classes dangereuses pour s’étendre, tout en changeant de signification, à de larges masses de population, à la plus grande partie des classes laborieuses » ". Il s’agit ici d’une citation relative au livre de Louis Chevalier publié en 1958, "Classes laborieuses et classes dangereuses" à Paris pendant la première moitié du XIXe siècle. En effet, surtout depuis 2007, on assiste à une "criminalisation" des mouvements revendicatifs et notamment de l’action syndicale pour reprendre la terminologie d’un certain nombre d’acteurs sociaux.

3 – Les actions terroristes sur le territoire français.

Mais ce climat d’insécurité trouve une amplification du fait d’un certain nombre d’actions terroristes plus ou moins médiatisées. En consultant l’article de Wikipédia sur le terrorisme en France et en recensant les attentats commis depuis 1995, la liste est particulièrement impressionnante notamment en Corse. Voir Wikipédia (16)

Mais heureusement, tous ces attentats ne sont pas meurtriers. La liste des attentats meurtriers dans le monde et en France est disponible dans l’encyclopédie Wikipédia (17)

Voici par exemple la liste des attentats meurtriers recensés en France depuis 2000.

19/0 4/2000 : attentat à Quévert (Côtes-d’Armor) contre un McDonald’s, attribué à des indépendantistes bretons, 1 mort[

05/12/2007 : À 12h50, l’explosion d’un colis piégé visant un cabinet d’avocats, boulevard de Malesherbes à Paris, fait 1 mort et 5 blessés

Soit un total de 2 morts et 5 blessés de 2000 à 2011.

11 – 15 – 19/0 3/2012 : 7 morts Tueries de mars 2012 à Toulouse et Montauban, l’islamiste Mohammed Merah tue 7 personnes, parmi lesquels 3 militaires, puis 3 enfants et 1 adulte devant une école juive.

7 au 9janvier 2015 : quatre attentats terroristes font 17 morts et 21 blessés dont 3 des forces de l’ordre ; les 3 terroristes ont été abattus. Les terroristes se sont revendiqués de AQPA et de l’État islamique

Soit un total de : 24 morts et 21 blessés de 2012 à 2015. Ainsi depuis 2000 le total s’élève à : 26 morts et 26 blessés

L’attentat meurtrier de janvier 2015 contre Charlie hebdo place alors au centre de la scène politique la menace terroriste d’origine à la fois extérieure et intérieure

La consultation de la liste des attentats meurtriers commis dans les autres pays relativise certes ces résultats mais conforte l’idée d’une menace extérieure permanente du fait notamment du développement du djihadisme. Mais pas seulement extérieure si l’on lit, par exemple, le journal 20 minutes (24/01/2015) : djihadisme en France : comment surveiller 3000 suspects ? (18a)

Au niveau mondial, le nombre d’attentats a été multiplié par 4 entre 2001 et 2012. Le nombre de victimes s’élève à environ 18 000 morts en 2014. Le nombre d’attentats dans le monde a augmenté de 60% entre 2013 et 2014. (18b)

"…La multiplication des zones de crise favorise le développement de filières utilisées par des individus déterminés à conduire des attentats contre les pays occidentaux, lors de leur retour. Ainsi, des milliers de personnes parmi lesquels plusieurs centaines de Français ont rejoint la Syrie et l’Irak pour participer aux actions de groupes terroristes dans la région. De retour sur le territoire national, ces combattants radicalisés et formés à l’action violente représentent une menace d’une ampleur inédite pour la sécurité de nos concitoyens. Pour y faire face, le gouvernement met en œuvre un plan d’action destiné à endiguer un phénomène qui peut être durable voire s’étendre au gré de crises dans d’autres zones. Ce plan d’action, validé par le chef de l’État lors du conseil de défense du 24 mars 2014 est complété par un texte de loi relatif à la lutte contre le terrorisme…." Source : Académie du renseignement. Coordination nationale du renseignement.(18c)

Si le danger terroriste est bien réel, peut prendre des formes nouvelles, et mérite évidemment d’être pris en compte avec des moyens suffisants et adaptés, celui-ci ne doit pas être exagéré d’une manière disproportionnée comme contribuent à le faire les grands médias.

Sachant que relativiser ne signifie pas banaliser ou minimiser, si l’on compare le nombre de morts occasionnés par les accidents de la route entre 2004 et 2014 (environ 47 000) et le nombre de morts causées par des attentats sur la période 2004–2015 (soit 25 morts), on relativise le caractère dramatique des situations. Les accidents de la route constituent objectivement un drame national d’une plus grande ampleur.

Par ailleurs, Le Figaro indiquait que "Tabou, le suicide fait chaque année trois fois plus de victimes que les accidents de la route, avec en moyenne 10.000 décès par an. Notre pays fait partie des nations les plus suicidaires d’Europe, avec 16,5 suicides pour 100.000 habitants en 2010, loin devant la moyenne européenne située à 10 pour 100.000 habitants." (19) Remarquons que cette hécatombe ne fait pas la une des journaux.

De même pour les accidents mortels du travail  : On comptait en 2011 "552 décès par AT, …, 570 décès maladies professionnelles (compte de gestion de la CNAM pour 2011). Ces chiffres officiels sont – on le sait – grandement sous-estimés en raison notamment d’une importante sous-déclaration" (Source : fondation Copernic (20). Une étude complète sur ce thème est disponible en cliquant ici (20’ ) Là encore il serait très difficile de trouver quelques grands médias relatant ce type d’événements dramatiques

C’est, entre autres, en procédant à ce genre de comparaison aux USA que le média alternatif et dérangeant Le Grand Soir du 4 mai 2015 considère qu’il existe une instrumentalisation de la peur du terrorisme. Titre de l’article : "la grande imposture de la lutte antiterroriste" (21)

L’exagération du danger terroriste peut faire partie d’une politique de la peur : "La politique de la peur pour un gouvernement, consiste à provoquer la peur au sein de sa population pour faciliter l’adoption de lois sécuritaires. En réduisant ainsi la liberté individuelle, il espère pouvoir assurer son maintien. Les citoyens, quant à eux, en échange d’une hypothétique sécurité sont conditionnés pour renoncer progressivement à leurs libertés." Lire la suite de l’article "Faire peur pour gouverner" sur le site Toupie.org (22)

D’autre part, "Le terrorisme moderne est médiatique. Les médias sont attirés par les agressions terroristes les plus violentes, non seulement parce qu’ils ont un devoir d’information sur tout événement majeur, mais aussi parce que le côté dramatique et spectaculaire du terrorisme fascine un large public.

