Australie : la mémoire des Aborigènes remonte à plus de 7000 ans

jeudi 24 septembre 2015.
 

Certaines civilisations n’écrivent pas leurs légendes, leurs souvenirs, leur histoire. Cela ne les empêche pas pour autant de les transmettre, de bouche à oreille, pendant des générations. Des centaines de générations, voire des milliers.

C’est le cas des Aborigènes d’Australie qui, selon une étude qui vient d’être publiée dans la revue Australian Geographer, perpétueraient des récits vieux d’au moins 7000 ans.

Patrick Nunn, professeur de géographie à l’université de Sunshine Coast (Australie), aidé du linguiste Nick Ried, a recueilli des récits aborigènes de 21 sites le long de la côte australienne, qui décrivent une époque où le niveau des mers était beaucoup plus bas qu’aujourd’hui.

Les histoires aborigènes, qui se recoupent, évoquent des détails du paysage aujourd’hui sous les eaux. Ils parlent de bandes de terre permettant de passer d’un point à un autre, d’îles aujourd’hui disparues... tout ceci pouvant être mis en correspondance avec ce que nous connaissons du niveau des mers avant leur montée (provoquée par la fonte des glaces après la dernière période glaciaire).

"Ces histoires parlent d’un temps où la mer a commencé à s’avancer et recouvrir les terres, et des changements que cela a provoqué pour le mode de vie des gens, les changements dans le paysage, dans l’écosystème et les problèmes que cela a causé dans leur société", explique Patrick Nunn. Et il ne s’agit pas d’un ou deux cas isolés : "Il est important de noter que ce n’est pas juste une histoire qui décrit ce processus. Il y a beaucoup, beaucoup d’histoires, toutes constantes dans leur narration, dans 21 sites situés tout au long de la côte australienne".

Le duo de scientifiques cite par exemple le récit de la formation d’une baie actuelle : "Il y a très longtemps, les hommes pouvaient traverser à pied sec de notre côté de la baie jusqu’à Geelong (à l’ouest)". Ils décrivent alors un ouragan, les arbres qui se courbent, puis la terre qui s’enfonce et la mer qui se précipite jusqu’à ce que les lieux prennent l’aspect qu’ils ont aujourd’hui...

La méthode de datation employée pour estimer l’âge de ces récits aborigènes donne une fourchette située entre 7250 et 13070 ans, en fonction des détails décrits et des éléments que nous avons sur la géographie des lieux et son évolution. Une ancienneté qui s’explique par la nature de la civilisation aborigène. Ces peuples ont vécu isolés en Australie, occupant les mêmes territoires, durant 50 à 60 000 ans. Patrick Nunn pense que "ces histoires ont été transmises depuis aussi longtemps en partie à cause de la rudesse de l’environnement naturel australien, qui impliquait que chaque génération doive transmettre ses connaissances à la suivante de manière systématique afin d’assurer sa survie".

Il n’en demeure pas moins que la transmission de récits sur une période de plus de sept millénaires est exceptionnelle. Pour les auteurs de l’étude, "les implications de cette longévité extraordinaire des traditions orales" pourraient laisser penser que "des traditions d’une ancienneté comparable puissent exister dans des cultures similaires"...


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