Les terroristes d’aujourd’hui exploitent cette dynamique et agissent de manière à attirer autant que possible l’attention du monde entier. »… La lutte contre le terrorisme ne devrait pas servir d’excuse aux Etats pour restreindre la liberté de la presse. De leur coté les journalistes devraient éviter de jouer le jeu des terroristes par une course effrénée à l’information et aux images sensationnalistes.…

Les actes terroristes sont des actes qui visent à faire naître des sentiments de terreur, de peur et de chaos parmi le public. La propagation de tels sentiments dépend largement des images et des messages qui sont véhiculés par les reportages réalisés sur les actes et menaces terroristes.

L’omniprésence des médias de masse à l’échelle mondiale accentue fréquemment ces effets de manière disproportionnée.…" Lire la totalité du texte très intéressant en cliquant ici (23 ) (Source : document 10 557 Médias et terrorisme, 20/05/2005. Assemblée parlementaire de l’UE. )

L’assemblée parlementaire du conseil de l’Europe a été amenée à émettre la recommandation 1706 concernant la question médias et terrorisme. Le texte est disponible ici. (23 bis)

Force est de constater que les médias, pour des raisons commerciales et d’audimat ne respectent pas toujours ces recommandations simples et fondées sur le bon sens. Pouvoirs politiques et médias peuvent donc avoir des intérêts différents mais convergents pour ne pas respecter ces recommandations.

4 – Les événements liés à la situation internationale.

À ces facteurs économiques et politiques intérieurs s’ajoutent des événements liés à la situation internationale. Conflit israélo-palestinien, intervention militaire antiterroristes au Mali au printemps 2014, la tension politique avec la Russie, l’espionnage des gouvernements français et allemand par les services de renseignements US, les flux migratoires causés par la destruction des états libyen et irakien notamment, la politique de répression en Syrie : autant de facteurs qui mettent la pression sur les services de renseignements français.

On pourrait mentionner aussi les révélation de Wiki Leaks depuis 2010,les pratiques de surveillance massive et d’intrusions à large échelle révélées depuis juin 2013 par M. Edward Snowden, etc..

Cette liste des éléments contextuels n’est pas exhaustive  À ces facteurs générateurs d’insécurité et surtout d’un sentiment d’insécurité, s’ajoute la poussée des forces d’extrême droite mettant en demeure les gouvernements de mettre en place des politiques sécuritaires et répressives. En outre, les médias trouvent dans ce genre d’événements un fonds de commerce et un bon audimat qui contribuent ainsi à leur publicité.

Il ne faut pas non plus oublier les dispositions prises par la politique antiterroriste de l’Union Européenne. (24)

5 – Un contexte qui ne facilite pas la liberté d’expression des mouvements sociaux.

Dans un tel univers agité et insécurisant, le droit de manifestation devient alors de plus en plus problématique comme en témoignent deux articles de médias de tradition libérale.

Article du 20/0 7/2014 du site libéral Liberté, libertés chéries L’interdiction de la manifestation de soutien aux victimes palestiniennes : ordre public ou ordre moral ? (25)

Article du Figaro du 21/07/2014 L’interdiction d’une manifestation oscille entre sauvegarde de l’ordre public et décision politique.(26)

Ainsi, plus récemment, le journal Libération en s’appuyant sur un appel de plusieurs universitaires pose le problème de la liberté publique de manifestation. Voir :Article du journal Libération 17 avril 2015 Manifester en France, c’est risquer de finir en prison. (27)

On peut lire aussi un article de Mediapart du 21/05 2015 intitulé : Des députés veulent limiter le droit de manifester.(27’) et (27’’ )

En raison de ces observations, nous aborderons plus loin la législation concernant le droit de manifestation.

C’est dans ce contexte national et international que convergent un faisceau d’éléments favorisant la mise en place d’un système de surveillance renforcé des citoyens.

On assisterait alors à la mise en place d’une nouvelle forme d’État : un état democratico – policier, le versant policier pouvant devenir prédominant. Voir l’article précédent : Loi sur le renseignement 1 : construction d’un État démocratico–policier ? (28)

II – Une précipitation dans la proposition et l’examen du projet de loi qui sont déraisonnables et contre-productifs.

Certes, l’on peut comprendre la nécessité de définir un cadre légal et un renforcement des moyens de surveillance des services de renseignement mais, compte tenu des éléments suivants  :

– la gravité des enjeux en termes de liberté et des droits fondamentaux

– la complexité juridique pour concilier d’une manière équilibrée sécurité et liberté

– la complexité technique des moyens informatiques de la surveillance

– l’opposition massive des associations et organisations professionnelles mentionnées ci-dessus

– le rapport de M. Pieter OMTZIGT au Parlement européen du 18 mars 2015 intitulé "les opérations de surveillance massive" qui montre, notamment à partir d’éléments techniques,, la grande dangerosité (pour l’existence des droits fondamentaux) de la surveillance massive telle qu’elle est déjà été conçue et mise en œuvre aux USA (Rapports disponibles ici (29) )

– la décision de la Chambre des représentants américaine qui a voté à une très large majorité une réforme interdisant à la NSA de pratiquer une collecte massive des données aux États-Unis (30)

Il apparaît tout à fait contestable et attentatoire à la démocratie que ce projet de loi ait été traité en procédure accélérée, ne permettant pas ainsi aux parlementaires d’avoir une discussion approfondie et ne permettant pas aux citoyens d’être suffisamment informés et d’avoir un débat sérieux et contradictoire sur ce projet de loi

"Le débat n’a pas eu lieu, c’est consternant. Une loi qui va changer notre société aurait dû être débattue. Pourquoi n’y a-t-il pas eu d’audition publique ? Pourquoi le juge n’a-t-il pas sa place dans la procédure de surveillance ? La vitesse à laquelle le gouvernement veut que cette loi soit adoptée, avec la procédure accélérée, est une grave erreur. Elle a tué le débat."

Ce n’est pas Jean-Luc Mélenchon qui prononce ces mots mais Laurence Parisot, libérale (ex-président du Medef) farouchement opposée à ce projet de loi qu’elle juge liberticide. (31) Elle avait aussi affirmé son opposition au projet de loi sur le plateau de Mediapart le 4 mai 2015.

III –La loi du 5 mai 2015 sur le renseignement.

­1 – le texte de loi.

Le texte adopté par l’Assemblée nationale doit encore passer devant le Sénat du 2 au 9 juin 2015 et être examiné par Conseil Constitutionnel au moment où ces lignes sont écrites.

Dossier législatif (32)

Texte du projet de loi sur le renseignement adopté en première lecture par l’Assemblée nationale le 5 mai 1015.(33) et (33’)

Article très documenté de Wikipédia qui rend compte des différents mouvements sociaux qui se sont opposés au projet de loi.(34)

Nous allons examiner ici un article particulièrement important. Celui qui est censé définir le champ d’action des services de renseignement.

«  Art. L. 811-3. - Les services spécialisés de renseignement peuvent, dans l’exercice de leurs missions, recourir aux techniques mentionnées au titre V du présent livre pour le recueil des renseignements relatifs à la défense et à la promotion des intérêts publics suivants :

« 1° L’indépendance nationale, l’intégrité du territoire et la défense nationale ;

« 2° Les intérêts majeurs de la politique étrangère et la prévention de toute forme d’ingérence étrangère ;

« 3° Les intérêts économiques, industriels et scientifiques majeurs de la France ;

« 4° La prévention du terrorisme ;

« 5° La prévention des atteintes à la forme républicaine des institutions, des violences collectives de nature à porter atteinte à la sécurité nationale ou de la reconstitution ou d’actions tendant au maintien de groupements dissous en application de l’article L. 212-1 ;

« 6° La prévention de la criminalité et de la délinquance organisées ; « 7° (Supprimé)

« 8° (nouveau) La prévention

2 – Réactions de syndicats de magistrats et de la LDH

L’article 5 est particulièrement préoccupant et n’a pas été retiré ou précisé malgré la demande de certains députés. Il ouvre la porte toute grande pour un contrôle social généralisé notamment de "la France qui bouge".(Syndicats, associations citoyennes, ONG. partis politiques notamment ceux de l’Autre gauche,…). Il remet en cause de ce fait la légitimité de l’action des services de renseignements qui constitueraient alors en quelque sorte une police politique.

L’existence de cet article accrédite l’idée que la motivation profonde de ce texte n’est pour la lutte contre le terrorisme mais le contrôle social notamment pour prévoir et contrôler les mouvements sociaux contestataires de l’ordre économique et politique du néolibéralisme mis en œuvre par l’UMP et le PS.

Les syndicats de magistrats ne sont pas dupes du caractère flou de cet article et précisent cette menace. Je ne cite ici que des extraits de leur position qui figure d’une manière complète dans les liens indiqués ci-dessous.

Réaction du syndicat de la magistrature (34)

Le projet de loi crée un article L 811-3 du code de la sécurité intérieure qui liste les « intérêts publics » pouvant fonder l’usage de pouvoirs de police exorbitants.

Loin de reprendre les motifs énoncés à l’article L241-2 du code de la sécurité intérieure régissant actuellement le recours aux interceptions de sécurité, le projet de loi adopte une vision dangereusement extensive, par l’adjonction de motifs supplémentaires et de rédactions nouvelles de missions anciennes. Cette nouvelle définition est loin d’être anodine.

– Les intérêts publics listés pêchent d’abord par leur définition vague et les contradictions qui peuvent les traverser. C’est le cas des « intérêts économiques et scientifiques essentiels de la France » et des « intérêts essentiels de la politique étrangère et l’exécution des engagements internationaux de la France ». Dans ce cadre flou, confier aux services des pouvoirs intrusifs à des fins de collecte d’information mais aussi d’ « entrave des menaces et des risques » pour la protection de ces intérêts n’est pas anodin. En effet, c’est de permettre à la puissance publique de contrer ou de déstabiliser en secret des actions, qui peuvent être tout aussi contraires aux intérêts économiques ou de politique étrangère que vitales dans une démocratie : il en est ainsi des actions visant à mettre à jour les pratiques illégales ou amorales d’entreprises nationales (de l’énergie, la distribution de l’eau, les nouvelles technologies ou l’armement…) ou à contester des choix de politique étrangère. À défaut de protection réelle des lanceurs d’alerte, la reconnaissance extensive de pouvoirs au profit des services spécialisés dans ces domaines, qui va de pair avec la volonté de sanctuariser le secret des affaires et le secret de la défense nationale, est préoccupante

– La prévention de la criminalité et de la délinquance organisées  Le maintien de la prévention de la criminalité et de la délinquance organisée dans les activités des services de renseignement, qui constitue une des premières activités des services, interroge dans la mesure où le projet fait l’impasse sur une question pourtant fondamentale : la frontière entre les activités relevant de la police administrative et celles ayant trait à la police judiciaire.

– Le projet de loi ajoute enfin un nouvel intérêt public justifiant le recours à des techniques policières intrusives : « la prévention des violences collectives de nature à porter atteinte à la paix publique ». C’est dans ce dernier « intérêt public » que se niche l’extension la plus inacceptable des pouvoirs des services de renseignement. En effet, ce critère autoriserait à n’en pas douter les services spécialisés à opérer des formes intrusives de surveillance sur l’ensemble des mouvements et mobilisations de nature politique. La potentialité de violences collectives concerne en effet toute manifestation ou tout rassemblement de personnes. Nul doute que les services sont déjà présents dans les manifestations comme dans les lieux de mobilisation (telles les ZAD actuelles) et même dans les quartiers populaires périphériques. Mais donner une assise textuelle contribue à légitimer et normaliser ces pratiques, tout en décuplant les moyens de fichage et de surveillance de mouvements politiques. Ce texte autoriserait ainsi, lors d’une manifestation publique, à capter, par le dispositif de l’IMSI catching, l’ensemble des données de connexion téléphonique, ou à écouter les réunions préparatoires à des mobilisations politiques par le biais d’une sonorisation.

Le Syndicat de la magistrature dénonce toute forme de renseignement à caractère politique et exige que le critère de « violences collectives de nature à porter atteinte à la paix publique », extensif et imprécis, et dont l’objectif politique est à peine voilé, soit retiré du projet de loi.

L’analyse des intérêts publics le démontre donc bien : ce texte ne se borne pas à donner des moyens à la prévention du terrorisme, qui ne constitue que l’une des missions assignées aux services de renseignement.

Critique de l’Union syndicale des magistrats (USM) (35) Voir page 7 du document PDF.

– L’absence de définition claire et précise des « intérêts publics » en jeu permettra la mise en œuvre des techniques de renseignement, bien plus larges que les seules écoutes téléphoniques, dans de très nombreux domaines. En l’espèce, on notera, s’agissant des critères ajoutés par le projet de loi et susceptibles de justifier la mise en oeuvre de techniques de renseignements, le caractère particulièrement flou de la notion « d’intérêts majeurs de la politique étrangère ». – De même, le nombre singulièrement élevé et le caractère disparate des « engagements internationaux et internationaux de la France » rendent cette dernière notion potentiellement très large.

– S’agissant de « la prévention des violences collectives  », cet ajout revient à contrer les décisions de la CNCIS qui, en matière d’interceptions de sécurité, a toujours refusé de les autoriser dès lors que la sécurité nationale n’était pas menacée. Dans son dernier rapport, la CNCIS a ainsi précisé qu’en l’état des textes actuels, aucune interception ne pouvait être autorisée sur la seule crainte d’un trouble à l’ordre public, « comme y expose plus ou moins toute manifestation ». Désormais, cette possibilité serait ouverte, non seulement pour des écoutes mais pour toutes les nouvelles techniques légalisées par le projet de loi (cf partie III).

Concrètement, en l’état, ce projet de loi autorise par exemple la mise en oeuvre de multiples outils de renseignement en amont de toute manifestation, quel qu’en soit l’objet, au seul motif de « prévenir des violences collectives de nature à porter gravement atteinte à la paix publique ». Ainsi,à la veille d’une manifestation serait légalisée l’introduction d’agents de renseignement, au sein du domicile de tout représentant syndical voire même de tout potentiel participant, pour qu’ils y installent des micros ou des caméras, et ce sans réel contrôle, ni préalablement, ni postérieurement

Pire, la suppression du terme « gravement » par l’Assemblée nationale permettra d’envisager l’utilisation des techniques de renseignement pour prévenir les violences collectives « de nature à porter atteinte à la sécurité nationale ». L’USM conteste toute idée selon laquelle le terme « gravement » devrait être supprimé car redondant avec la notion d’atteinte à la sécurité nationale en elle-même. Cette suppression ouvre au contraire encore plus largement la possibilité d’utilisation des techniques de renseignement.

– De même, dans son dernier rapport, la CNCIS a rappelé, s’agissant des intérêts économiques et scientifiques essentiels, que le texte visait à assurer leur sauvegarde, ce qui supposait de caractériser clairement une menace et que la personne objet des écoutes soit directement impliquée dans cette menace. La rédaction actuelle, en faisant disparaître la notion de menace, permet donc d’envisager un usage très élargi des moyens de renseignements...

Il ne s’agit pas pour l’USM de refuser la mise en oeuvre d’outils technologiques nécessaires à la préservation des intérêts de l’Etat. Mais, au regard de l’ampleur des outils à la disposition des agents spécialisés, les domaines d’intervention doivent être plus précisément définis et un contrôle effectif doit être mis en place, s’agissant d’atteintes potentiellement graves aux libertés individuelles.

L’USM demande donc que la sphère d’intervention des services de renseignement reste limitée aux seuls domaines visés dans la loi de juillet 1991. Les extensions envisagées par le projet de loi ne présentent pas de caractère d’évidente nécessité, alors même qu’ils portent en germe le risque d’abus majeurs.

Critique de la ligue des droits de l’homme (LDH) (36)

La LDH constate, à regret, tout d’abord que, rejoignant des pratiques constantes depuis trente ans, quelle que soit la couleur des majorités politiques, prenant prétexte de la nécessaire lutte contre le terrorisme, les pouvoirs publics accroissent leurs pouvoirs, sans contrôle réel, à des domaines qui n’ont rien à voir avec le terrorisme.

L‘étendue des sept items décrits à l’article 811-3 permet de s’assurer qu’au nom de la lutte contre le terrorisme, c’est l’activité des syndicats, des ONG, des partis politiques, des cultes, de la société civile dans son ensemble qui peut faire l’objet d’une surveillance, et même d’une intrusion.

3 –Attitude de Christiane Taubira.

Les réserves de Christiane Taubira (37)

4 – Les réactions d’organismes spécialisés en informatique et en économie numérique.

a) Les critiques de l’institut national de recherche en informatique et en automatique (INRIA)

La note interne de l’Inria qui étrille la loi sur le renseignement Source :.Le Monde 13/05/2015 . Article complet en cliquant ici (38)

"Les scientifiques du prestigieux Institut national de recherche en informatique et en automatique (Inria) sont plus que sceptiques concernant la loi sur le renseignement, adoptée en première lecture le 5 mai à l’Assemblée. L’Institut alerte ensuite sur les potentielles dérives d’une détection algorithmique des terroristes. Un programme informatique, même bien réglé, produit systématiquement des erreurs, qui sont d’autant plus nombreuses que la masse de données à traiter est importante, expliquent les scientifiques dans leur note. « Ce phénomène scientifique bien connu (…) a des conséquences que le texte du projet de loi ne prend pas en compte », met en garde l’Inria.…

L’Inria relève également l’inefficacité de la surveillance numérique introduite par les algorithmes, « facilement contournables même sans connaissance technique élaborée ». L’institut public précise que lorsque ces dispositifs de contournement – comme un VPN (l’internaute se connecte alors, de manière sécurisée, vers un ordinateur tiers par lequel transite sa navigation sur Internet) – seront mis en place, « aucune information sur le destinataire final de l’information ou le contenu du message ne sera possible »."

b) Critiques de la Quadraturedu net

Cette association a réalisé un travail documentaire important sur le projet de loi que l’on peut consulter ici (39)

c) Critiques et recommandations du Conseil National du Numérique (40)

d) Critiques de l’observatoire des libertés et du numérique (OLN) (41)

e) Après l’adoption de la loi sur le renseignement, les craintes persistent au sein des associations écrivait Politis (42)

5 – Réaction de certains opérateurs Internet

"À la suite de l’examen du projet de loi à l’Assemblée nationale, l’hébergeur de noms de domaine EU.ORG a annoncé le 17 avril 2015 qu’il allait procéder « au déménagement de tous ses serveurs de noms hors de France ». De même, l’hébergeur Altern a indiqué qu’il « ferme ses services le temps de déménager à l’étranger » Le 22 avril 2015, l’hébergeur internet Gandi confirme son opposition citoyenne au texte de loi approuvé par l’Assemblée nationale et indique qu’il compte « poursuivre son développement à l’étranger, notamment au Luxembourg »" Source Wikipédia (43)

Voir aussi sur Nextimpact : Loi Renseignement : Eu.org et Altern.org plient bagage, Gandi explique (44)

6 – Les votes des députés.

Sources utilisées  : Libération (44a)

L’Humanité (44b)

Le Figaro (44 c)

Politis (44 d)

Revue de presse sur la loi.(45)

Le texte de loi a été adopté avec 438 voix pour, 86 voix contre et 42 abstentions (Sur un total de 566)

Au sein du groupe socialiste, 252 députés sur 288 ont voté pour, contre seulement 10 voix dissidentes, parmi lesquelles celles de l’ancienne ministre Aurélie Filippetti et du parlementaire frondeur Pouria Amirshahi Jean-Patrick Gille.

Dans le camp des 17 abstentionnistes socialistes, on note la présence de Pascal Cherki, Christian Paul et Laurent Baumel

Les 17 députés radicaux de gauche a voté pour.

Onze députés écologistes sur 18 ont voté contre, parmi lesquels Cécile Duflot, Noël Mamère ou encore Sergio Coronado. François De Rugy, co-président du groupe, a voté pour, alors que Barbara Pompili, également à la tête du groupe, s’est abstenue.

De leur côté, les députés du Front de gauche ont voté contre ce projet de loi, le jugeant porteur de «  graves atteintes  » aux libertés individuelles. «  L’équilibre entre le renforcement de la politique de renseignement et le strict respect des politiques individuelles n’est pas atteint  », juge le président du groupe André Chassaigne. Inquiet, au final, de voir légalisés des «  outils qui, demain, pourraient se retrouver entre les mains de gouvernements ne se distinguant pas par le souci de protection des libertés  ». Plus précisément, 12 députés le EdG ont voté contre, 3 députés ont voté pour. :Nestor Azérot, Marc Dolez et Gabriel Serville

À l’UDI, 17 députés ont voté pour, et 11 ont opposé leur véto, comme Yves Jégo, Hervé Morin et Jean-Christophe Fromantin. Trois élus du Front de gauche ont voté pour.

À l’UMP, 143 députés sur 198 se sont exprimés en faveur du texte, et 35 contre, dont le maire de Levallois-Perret Patrick Balkany, Bernard Debré, Patrick Devedjian, Thierry Solère, Henri Guaino et le juppéiste Edouard Philippe et notamment les spécialistes des questions numériques comme Lionel Tardy et Laure de La Raudière. Cette dernière, en compagnie de Pierre Lellouche, a réuni 75 députés (dont 66 UMP) pour saisir le Conseil constitutionnel après l’adoption du texte. 20 députés UMP se sont abstenus.

Marion Maréchal-Le Pen, Gilbert Collard et Jacques Bompard ont voté contre, comme Nicolas Dupont-Aignan, responsable du parti Debout La France. Thomas Thévenoud, l’ancien secrétaire d’État débarqué prestement du gouvernement, n’a pas non plus soutenu la loi.

Liste des députés ayant voté pour, contre ou s’étant abstenu sur state.fr (46)

Position de la commission numérique des écologistes (47)

7 – Vers une société de contrôle total.

« Toujours ces yeux inquisiteurs qui surveillaient en permanence, chez soi ou dans la rue, au travail ou à la cantine, dans la salle de bain ou dans la chambre, nuit et jour : il n’y avait nulle intimité possible. » (George Orwell, 1984)

Nous n’en sommes pas loin. La surveillance massive de la population par des procédés technologiques de plus en plus évolués (Vidéosurveillance, surveillance des téléphones, Internet, géolocalisation, etc.) sous prétexte de lutter contre le terrorisme et différentes formes de délinquance a fait preuve de ses limites et de son peu d’efficacité aux USA ces 15 dernières années.

Des spécialistes de l’informatique expliquent que les algorithmes utilisés sont loin d’être fiables et efficaces pour détecter des communications effectivement annonciatrices de délits et de crimes. En outre, ces mêmes spécialistes expliquent que les terroristes ont des possibilités de cryptage et de dissimulation efficaces, sans compter que ces terroristes ne sont pas suffisamment idiots pour utiliser des moyens de communication permettant de les démasquer facilement. D’autre part, des spécialistes du droit et en sciences politique de diverses sensibilités idéologiques ont montré la dangerosité du texte de loi actuel.

On peut donc s’interroger sur les raisons pour lesquelles le gouvernement et une majorité des députés persévèrent à maintenir le texte sous sa forme actuelle qui considère chaque Français comme un délinquant et fauteur de troubles potentiel du fait de cette surveillance massive et pas forcément ciblée ou d’un ciblage possible fort discutable (voir plus haut la critique de l’alinéa 5)

Incompétence ? Amateurisme ? Clientélisme politique ? Instrumentalisation de la peur ? Ou plutôt avoir la possibilité de contrôler le mouvement social contestant la politique du gouvernement en place, ou contestant l’ordre économique et politique néolibéral ? Les représentants du PS et de l’UMP sacrifient-t-ils donc la liberté des Français sur l’autel de leur ordre économique et politique, c’est-à-dire celui de la classe capitaliste dominante si l’on veut adopter une démarche marxisante ?

C’est plutôt cette dernière hypothèse qui semble dominante même si les autres peuvent avoir aussi une certaine validité. Difficile d’expliquer autrement ce dogmatisme, ce sectarisme (très bien dénoncé Mediapart) conduisant à refuser d’écouter la quasi-totalité des associations et des syndicats défendant les droits fondamentaux mais aussi de prendre en compte les recommandations du rapporteur au Parlement européen concernant la surveillance massive de la population.

Ainsi, la rédaction de l’article 5 sous sa forme actuelle peut conduire à interpréter la loi comme un outil permettant d’instrumentaliser les services de renseignement comme police politique au service d’un gouvernement ou encore, non pas d’agir au service de l’intérêt général, mais au service d’une oligarchie économique et financière. La légitimité de l’action des services de renseignement s’en trouve alors largement affectée, ce qui est plus que regrettable.

Considérer comme suspecte la quasi-totalité de la population placée ainsi en "liberté surveillée" créé un divorce entre l’État et les citoyens, entre la représentation politique et la population du fait que le rapport de confiance mutuelle est ainsi rompu. Au motif d’isoler quelques énergumènes attentant (gravement ? ) à l’ordre public à l’aide d’un immense tamis électronique, on déchire la draperie républicaine du vivre ensemble et de l’esprit libre. "La France qui bouge" n’a pas à être inquiétée par une surveillance permanente qui attente ainsi à sa liberté non seulement d’expression mais aussi de conscience.

Contrairement à ce que pourrait laisser penser une approche superficielle et démagogique, ce n’est pas en votant des lois sécuritaires que les partis politiques vont récupérer la confiance perdue d’une large part de leur électorat. En l’occurrence, cette loi ne fait qu’aggraver le fossé déjà considérable qui sépare la représentation politique du corps électoral.

D’ailleurs, le sondage réalisé par le CSA indiquant que 63% des Français Serait favorables à la loi n’a pas grande fiabilité et est cousu. de fil blanc. Voir l’explication sur le site "Là-bas si j’y suis" (47 bis )

Cette analyse est donc en continuité avec l’article précédent : "Loi sur le renseignement 1 : construction d’un État démocratico–policier ? " que l’on peut retrouver en cliquant ici.

IV – Rappel de quelques droits fondamentaux

Cette loi constituant une menace pour les libertés et les droits fondamentaux, il est utile d’en rappeler quelques-uns.

Commençons par citer un extrait des recommandations de la Commission national du numérique. (48)

"Il convient ainsi de définir un régime juridique global, cohérent et protecteur des libertés fondamentales pour les activités de renseignement, ménageant un juste équilibre entre les nécessités constitutionnelles de préservation de l’ordre public – à laquelle les services de renseignement participent – et les droits de chacun au respect de sa vie privée, de sa correspondance, de son domicile et de ses données personnelles.

Ce régime doit être conforme à l’article 2 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 et à l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales aux termes duquel il ne peut y avoir ingérence d’une autorité publique dans l’exercice du droit au respect de la vie privée et familiale, du domicile et de la correspondance que pour autant qu’elle est prévue par une loi accessible et prévisible et qu’elle est nécessaire, dans une société démocratique, à la poursuite d’un but légitime.…"

Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789

Art. 2. Le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l’Homme. Ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté, et la résistance à l’oppression.

Art. 10. Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la Loi.

Art. 11. La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l’Homme : tout Citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la Loi.

Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1793

Article 7. - Le droit de manifester sa pensée et ses opinions, soit par la voie de la presse, soit de toute autre manière, le droit de s’assembler paisiblement, le libre exercice des cultes, ne peuvent être interdits. - La nécessité d’énoncer ces droits suppose ou la présence ou le souvenir récent du despotisme.

Déclaration universelle des droits de l’Homme de 1948

Article 12 Nul ne sera l’objet d’immixtions arbitraires dans sa vie privée, sa famille, son domicile ou sa correspondance, ni d’atteintes à son honneur et à sa réputation. Toute personne a droit à la protection de la loi contre de telles immixtions ou de telles atteintes.

Article 19 Tout individu a droit à la liberté d’opinion et d’expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d’expression que ce soit.

Article 66 de la Constitution de la France du 4 octobre 1958

« Nul ne peut être arbitrairement détenu. L’autorité judiciaire, gardienne de la liberté individuelle, assure le respect de ce principe dans les conditions prévues par la loi. »

Convention européenne des droits de l’Homme

Article 8 – Droit au respect de la vie privée et familiale Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d’une autorité publique dans l’exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu’elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l’ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d’autrui. Article 9 – Liberté de pensée, de conscience et de religion Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion ; ce droit implique la liberté de changer de religion ou de conviction, ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction individuellement ou collectivement, en public ou en privé, par le culte, l’enseignement, les pratiques et l’accomplissement des rites. La liberté de manifester sa religion ou ses convictions ne peut faire l’objet d’autres restrictions que celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité publique, à la protection de l’ordre, de la santé ou de la morale publiques, ou à la protection des droits et libertés d’autrui.

Article 10 – Liberté d’expression Toute personne a droit à la liberté d’expression. Ce droit comprend la liberté d’opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu’il puisse y avoir ingérence d’autorités publiques et sans considération de frontière. Le présent article n’empêche pas les Etats de soumettre les entreprises de radiodiffusion, de cinéma ou de télévision à un régime d’autorisations. L’exercice de ces libertés comportant des devoirs et des responsabilités peut être soumis à certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions prévues par la loi, qui constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à l’intégrité territoriale ou à la sûreté publique, à la défense de l’ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, à la protection de la réputation ou des droits d’autrui, pour empêcher la divulgation d’informations confidentielles ou pour garantir l’autorité et l’impartialité du pouvoir judiciaire.

V – Le droit de manifestation La liberté de réunion

1 – Le droit de manifestation.

Le site Vie public considère ce droit comme fondamental (49) ce qui est discutable d’un point de vu strictement juridique. Contrairement à une croyance assez répandue, contrairement au droit de grève, il ne s’agit pas d’un droit inscrit dans la constitution française contrairement à celles des États-Unis et du Canada par exemple.

En effet, comme le rappelle Pierre FAYRE Professeur à l’Institut d’Etudes politiques de Paris dans une étude intéressante intitulée : "La manifestation entre droit et politique" (50)

"On est donc ici en présence d’une croyance en l’existence d’un droit consacré au plus haut niveau de l’échelle des normes, croyance que ne ratifie pas le juriste. Le juriste, lui, parle de "liberté innommée, non explicitement consacrée par le constituant ou le législateur et ne présentant pas le caractère de liberté fondamentale", voire de "tolérance administrative" La représentation du droit est donc ici au plus loin du droit.

Législation concernant le droit de manifestation.

On trouve l’ensemble des textes concernant le droit de manifestation dans le code de la sécurité intérieure dont la totalité est disponible en cliquant ici (51)

Rappelons la hiérarchie du "chavirage" utilisé dans les ouvrages de droit : Livre – titre – chapitre– Section– Sous-section. Remarquons que code (Mis à jour ici au 1er mai 2015) contient toutes les dispositions qui sont mentionnées dans la loi du 5 mai 2015.La loi sur le renseignement actualiser ce code pour certains chapitres après son adoption par le Sénat et son examen par le conseil constitutionnel.

En consultant la table des matières du code, la législation sur le droit de manifestation figure au livre II – titre 1er – Chapitre 1er avec ses Sections 1 à 4 et pour la partie pénale la section 5 avec ses sous-sections 1 à 3. Il suffit de cliquer sur un élément parmi ces paragraphes pour accéder au texte choisi.

(Remarquons que la lutte contre le terrorisme concerne le titre II qui succède au titre I précédent du même livre II.)

On peut lire les références à cette législation dans une note documentaire rédigée par le préfet du Gard (52) : On y découvre tout l’arsenal juridique relatif au droit de manifestation : il n’est pas léger !

Extrait : "Les manifestations sont régies par les articles L. 211-1 à L. 211-14 du code de la sécurité intérieure. Ces articles sont issus du décret-loi aujourd’hui abrogé du 23 octobre 1935 portant réglementation des mesures relatives au renforcement du maintien de l’ordre, et modifié en dernier lieu par la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995.

Cette dernière a été encadrée par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 94-352 du 18 janvier 1995 en considérant que la prévention d’atteintes à l’ordre public est nécessaire à la sauvegarde des principes et droits à valeur constitutionnelle et qu’il appartient au législateur d’assurer la conciliation entre les objectifs de valeur constitutionnelle et l’exercice des libertés publiques constitutionnellement garanties."

Bon rappel, mais il n’est pas sûr que le législateur (L’Assemblée nationale) ait accompli correctement ses responsabilités le 5 mai 2015)

On peut avoir un récapitulatif des infractions et délits possibles liés aux manifestations en cliquant ici (53). Ce tableau à l’avantage de permettre à tout manifestant, d’un seul coup d’œil, de connaître à quoi il s’expose au niveau pénal en ne respectant pas les règles du droit.

On constate donc que le droit de manifestation est non seulement encadré par le code de la sécurité intérieure mais aussi par le code pénal. En voici deux exemples.

L’article 431-1 du Code pénal dispose que « le fait d’entraver, d’une manière concertée et à l’aide de menaces, l’exercice de la liberté d’expression, du travail, d’association, de réunion ou de manifestation est puni d’un an d’emprisonnement et de 15.000 euros d’amende. Le fait d’entraver, d’une manière concertée et à l’aide de coups, violences, voies de fait, destructions ou dégradations au sens du présent code, l’exercice d’une des libertés visées à l’alinéa précédent est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45.000 euros d’amende »

Article 431-3 Modifié par Ordonnance n°2012-351 du 12 mars 2012 - art. 8 Constitue un attroupement tout rassemblement de personnes sur la voie publique ou dans un lieu public susceptible de troubler l’ordre public. Un attroupement peut être dissipé par la force publique après deux sommations de se disperser restées sans effet adressées dans les conditions et selon les modalités prévues par l’article L. 211-9 du code de la sécurité intérieure.

À cette législation s’en ajoute une autre qui intéresse surtout les élus locaux, les fonctionnaires chargés de la sécurité et les assureurs. Il s’agit de la responsabilité de l’État et des communes concernant notamment les dégâts éventuelles provoquées lors des manifestations. La loi du 16 avril 1914. faisait le partage des responsabilités entre les communes et l’État sur le maintien de l’ordre et les frais occasionnés par les "violences sociales." (54) Elle est modernisée et remplacée par l’article L.2216-3 du code général des collectivités territoriales qui est à son tour, actualisée par l’article L211-10 du code de la sécurité intérieure.(55)

L’imprécision de la définition de la notion d’attroupement a provoqué de nombreux litiges de sorte que le conseil d’État par arrêt en date du 11 juillet 2011 précise les responsabilités de l’État au regard de la notion d’attroupement. (55’)

Il est donc important de connaître cette législation lorsque l’on organise ou que l’on participe à une manifestation pour ne pas tomber dans le piège d’une sortie de son cadre légal. Sortir de ce cadre, c’est s’exposer à une application stricte de la loi (la rigueur de son application dépend de plusieurs facteurs contextuels) et Les organisations syndicales ou les organisations politiques de l’Autre gauche parleront alors de "criminalisation" de l’action syndicale ou du mouvement social.

Il est aussi utile de connaître l’existence éventuelle d’agents provocateurs de toute nature. L’encyclopédie en ligne Wikipédia a traité de manière claire cette question dans son article : Agent provocateur (55’’) )

2 – Les mouvements insurrectionnels.

À cette législation, le code pénal prévoit aussi une législation concernant les mouvements insurrectionnels. C’est l’objet des articles 412–3 à 412–6 du code pénal. Le mérite de cette nouvelle rédaction par rapport aux anciens articles 97 à 99 (mentionnés dans le document précédemment indiqué de Pierre FAYRE) du code pénal est que le terme "mouvement insurrectionnel" est clairement défini. (56) Les peines sont ici particulièrement lourdes pouvant aller jusqu’à la réclusion à perpétuité.

3 – La liberté de réunion à l’épreuve de la constitution.

Le site universitaire "Le petit juriste" a consacré une étude sur la liberté de réunion et d’expression au regard de la constitution. Cliquez ici (57) pour accéder à l’étude.

On peut lire par exemple dans cette étude qui concerne évidemment aussi la liberté d’expression : "Dans l’arrêt Handyside du 7 décembre 1976 la Cour affirme que la liberté d’expression « vaut non seulement pour les informations ou idées accueillies avec faveur ou considérées comme inoffensives ou indifférentes, mais aussi pour celles qui heurtent, choquent ou inquiètent l’État ou une fraction quelconque de la population."

4 – La protection des données personnelles.

Un article intéressant publié par l’INRIA Rennes – Bretagne "Préserver sa vie privée à l’ère du numérique" (58)

La CNIL a publié un guide pratique pour la protection des données personnelles.(59)

Nous reviendrons sur le contenu de la loi après le vote du Sénat et l’avis du conseil constitutionnel.puis probablement ultérieurement après l’avis de la Commission européenne des droits de l’Homme. Nous n’avons abordé ici que quelques aspects de la loi. Le lecteur a la possibilité d’avoir une analyse plus complète en utilisant les liens indiqués conduisant aux avis des syndicats de magistrats notamment.

Annexes

Le contrôle parlementaire des services de renseignements, enfin ! par Jean-Jacques Urvoas Observatoire Thémis de la fondation Jean-Jaurès (04/02/2014) (60)

Les cahiers de la sécurité intérieure ( Site ici (61) constituent une source d’informations intéressantes concernant les problèmes de sécurité et de renseignements. Un certain nombre de numéros sont disponibles en ligne Voici quelques extraits complétant nos propos.

Les crises collectives au XXIme siècle.Quel constat ? Quelles réponses ? (62) Les cahiers de la sécurité intérieure. No 10

"La résilience se définit comme « la volonté et la capacité d’un pays, de la société et des pouvoirs publics à résister aux conséquences d’une agression ou d’une catastrophe majeures, puis à rétablir rapidement leur capacité de fonctionner normalement », ou à tout le moins dans un mode socialement acceptable. Elle concerne non seulement les pouvoirs publics, mais encore les acteurs économiques et la société civile tout entière.

La nature des crises possibles dans les prochaines années appelle la prise en compte, dans la stratégie de sécurité nationale, de l’objectif de résilience. C’est en effet un devoir pour l’État de se préparer à répondre aux situations dans lesquelles pourraient être mis en cause la vie de la population ou le fonctionnement régulier de la vie économique, sociale ou institutionnelle du pays. Cela suppose une « organisation des pouvoirs publics » conçue dès le temps de paix pour prendre en compte les hypothèses du temps de crise, et l’établissement de priorités dans les capacités de renseignement, d’analyse et de décision. La résilience suppose aussi d’organiser la « coopération entre l’État et les collectivités territoriales », pour la complémentarité des moyens, et entre l’État et « les entreprises privées »"

Les cahiers de la sécurité intérieure No 13 : Le défi du renseignement.(63)

"…Cependant, quel que soit le qualificatif que leur attribuent les différents auteurs, ces menaces possèdent un certain nombre de caractères récurrents. Elles préexistaient pour la plupart, mais leur manifestation a pris des proportions inquiétantes pour la sécurité des États et la cohésion nationale. Elles sont le fait d’organisations criminelles structurées et relèvent d’incriminations prévues par le Code pénal. Leur caractère est transnational. Elles sont de nature à porter atteinte à la sécurité nationale. Les trafics en tout genre, le terrorisme, la délinquance économique et financière, les atteintes au patrimoine scientifique et technique, la cybercriminalité entrent dans ce champ"

Autre article du même numéro : Bertrand Warusfel Renseignements et État de droit.

"Si le renseignement doit être un instrument nécessaire des politiques publiques, il doit donc en respecter également les fondements juridiques. En effet, on ne pourrait accepter qu’un système politique respectueux du droit mette en oeuvre durablement des moyens qui lui seraient contraires. Il faut donc trouver les voies d’une conciliation durable entre État de droit et pratiques publiques de renseignement, faute de quoi ces dernières perdraient de leur légitimité et donc, rapidement, de leur efficacité". (P116)

Un point de vue patronal partagé.

Source : L’usine digitale (63’) et scoop.it ! (63’’)

"… Concrètement, au delà de la surveillance de citoyens, les entreprises risquent de faire l’objet d’une surveillance accrue de la part du gouvernement. Une protection étatique "utile et nécessaire pour les entreprises", affirme Alain Juillet, président du Club des directeurs de sécurité des entreprises (CDSE), qui en profite pour dresser un constat alarmant de la situation actuelle : "Il faut qu’on ait les moyens de se protéger. La France est quasiment démunie dans ces domaines. Nous avons une augmentation de 40% des attaques d’entreprises par des actions dans le cyberespace lors des deux dernières années (statistiques du CDSE). C’est une nécessité absolue si on veut préserver l’outil industriel français car à chaque attaque contre une entreprise, c’est forcement de l’emploi qui s’en va." Celui qui fut directeur du renseignement de la DGSE entre 2002 et 2003 joue sur la corde sensible.

Ingérence de l’Etat dans la vie des entreprises

Mais certains voient ces dispositions comme une ingérence de l’Etat dans la vie des entreprises pour en contrôler le cours. Nos dirigeants ne l’utiliseront-ils pas pour s’immiscer dans des discussions de cessions qui lui déplairaient ? On pense à la vente d’Alstom à General Electric où l’exécutif s’est plaint de ne pas avoir été tenu au courant suffisament tôt ou au blocage récent par Bercy du rachat de Dailymotion par le Chinois PCCW. 

D’autres experts en intelligence économique voient au contraire dans ces dispositions un moyen de protéger les entreprises françaises contre l’espionnage économique. "Dans le contexte post-attentats de janvier, et le piratage de TV5 Monde, cette loi sur le renseignement vise en priorité absolue la lutte anti terroriste. Mais les textes d’application sont beaucoup plus larges", précise Christian Harbulot, directeur de l’Ecole de guerre économique.…"

Publications célèbres sur la société de contrôle.

Post-scriptum sur les sociétés de contrôle de Gilles Deleuze disponible en ligne ici (64)

1984 de George Orwell disponible gratuitement en ligne en cliquant ici (65)

Vidéo formation

Loi renseignement sur la chaîne parlementaire LCP en vidéos.(66a) et (66b)

Document d’archives 2010 :Numérique : Tous en liberté surveillée ? (67) Vidéo :Avec Claude Kirchner, directeur de recherche à l’INRIA (Bordeaux) et Sébastien Canevet, avocat, professeur de droit privé à l’université de Tours. Débat en 3 parties accessibles dans MENU / chapitres. Réalisation : Sylvie Allonneau Production : universcience 2010 

Loi renseignements : Tous suspects (68) 20 vidéos disponibles sur le renseignement et la surveillance.

Souriez, vous êtes cyber surveillés ! (Mars 2015) (69) 11 vidéos disponibles en ligne sur la surveillance de masse.

Film :Un œil sur vous, citoyens sous surveillance (70)

Cliquez, vous êtes traqués France 5 (mars 2015) (71)

Mots Croisés : Tous protégés ? Tous surveillés. Patriot act made in France sur France 2 (Avril 2015) (72)

France 2. Envoyé spécial. Dans l’ombre du renseignement . Documentaire 35 minutes.(73)

Hervé Debonrivage


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